Le changement climatique et ses effets visibles au Luxembourg
La Journée mondiale de l’eau (22 mars), instituée par l’Organisation des Nations unies au début des années 1990, permet chaque année de thématiser un sujet important lié à la gestion et à la protection de l’eau. En 2020, le sujet était « l’eau et le changement climatique ». Constats.
La Journée mondiale de l’eau, instituée par l’Organisation des Nations unies au début des années 1990, permet chaque année de thématiser un sujet important lié à la gestion et à la protection de l’eau. En 2020, le sujet était, pour cette journée du 22 mars, « l’eau et le changement climatique ».
En effet, la crise climatique mondiale est inextricablement liée à l’eau. Le changement climatique augmente la variabilité du cycle de l’eau, induisant des événements météorologiques extrêmes, réduisant la prévisibilité de la disponibilité de l’eau, affectant la qualité de l’eau et menaçant le développement durable et la biodiversité dans le monde.
Le changement climatique entraîne également une demande croissante en eau, tout en menaçant sa disponibilité, ce qui nécessite des mesures d’atténuation afin de limiter l’impact du changement climatique mais également d’adaptation afin de pouvoir faire face aux effets du changement climatique.
Bien que le Luxembourg soit moins menacé que certains autres pays ou régions dans le monde, le changement climatique aura également des répercussions au Luxembourg. Ces répercussions sont dans une certaine mesure déjà visibles aujourd’hui.
Quelles sont les projections d’évolution future du climat au Luxembourg ?
Les températures moyennes annuelles enregistrées depuis 1947 aux stations météorologiques exploitées par MeteoLux et par l’Administration des services techniques de l’agriculture, révèlent une augmentation sensible des températures depuis les années 1990. Alors que la température moyenne pluriannuelle sur la période de 1961-1990 était de 8,3°C, elle est de 9,3°C sur la période de 1981-2010.
Depuis les années 1990, les températures annuelles moyennes mesurées sont constamment bien au-dessus des températures moyennes à long-terme. Dans le futur, cette évolution risque de continuer et de s’intensifier. Les projections climatiques obtenues à l’aide de différents modèles climatiques régionaux issus du projet « Ensemble » de l’Union européenne et par différents modèles climatiques globaux réalisés par le Luxembourg Institue of Sciences and Technologies (LIST) indiquent que la température moyenne de l’air sera d’environ 11,2°C à la fin du 21e siècle.
En hiver il y aura moins de neige mais plus de pluie
Concernant les précipitations, il n’y a pas d’augmentation ou de baisse qui soient statistiquement significatifs. Alors que les précipitations moyennes sur la période 1961-1990 étaient de 875 mm par an, elles étaient de 897 mm par an pour la période 1981-2010. Bien que les différentes modélisations climatiques indiquent qu’il n’y aura pas d’augmentation ou de diminution significatives des précipitations moyennes annuelles, des variations saisonnières importantes seront de plus en plus marquées avec une augmentation des précipitations hivernales et une baisse des précipitations estivales.
À cela s’ajoute qu’en hiver il y aura moins de neige mais plus de pluie, ce qui aura notamment des répercussions sur la recharge des eaux souterraines, et qu’en été il y aura plus de jours sans pluie, ce qui aura des répercussions sur le régime hydrique des cours d’eau et leur qualité, mais également une augmentation des épisodes pluviaux extrêmes. Les effets de ces changements perçus au Luxembourg sont décrits ci-après.
Les effets du changement climatique au Luxembourg : 5 exemples concrets
Dans l’imaginaire de certaines personnes, le réchauffement climatique ne concerne que les pays lointains, les îles ou les pays en voie de développement. Or, le Luxembourg, en tant que pays situé au cœur de l’Europe et dépourvu de littoral, connaît actuellement déjà des conséquences liées au changement climatique.
