Bruxelles-Luxembourg : la bataille duraille
Une liaison ferroviaire efficace et rapide entre deux capitales européennes aux flux transfrontaliers intenses : un combat de longue haleine et de longue date… Un dossier récurrent et tortillard ! Les ministres luxembourgeois et belge de la mobilité en appellent aux investissements communautaires, en cette année européenne du rail.
Des années que cela dure. Mais vraiment des années. D’ailleurs, les défenseurs d’un rail efficace entre Bruxelles et Luxembourg ne manquent jamais de rappeler que le trajet en train entre les deux villes-capitales est plus long aujourd’hui que dans les années 1970. Deux générations de navetteurs, pour un dossier tortillard.
Loin des horizons du TGV, la ligne 161-162, véritable colonne vertébrale électrifiée dès 1956, manque cruellement d’investissements et reste réputée pour être la « grande ligne » belge, la plus longue aussi, ayant la plus faible vitesse de référence (130 km/h). Résultat : descendre sous les 2 heures de trajet (contre 2h40 aujourd’hui, si tout va bien) demeure un objectif depuis très longtemps. Voire une chimère.
Une liaison capitale, un symbole européen
Ce ne sont ni les projets ni les idées qui ont manqué au cours des 20 dernières années, pas même les déclarations politiques ni les chantiers récurrents…
Chaque rencontre bilatérale belgo-luxembourgeoise évoque le sujet. C’est que la relation, outre le lien physique par le rail, est forte entre Bruxelles et Luxembourg.
Les historiens rappellent volontiers que la ligne fut construite, au milieu du 19e siècle, par la Grande compagnie du Luxembourg (qui était certes un consortium d’investisseurs anglais souhaitant acheminer la malle des Indes par le rail).
Et, sur fond constellé du drapeau de l’Union, il ressort une gare, Bruxelles-Luxembourg (anciennement Quartier Léopold), située place du Luxembourg à Ixelles, dans le quartier du Parlement européen.
Bref, un symbole fort, un besoin évident, mais une bataille duraille dans sa progression !
Green Deal et Next Generation : 2021, moment-clé
Les ministres luxembourgeois et belge en charge de la mobilité viennent de relancer le combat, sur le front européen précisément, en souhaitant le placer sous les projecteurs du Green Deal. « 2021 est l’année européenne du rail, mais aussi l’année du plan de relance Next Generation. La mobilité ferroviaire transfrontalière doit être le fer de lance du pacte vert européen. Les ministres luxembourgeois et belge de la Mobilité en font leur priorité commune dans le cadre du plan d’investissement pour une Europe durable. Ils ont interpellé la Commission européenne afin que des investissements soient réalisés pour l’axe Bruxelles-Luxembourg », a annoncé un communiqué commun de François Bausch, Vice-Premier ministre et ministre de la Mobilité et des Travaux publics du Grand-Duché de Luxembourg, et Georges Gilkinet, Vice-Premier ministre et ministre de la Mobilité du gouvernement fédéral belge.
Les deux ministres écologistes ont envoyé un courrier co-signé, le 14 janvier dernier, à l’attention de Frans Timmermans, vice-président néerlandais de la Commission européenne, en charge du pacte vert pour l’Europe. Objectif : mobiliser des sources de financement pour l’axe ferroviaire Bruxelles-Luxembourg dans le cadre du plan d’investissement pour une Europe durable.
Priorités européennes et nationales
Pour Georges Gilkinet, « les travaux qui touchent en Belgique un tronçon d’une longueur de 175 kilomètres sont d’une haute complexité technique et concernent tous les types de travaux : génie civil, voies caténaires, signalisation et changement de tension… » François Bausch y voit « un projet qui s’inscrit parfaitement dans la logique d’investissements transfrontaliers financés par la Commission. Des deux côtés de la frontière, les travaux réalisés sur l’axe ferroviaire Bruxelles-Luxembourg témoignent de cette ambition partagée avec la Commission européenne : investir dans le rail pour une mobilité durable et performante, au service de ses usagers mais aussi de notre économie, de nos emplois et de notre environnement. »
Les ministres évoquent également ce plus que symbolique axe ferroviaire européen Bruxelles-Luxembourg-Strasbourg, qui faisait partie des projets retenus - EuroCapRail -, dès 2004, par le Parlement et le Conseil, dans les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen de transport.
Les deux hommes soulignent enfin que cette liaison concerne non seulement le trafic voyageurs mais également le fret. Elle est dans le « corridor Mer du Nord-Méditerranée ». Elle s’intègre ainsi dans une priorité européenne : déplacer vers le rail une part substantielle des 75% du fret passant actuellement par la route.
Et si l’Europe veut investir durablement, il y a là des investissements à faire, à aider, à encourager. Un appel clair !
Alain Ducat
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Bruxelles-Luxembourg, la gare du Parlement européen à Bruxelles, symbole d’une liaison capitale.
Luxembourg-Gare centrale