Chaleur sur l’Europe : s’adapter ou subir le changement climatique
Une enquête de la Banque européenne d’investissement (BEI) pour 2024-2025 révèle que 94 % des Européens reconnaissent l’urgence d’adapter leurs pays au changement climatique. Tandis que l’Europe fait face à des événements extrêmes croissants, l’adaptation apparaît comme un impératif économique, social et environnemental.
Une prise de conscience accrue à travers l’Europe
La septième édition de l’enquête climatique de la BEI souligne un constat sans appel : l’adaptation climatique est devenue une priorité pour la majorité des Européens. 50 % considèrent ce besoin comme urgent, un chiffre qui monte à 65 % dans les pays du sud de l’Europe, où les vagues de chaleur, les sécheresses et les tempêtes violentes sont de plus en plus fréquentes.
80 % des citoyens européens ont déjà subi un événement météorologique extrême au cours des cinq dernières années, qu’il s’agisse de vagues de chaleur (55 %), de sécheresses (35 %) ou de tempêtes (34 %).
Les répondants reconnaissent aussi les implications économiques de l’inaction. Plus de 85 % estiment que des investissements immédiats dans l’adaptation permettraient de limiter les coûts futurs liés aux catastrophes climatiques. Par ailleurs, 86 % pensent que ces mesures peuvent également stimuler l’économie locale et créer des emplois.
Une Europe à deux vitesses
Les résultats de l’enquête révèlent des disparités régionales significatives dans la perception des priorités climatiques :
- Les pays du Sud, comme l’Espagne ou l’Italie, sont les plus inquiets et investis dans la transition climatique. Cela reflète leur exposition fréquente à des catastrophes naturelles.
- À l’inverse, les Pays-Bas, malgré leur expertise en adaptation technologique, montrent un engagement plus limité. Ce pays affiche des taux inférieurs aux autres régions concernant l’urgence de s’adapter ou de changer de mode de vie.
- Dans les pays de l’Est, d’autres priorités, comme les tensions géopolitiques, réduisent l’attention portée aux enjeux climatiques, bien que les récents événements extrêmes y augmentent progressivement l’inquiétude des citoyens.
Ces contrastes culturels et géographiques posent la question de la coordination européenne sur les réponses à apporter face aux défis climatiques.
Les priorités en matière d’adaptation
Face à l’urgence, plusieurs priorités émergent des réponses des participants :
- Rafraîchir les villes : la création d’espaces verts urbains est identifiée comme une mesure clé pour lutter contre les vagues de chaleur.
- Améliorer les infrastructures : des systèmes de drainage efficaces et des protections contre les inondations sont essentiels pour gérer les événements extrêmes.
- Sensibiliser les citoyens : 60 % des Européens ignorent encore l’existence de subventions ou d’aides publiques pour faciliter leur adaptation.
Cependant, les pays diffèrent quant à l’importance accordée à ces mesures. En Espagne, par exemple, l’éducation à la prévention reste une lacune importante, alors qu’en France, les citoyens semblent mieux informés sur les comportements à adopter face aux risques. L’éducation est essentielle pour préparer les citoyens aux crises climatiques. L’Espagne illustre ce besoin avec des déficits flagrants qui exacerbent la vulnérabilité des populations.
Zoom sur le Luxembourg : aligné mais distinct
Le Luxembourg, bien que globalement aligné sur les tendances européennes, présente des spécificités notables.
- 95 % des Luxembourgeois reconnaissent la nécessité d’une adaptation climatique, mais seuls 47 % considèrent cela comme une priorité urgente, contre 50 % pour la moyenne européenne.
- 79 % ont vécu un événement climatique extrême, tels que des vagues de chaleur (47 %) ou des tempêtes violentes (42 %).
Les priorités locales reflètent un équilibre entre adaptation environnementale et pragmatisme économique :
- 52 % plaident pour des solutions visant à rafraîchir les villes.
- 50 % mettent l’accent sur l’amélioration des infrastructures, un chiffre au-dessus de la moyenne européenne.
- 37 % insistent sur la plantation de végétaux adaptés pour renforcer la résilience face au changement climatique.
Le Luxembourg se distingue aussi par une volonté de solidarité internationale, avec 57 % des citoyens favorables à un soutien accru aux pays en développement pour leurs efforts d’adaptation.
Financer l’adaptation : une responsabilité partagée
Une question centrale demeure : qui doit assumer les coûts de l’adaptation ?
- 35 % des Européens estiment que les entreprises polluantes devraient être les premières à contribuer financièrement.
- Une proportion significative (57 %) est favorable à ce que leur pays participe davantage à des initiatives internationales pour soutenir les pays vulnérables.
Cependant, les différences culturelles jouent un rôle : au Luxembourg, seulement 4 % des répondants mentionnent les assurances comme acteurs clés, alors que ce chiffre atteint 20 % à Chypre.
L’avenir de l’adaptation : les défis à surmonter
Si l’adaptation au changement climatique est une priorité pour de nombreux Européens, des obstacles persistent :
- Manque d’information : une majorité ignore l’existence de programmes d’aide publique.
- Disparités régionales : les priorités varient fortement selon les pays et les contextes culturels.
- Impact des événements récents : l’enquête montre que les catastrophes locales influencent fortement les perceptions des citoyens.
Les événements extrêmes, comme les inondations en Espagne ou les tempêtes en Europe centrale, renforcent l’urgence d’agir. Ils rappellent que l’adaptation est une nécessité, pas une option.
Un impératif commun, une action diversifiée
L’enquête 2024-2025 de la BEI met en lumière une prise de conscience croissante de l’urgence climatique en Europe et au Luxembourg. L’adaptation n’est pas seulement un impératif environnemental : c’est une opportunité pour créer des emplois, dynamiser les économies locales et réduire les coûts futurs.
Toutefois, les disparités régionales, le manque d’éducation et les défis financiers restent des obstacles à surmonter. Face à ces enjeux, l’Europe doit adopter une approche coordonnée et inclusive pour garantir un avenir durable à tous ses citoyens.
Sébastien Yernaux, sur base de l’étude de la BEI