Ci-dessous, une liste d’exemples qui montrent comment le changement climatique impacte, voire impactera, le Luxembourg en matière de gestion des ressources en eau :
Augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes en été
Le Luxembourg a récemment été touché par de fortes pluies diluviennes, causant d’innombrables dégâts dans plusieurs parties du pays (entre autres : mai/juin 2016 à Bettembourg et Mondorf-les-Bains, juillet 2016 dans la vallée de l’Ernz, mai/juin 2018 dans le Müllerthal et dans la vallée de l’Attert), ainsi que par une tornade d’une extrême violence dans le sud du pays en août 2019. Outre les dégâts matériels et infrastructurels, ces évènements mettent en péril la sécurité physique des personnes et provoquent d’importants traumatismes auprès des personnes concernées. Enfin, ces phénomènes ont également un impact sur le milieu naturel, car ils peuvent être à l’origine de fortes érosions et transporter des polluants dans les cours d’eau ou dégrader les installations d’eau potable.
Baisse des précipitations en été avec risque de sécheresse et d’assèchement des cours d’eau
Le changement des précipitations saisonnières avec une diminution d’épisodes pluviaux en été, engendre un niveau d’eau plus bas par rapport aux conditions naturelles dans les cours d’eau. En situation d’étiage, les cours d’eau subissent de nombreuses pressions et sont davantage sensibles aux pollutions causées par des facteurs externes. La température de l’eau augmente plus rapidement, ce qui met en danger la survie des poissons et autres organismes aquatiques. Des niveaux d’eau bas limitent, voire inhibent, la continuité écologique de sorte à ce que par exemple les poissons ne peuvent plus se déplacer. À cela s’ajoute la dégradation de la qualité de l’eau qui va de pair avec l’augmentation de la température de l’eau. Enfin, les situations d’étiage peuvent avoir des répercussions sur le transport fluvial, comme cela a été le cas en été 2019 où la circulation sur le Rhin et la Moselle a été fortement impactée.
Augmentation de la consommation d’eau potable en été avec la canicule
Que ce soit pour boire, pour irriguer les cultures, pour l’industrie (p.ex. alimentaire), pour le refroidissement (p.ex. Datacenter, climatisations) ou pour les loisirs (p.ex. remplissage de piscines), la demande en eau atteint des records lors de canicules. Pendant les périodes de consommation extrême, la capacité de production des fournisseurs d’eau potable est mise à rude épreuve. Si la période de surconsommation perdure pendant une période prolongée, il y a un risque que les réserves d’eau potable ne puissent plus être suffisantes dans certaines communes. Ces dernières années, des restrictions de consommation d’eau ont notamment dû être décrétées par certaines municipalités.
Augmentation des températures et baisse de la recharge des eaux souterraines
L’eau potable au Luxembourg provient environ à moitié du Lac de la Haute-Sûre et à moitié des ressources d’eau souterraines. À cause des hivers de plus en plus chauds et avec moins de neige, la recharge des nappes phréatiques est moins efficace. En effet, la recharge des eaux souterraines a lieu en hiver lorsque la végétation arrête sa croissance et que les précipitations (de pluie et de neige) peuvent s’infiltrer dans le sol. Pour une réalimentation efficace des nappes phréatiques, une saturation des sols en eau est nécessaire, ce qui a particulièrement lieu lorsqu’il pleut pendant une période prolongée ou lors de la fonte des neiges.
Tous ces phénomènes risquent de devenir de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses au Luxembourg
Comme les hivers deviennent plus chauds, il y a d’une part moins de neige bénéfique pour la recharge des aquifères et d’autre part la végétation reprend de plus en plus tôt, ce qui raccourcit la période de réalimentation des eaux souterraines et peut faire baisser le niveau des nappes.
Augmentation des précipitations hivernales et du risque d’inondation
Avec l’augmentation des précipitations en hiver, le risque d’inondation augmente également. Les inondations mettent en péril la sécurité physique des personnes et provoquent d’importants dégâts matériels.
Tous ces phénomènes risquent de devenir de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses au Luxembourg dû au changement climatique.
