« Dans chaque parcours de vie, s’épanouir au travail est très valorisant »
À travers ses ateliers protégés, le Tricentenaire permet aux travailleurs en situation de handicap de disposer d’un emploi rémunéré avec un encadrement adapté. Interview de Christophe Lesuisse, administrateur délégué.
Combien de personnes en situation de handicap travaillent actuellement au sein des ateliers du Tricentenaire ?
Il y a 40 personnes qui ont trouvé un emploi dans les différentes activités (Atelier du Thé, Atelier Chocolaterie, Imprimerie et autres services tels que le conditionnement, l’assemblage, le triage, etc.).
Quels sont les challenges liés à l’embauche de personnes en situation de handicap ?
Le challenge le plus important est d’amener les personnes vers plus d’autonomie et de leur permettre d’évoluer dans leur prise de poste et dans leur métier, tout en mettant à leur disposition un milieu qui soit à la fois bienveillant et sécurisant. On ne doit pas être dans du paternalisme, mais être tout de même très soutenant.
Selon les chiffres de l’Adem, il y a actuellement 4 000 travailleurs handicapés qui ont un emploi, soit 40 % des potentiels travailleurs en situation de handicap. Ce chiffre a augmenté (35 % en 2015) ces dernières années. Qu’est-ce qui a favorisé cette évolution ?
C’est certainement la politique du ministère du Travail et de l’Économie sociale et solidaire qui encourage l’embauche de personnes en situation de handicap.
Ne serait-il pas souhaitable que la démarche vienne des entreprises elles-mêmes ?
Selon moi, le milieu des ateliers protégés (même si le nom ne me plaît pas trop) reste une réponse indispensable dans le processus de mise au travail de personnes en situation de handicap. Quant à l’insertion en milieu ordinaire, je pense qu’elle est quasi impossible sans un accompagnement (« job coaching ») : l’employeur est démuni face aux adaptations physiques ou à certains comportements plus difficiles à accompagner, et l’employé peut se trouver insécurisé ou pas tout à fait admis comme un vrai collègue. Bien sûr, il existe une multitude de personnes qui ont chacune une situation de handicap qui leur est propre et chaque situation demande un accompagnement différent.
Les personnes travaillant en atelier protégé y restent-elles pour une période de transition ou s’installent-elles pour une longue carrière ?
On souhaiterait, et on fait tout pour qu’elles puissent rejoindre le milieu de l’entreprise « ordinaire », mais on constate que c’est souvent l’inverse : de nombreuses personnes ont essayé, après une scolarité différenciée, de rejoindre le milieu ordinaire et se replient sur l’orientation en atelier protégé.
Donner du travail aux personnes en situation de handicap, c’est également les aider à s’intégrer et à s’épanouir en société…
Tout à fait. Nous n’avons pas ouvert les ateliers pour vendre du chocolat par exemple, mais pour créer un emploi valorisant pour les personnes en situation de handicap. Le défi est d’obtenir une rentabilité, un équilibre, d’être une vraie valeur ajoutée dans la société et en même temps de permettre de donner un travail valorisant à des personnes qui sinon n’auraient pas la possibilité d’être au travail. Dans chaque parcours de vie, s’épanouir au travail est très valorisant. Au bout de quelques semaines en atelier, on voit ces personnes s’épanouir pleinement par la sociabilisation qu’amène le fait de se rendre chaque matin sur son lieu de travail.
Marie-Astrid Heyde
Photos : © Editpress/Fabrizio Pizzolante
Article tiré du dossier du mois Infogreen « Ready 4 diversity ? »