PAC : compromis « acceptable et équilibré » pour le Luxembourg
La réforme de la politique agricole commune fait l’objet d’un accord négocié. Le ministre luxembourgeois Romain Schneider estime qu’on est face à « un compromis acceptable et équilibré » parce qu’il prend en compte les trois dimensions, sociale, économique et environnementale, du développement durable. Les aides européennes seront aussi plus ciblées.
On sait le poids de la Politique agricole commune, la fameuse PAC européenne, sur les métiers – la survie parfois – de la terre nourricière. En particulier, on sait que les modes d’agriculture modestes et raisonnables, comparés à la puissance intensive des agro-industriels, se sentent franchement menacés par des grandes décisions, qui ont tendance à niveler les spécificités régionales et les marchés locaux, parfois sous la pression de lobbies tenaces.
Alors l’avis du ministre luxembourgeois de l’agriculture, de la viticulture et du développement rural est intéressant, parce que le pays promeut des grands changements, allant dans le sens du produit naturel de qualité, sans artifices phytopharmaceutiques, alors qu’une partie de la profession agricole est preneuse du développement durable pour autant qu’il soit accompagné et compatible avec la logique des marchés pour un petit pays comme le Grand-Duché.
Un jalon politique non négligeable
Romain Schneider a donc postfacé le Conseil européen « Agriculture et pêche » des 28 et 29 juin, tenu à Luxembourg sous présidence portugaise. On y a posé un jalon politique non négligeable : les ministres ont endossé l’accord négocié avec le Parlement européen sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), qui couvrira la période 2023-2027.
Pour le ministre luxembourgeois, on fait face à un « compromis négocié acceptable et équilibré. Selon lui, l’important se marque d’abord dans le fait que cet « accord historique » couvre les trois dimensions du développement durable, sociale, économique et environnementale.
« On ouvre la voie à une PAC plus durable, qui offrira un avenir équitable aux agriculteurs européens tout en fournissant aux citoyens de l’UE une alimentation sûre à un prix abordable. La nouvelle PAC renforce les mesures environnementales, introduit une conditionnalité sociale, accorde un soutien accru aux petites exploitations et aide les jeunes agriculteurs à accéder à la profession, le but étant de maintenir le revenu des agriculteurs et de protéger les chaînes agro-alimentaires européennes », analyse Romain Schneider.
Des aides plus ciblées, des conditions environnementales renforcées
Le Luxembourg observe quelques aspects prometteurs dans le paquet de réforme de la PAC. Notamment des aides plus ciblées et « soumises à une planification stratégique cohérente », les plans nationaux étant adossés à une évaluation continue.
Dans le même esprit, émerge une nouvelle « architecture écologique » de la politique européenne, fondée sur des conditions environnementales renforcées pour les paiements directs, des éco-régimes et des mesures agro-environnementales. Ainsi, les agriculteurs doivent, pour bénéficier des paiements directs, respecter notamment la préservation des sols riches en carbone, la protection des zones humides et des tourbières, la rotation des cultures et des quotas de terres arables à consacrer à la protection de la biodiversité.
Il est par ailleurs précisé que 35% au moins des fonds destinés au développement rural devront servir à soutenir des interventions dans le domaine de l’environnement et du bien-être animal. Le Luxembourg a d’ores et déjà annoncé son ambition de réserver au moins 40% des dépenses publiques de son futur plan stratégique pour des mesures vertes.
100 millions par an
En saluant les qualités de l’accord politique, en ligne avec le Pacte vert européen, le ministre Schneider n’occulte pas le fait que, lors du processus de négociation, l’élément central à ses yeux, la subsidiarité, a perdu de son importance et de son poids. Pour que la solidarité soit claire, il faut aussi, dit Romain Schneider, que « les textes de la PAC restent simples et compréhensibles ».
Dans un budget annuel de la PAC se montant à 55 milliards d’euros (environ un tiers du budget de l’UE), l’enveloppe allouée au Luxembourg est de 47 millions d’euros par an. Le plan stratégique luxembourgeois sera porté à quelque 100 millions d’euros par année, grâce au cofinancement national, confirme le ministre Schneider.
La nouvelle PAC entrera en vigueur le premier janvier 2023.
Alain Ducat
Photo SIP/ Jean-Christophe Verhaegen : Le ministre Schneider (ici avec le Grand Duc lors d’une récente visite de l’exploitation maraîchère Bio-Gäertnerei op der Schanz) observe la PAC européenne à la lueur du terrain luxembourgeois, spécifique et encouragé au bio.