Les actions du gouvernement pour faire face à ces effets du changement climatique
Ces dernières années, le gouvernement a adopté une multitude de plans et de stratégies pour faire face aux différents effets du changement climatique.
En ce qui concerne la gestion de l’eau, le Plan de gestion des districts hydrographiques et le programme de mesures, qui en fait partie intégrante, constituent les outils principaux de la mise en œuvre de la directive-cadre sur l’eau. Le plan de gestion définit la stratégie de développement durable dans le domaine de la gestion et de la protection des eaux. Il définit des mesures et actions concrètes visant à minimiser les pressions s’exerçant sur les différentes masses d’eau.
À cela s’ajoute, le Plan de gestion des risques d’inondation, qui a pour but la réduction des conséquences négatives potentielles d’une inondation pour les hommes, l’environnement, le patrimoine culturel et l’activité économique, en mettant l’accent sur la prévention, la protection et la préparation aux crues. En mettant en place des mesures préventives de protection, comme par exemple des renaturations de cours d’eau, le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable crée des espaces où l’eau peut s’étendre librement (p.ex. sur les terrains en zone verte) et réduit le risque d’inondation dans les zones urbanisées. En plus de réduire l’exposition des personnes face aux inondations, des mesures sont mises en place pour réduire le potentiel de dégâts et ainsi augmenter la protection des personnes et des habitations qui sont situés en zones inondables. L’Administration de la gestion de l’eau a également publié un Guide pour les projets de construction à l’intérieur des zones inondables, afin de minimiser les risques pour les personnes et les habitations. En outre, des séries de données pluviométriques et une carte de crues subites sont actuellement en cours d’achèvement afin de pouvoir mieux évaluer l’exposition au risque de fortes pluies.
Dans le but de mieux soutenir tous les acteurs dans la mise en place de ces mesures, le gouvernement a modifié la loi relative à l’eau en 2017. Les modifications de la loi ont permis de rediriger les subventionnements par le Fonds pour la gestion de l’eau en augmentant les taux du subventionnement étatique des mesures anti-crues et des mesures de renaturation. Le taux de subventionnement étatique des mesures anti-crues a ainsi été augmenté à 90 % les coûts des travaux de restauration et de renaturation des cours d’eau peuvent être pris en charge à hauteur de 100%. L’augmentation de ces taux permettra une meilleure protection des cours d’eau et une meilleure sécurité face aux inondations.
Afin de lutter contre le changement climatique, le Luxembourg a ratifié l’accord de Paris sur le climat, qui est entré en vigueur en 2016. Dans ce cadre, l’Union européenne a adopté des conclusions sur les aspects liés au financement de la lutte contre le changement climatique ou encore la stratégie à long terme de développement à faible émission de gaz à effet de serre. Afin de définir ses objectifs climatiques nationaux, le gouvernement a adopté le projet de Plan national intégré en matière d’énergie et de climat, qui illustre les politiques et mesures permettant d’atteindre les objectifs nationaux ambitieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (-55%), d’énergies renouvelables (25%) et d’efficacité énergétique (de 40 à 44%) à l’horizon 2030.
Il devient moins onéreux de prendre des mesures d’adaptation programmées suffisamment à l’avance que de payer le prix de l’inadaptation.
Enfin, bien que tous les efforts soient déployés pour limiter le réchauffement climatique, certains effets sont déjà perceptibles aujourd’hui et seront plus intenses dans le futur. Pour cette raison, le gouvernement a adopté une Stratégie et un plan d’action pour l’adaptation aux effets du changement climatique. Ce plan d’action prévoit des mesures qui ont comme objectif de réduire la vulnérabilité de la société, de la nature et des personnes contre les effets attendus du changement climatique. La stratégie d’adaptation énumère des mesures dites « no regret », qui quel que soit le degré de réchauffement, seront bénéfiques pour le Luxembourg. De plus, il devient moins onéreux de prendre des mesures d’adaptation programmées suffisamment à l’avance que de payer le prix de l’inadaptation.
Communiqué par : ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable / Administration de la gestion de l’eau