Quand formation rime avec collaboration, adaptation, co-conception et certification
La Chambre des Métiers développe l’offre et les partenariats pour faire coller compétences et besoins remontant du terrain. Rencontre avec Hélène Mayer, directrice Formation.
Madame Mayer, vous êtes directrice Formation et membre du comité de direction de la Chambre des Métiers depuis janvier 2022. Quels sont les grands enjeux de la formation continue aujourd’hui, notamment dans la perspective des grandes transitions économiques, énergétiques et sociétales ?
« Nous avons une mission : imaginer et soutenir l’Artisanat dans l’univers de demain. Et cela va au-delà du slogan. La Chambre des Métiers représente un pilier central de l’économie et de la société luxembourgeoise. Depuis quelques années, et le mouvement s’accélère, nous essayons de développer l’offre de formation et de l’adapter aux grandes transformations sociétales, aux réglementations, aux innovations des métiers, à l’accompagnement de création ou de reprise d’entreprise. L’idée est aussi de proposer des formations ouvertes à tout le monde et qui, dans l’approche très ‘terrain’ que nous privilégions, sont liées aux besoins identifiés, en particulier dans l’important tissu des PME et des TPE qui caractérisent le Luxembourg.
Le service Formation continue propose des cours d’intérêt général, des cours de technologie métiers et des formations sur mesure pour aider à réaliser les objectifs personnels et professionnels de chacun.
Le panel est large : ressources humaines et développement personnel, marchés publics, sécurité-santé, management de la qualité, technologie métier, performance énergétique, environnement, digitalisation, gestion d’entreprise, droit, création, reprise et transmission d’entreprise… »
Pour y arriver, il faut collaborer ?
« C’est évident et cela correspond à la réalité de l’écosystème. Les collaborations sont importantes. Avec l’ADEM par exemple qui axe une partie de sa stratégie sur la formation des demandeurs d’emploi en fonction des besoins et de la demande de profils adaptés. On peut aussi citer la collaboration au niveau de l’offre de cours du secteur de la construction, entre la Chambre des Métiers, les Centres de Compétences Génie Technique du Bâtiment et Parachèvement, l’Institut de Formation Sectoriel du Bâtiment (IFSB). Globalement, il y a réflexion commune et concertation, avec le CNFPC, l’INFPC, l’OAI, le CRTI-B, la Chambre de Commerce… Collaboration aussi, dans le cadre de certifications et labels, comme le « Nohalteg an d’Zukunft » + avec l’Energieagence, le Passivhausinstitut Darmstadt et la Klima-Agence, ou encore des partenariats en amont avec des écoles, le Lycée Josy Barthel Mamer ou l’Atert-Lycée Redange par exemple ».
Certains secteurs sont-ils plus sensibles que d’autres aux besoins de formation et de nouvelles compétences ? Et comment sont identifiés ces besoins ?
« Il y a eu cette enquête sur les besoins en compétences, sortie en juin 2022. Elle montre notamment des besoins dans les domaines techniques, la demande en formations qui touchent les obligations légales, les grandes transitions, notamment digitales et environnementales… L’étude sur les besoins importants de main-d’œuvre est éclairante également.
Le gros enjeu est de faire preuve de pragmatisme et de faire coller tout ça, dans l’intérêt général, de l’emploi, des qualifications dont ont besoin nos artisans. Nous nous devons de répondre à des besoins spécifiques, notamment dans le secteur du bâtiment, avec des enjeux comme l’économie circulaire, la déconstruction, le recyclage et la valorisation des matériaux, les pompes à chaleur…
Les besoins en formation continue se trouvent majoritairement dans le domaine technique et donc en relation avec le métier, ceci dans une optique de re- et upskilling. Il y a une prise de conscience accrue de l’importance des aspects sécurité et santé au travail, du travailleur désigné. On note aussi que sont cités d’autres grands domaines qui requièrent davantage de formation continue, les langues, l’informatique, l’aspect qualité et gestion des risques ou encore les soft skills.
Des exemples de nouvelles offres ou de success story pour des formations ?
« Nous concevons et organisons des formations pour travailleurs désignés dans les secteurs de nos artisans/membres, ce qui correspond à une demande remontée du terrain pour des compétences spécifiques liées aux risques de ces métiers. Nous pouvons également citer des formations ‘smart home’ et ‘smart energy’, formations en gestion durable dont une sur ‘l’écologie dans mon assiette’, des formations en médiation, une nouvelle formation pour tuteurs, sur la digitalisation des processus, le droit de la construction, un cycle de formation ‘Investir sereinement’, des workshops sur la fidélisation et la motivation des collaborateurs – qui provient directement des besoins d’acquisition et de rétention des talents et compétences.
Et les succès sont encourageants, à l’image de la formation BIM, en partenariat avec la House of Training et le CRTI-B. Ou encore la nouvelle approche des Brevets de Maîtrise, où nous réfléchissons en termes de domaine de compétence quand c’est possible pour les projets de réforme où nous regroupons certains métiers, par exemple l’’Artisan en Alimentation’ qui regroupe les métiers de boulanger-pâtissier, boucher et traiteur ou l’’Artisan en Génie Technique du bâtiment’ (installateur chauffage-sanitaire, électricien et électronicien en communication et informatique). Cela correspond à la réalité du terrain.
Les certifications participent à l’importance de l’Artisanat dans la transition ?
« Absolument, les certifications ajoutent à la formation adaptée la visibilité de labels et d’un réseau d’expertise. Nous proposons, par exemple une formation et une certification relatives à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables avec l’’Installateur de pompes à chaleur’ ou la ‘Planification du chauffage par pompe à chaleur dans le secteur résidentiel’.
Nous proposons aussi, en collaboration avec l‘’Energieagence’, un programme de formation continue autour de la construction de bâtiments durables et à haute performance énergétique. Ce sont deux formations certifiées avec le nouveau label ‘Nohalteg an d’Zukunft +’ : Artisan en rénovation, avec la Klima Agence qui permet d’acquérir des connaissances techniques sur l’optimisation de l’efficacité énergétique des bâtiments existants tout en favorisant la durabilité de ces derniers. Les personnes qui réussissent l’examen final reçoivent non seulement le label ‘Nohalteg an d’Zukunft +’, mais aussi la distinction ‘Klima-Agence certified artisan’. Idem avec la formation Artisan certifié maison passive, en collaboration avec le Passivhaus Institut. Elle est axée sur les techniques appliquées, une orientation pratique pour la construction et la rénovation de bâtiments à haute performance énergétique, avec une attention particulière apportée à la bonne coordination et coopération entre les différents corps de métiers. La réussite de l’examen donne, outre le label ‘Nohalteg an d’Zukunft +’, un certificat de l’Institut allemand, pour une durée de 5 ans ».
Propos recueillis par Alain Ducat
Photos/Illustrations : Chambre des Métiers
Extrait du dossier du mois Former pour agir
Quelques chiffres (2022)
L’apprentissage
- 976 offres de postes d’apprentissage – 1.711 contrats d’apprentissage dans l’Artisanat
- 698 nouveaux contrats d’apprentissage
- 760 nouvelles entreprises formatrices
Brevets de maîtrise
- 205 nouveaux candidats
- 552 candidats en tout
Formation continue – Chiffres-clés 2022
- 159 cours dont 81 formations « Construction »
- 1.543 participants (surtout des chefs d’entreprise et responsables)