Symbiosis, un concept urbain circulaire

Symbiosis, un concept urbain circulaire

Une ville dans laquelle les ressources seraient partagées, renouvelables, réutilisées, gérées en interconnexion, dans la sobriété et l’intelligence… Chantier en cours, sur les friches d’Esch-Schifflange.

La « ville du futur » prend forme. Elle se pense et se construit, pour durer. Et si elle prenait naissance à Esch-Schifflange, sur ces terres, rouges et en friches, où un ancien site sidérurgique trouve une autre vie ? C’est l’ambition d’Agora et de ses partenaires…

On sait que l’État luxembourgeois et ArcelorMittal (qui constituent Agora), la ville d’Esch-sur-Alzette et la commune de Schifflange ont lancé le projet de développement urbain sur la friche industrielle d’Esch et Schifflange.

Ce futur quartier s’inscrit pleinement dans la logique durable et circulaire. Il s’articule autour du concept urbain Symbiosis, « une solution technique grâce à laquelle toutes les ressources sont constamment réutilisées et recyclées », comme l’explique Agora.

Des esprits en communion

Il y a, au centre du projet, une série de grandes questions : « Comment créer le quartier le plus fonctionnel possible et inventer les services publics les plus innovants tout en assurant de très faibles émissions de carbone ? Comment faire pour que chaque source d’approvisionnement nécessaire au bon fonctionnement des services publics de la ville soit exploitée le plus pleinement possible ? Comment créer un quartier dans lequel les gestions de l’eau, des déchets, de l’énergie et de la qualité de l’air s’imbriquent et interagissent de manière à exploiter chaque ressource au maximum ? »

Agora, la ville d’Esch-sur-Alzette et la commune de Schifflange ont, pour répondre à ces questions et rencontrer les défis, mené une concertation, avec les instigateurs du projet, des entreprises énergétiques locales, des chercheurs de l’Université, des administrations publiques, du ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, de Sudcal et Sudstroum…

Plusieurs scénarios ont émergé. Le quartier se voit en cité solaire, sobre et efficace pour les ressources en eau, voire « cité-forêt » et, en tout cas, durable et circulaire. « Agora soumet maintenant ces scénarios à un bureau d’études chargé d’en évaluer la faisabilité et de proposer un concept technique faisant la part belle à des solutions intégrées innovantes. C’est la première étape pour rendre le rêve réalité ».

Anticiper pour rester une « low carbon city »

« On a essayé de réfléchir dès le début en termes globaux, à travers la notion de flux », explique Yves Biwer, coordonnateur du quartier Alzette chez Agora. « On a réfléchi globalement aux flux de chaleur et de froid, à la gestion des extrêmes climatiques, puis aux déchets, à l’eau pluviale, aux eaux grises et eaux noires. Et à la façon dont ces flux peuvent interagir. Cela nous a amené à envisager des mécanismes très concrets et à considérer, par exemple, des solutions telles que l’utilisation de pompes à chaleur connectées à une citerne de récupération d’eau de pluie. »

Le projet Symbiosis ambitionne de « fabriquer » le quartier en anticipant son développement futur et de penser des structures urbaines jouant la sobriété pour rester une « low carbon city ». Conseiller énergie et écologie à la ville d’Esch, Jeannot Behm dit s’appuyer sur des grandes tendances pour imaginer la ville de demain : « On sait par exemple que le besoin en parking ne sera plus le même grâce aux voitures autonomes et que la mobilité douce sera accentuée. On essaie surtout de penser des infrastructures résilientes et flexibles, qui seront les plus adaptables possibles. »

Des réseaux intelligents, une réutilisation prioritaire

L’une des idées phare de Symbiosis est la création de réseaux intelligents (Smart Flows) pour l’électricité et les déchets, basés sur des flux d’approvisionnement et de consommation (besoins en électricité, chaud, froid, eau, télécom…) utilisant des interconnections, au niveau des infrastructures et de la gestion informatisée. « Dans notre projet, les réseaux utiliseraient strictement des énergies renouvelables, en priorité une combinaison de pompes à chaleur et d’énergie solaire thermique avec panneaux photovoltaïques. Le réseau intelligent permet par exemple d’économiser l’utilisation de la pompe à chaleur quand elle reçoit l’information que la chaleur solaire est suffisante. On peut aussi l’utiliser pour stocker de l’énergie. »

L’intelligence artificielle, les technologies numériques, l’IoT (objets connectés) seront au cœur des réseaux mais ne seront pas une fin en soi. « Nous utiliserons aussi des systèmes low tech, quand ils s’avèreront mieux adaptés ou plus flexibles. La pompe à chaleur, la station d’épuration ou le stockage d’eau de pluie n’ont rien de nouveau. L’innovation, c’est de les utiliser de façon aussi pleinement interconnectée. »

Symbiosis prévoit ainsi une circulation et une réutilisation constante de l’énergie, de l’eau ou des déchets (limités au maximum), dans un principe de circularité infini. « Cette vision commence dès le chantier de construction, avec des matériaux renouvelables, et l’on veut s’assurer que les matériaux en plus puissent être réutilisés ailleurs dans le système. » On retrouvera notamment cette vision circulaire dans la gestion quotidienne de l’eau domestique. Par exemple, l’eau utilisée pour la douche ne filera pas aux eaux usées mais sera d’abord réutilisée pour la chasse d’eau des toilettes, avant d’être ensuite réacheminée dans le réseau d’aqueduc pour être filtrée et réutilisée. « La circularité commence à petite échelle, dans votre logis même… Le mot d’ordre, c’est de toujours valoriser la réutilisation et la transformation. Il faut penser chaque ressource en fonction de plusieurs affectations et pour répondre à plusieurs besoins à la fois », conclut Jeannot Behm.

Alain Ducat

Photos : © Agora

Plus d’infos dans la série « libre accès » via le blog Agora

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Publié le jeudi 2 juin 2022
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