Restauration de la nature : l’Europe fait volte-face
Elle avait été validée en session plénière au Parlement européen, mais elle n’a pas franchi l’étape ultime du Conseil de l’UE : la loi sur la restauration de la nature n’a finalement pas été votée.
Dans le cadre de son Green Deal, l’Union européenne prévoit tout un volet destiné à la restauration des habitats naturels. Fin février, le Parlement européen donnait son feu vert au texte et il ne restait donc que l’approbation – a priori une technicalité – du Conseil de l’Union européenne.
Mais « surprise » lundi 25 mars, la majorité qualifiante n’a pas été atteinte. Celle-ci prévoit l’approbation d’au moins 55% des États membres (15 États sur 27), représentant 65% de la population européenne. Le revirement de situation viendrait du changement d’avis de dernière minute de la Hongrie, suffisant pour faire basculer l’issue du vote.
À la suite de l’adoption du projet de règlement au Parlement européen, l’adoption du dossier au Conseil n’est en principe qu’une formalité. Cependant, faute de majorité qualifiée, la présidence belge s’est vue obligée de reporter l’adoption dudit règlement.
Ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, suite à la participation du ministre Serge Wilmes au Conseil de l’UE
Le Luxembourg – comme d’autres pays – a relaté sa déception suite à ce revirement de situation :
Le Luxembourg s’est toujours exprimé en faveur du règlement sur la restauration de la nature, dont les grandes lignes se retrouvent d’ores et déjà dans le Plan national concernant la protection de la nature (PNPN3) du Luxembourg. Lors de son intervention, Serge Wilmes a regretté que le dossier soit bloqué sur la dernière ligne droite, et a rassuré la présidence du soutien du Grand-Duché pour parvenir endéans les meilleurs délais à l’adoption de ce règlement dont nous n’avons pas seulement besoin d’un point de vue environnemental, mais aussi d’un point de vue économique.
Ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, suite à la participation du ministre Serge Wilmes au Conseil de l’UE
Faune et flore en déclin
L’environnement naturel subit les conséquences de l’activité humaine et est plus particulièrement touché par la pollution, le changement climatique, la perte d’habitat et la prolifération d’espèces envahissantes.
L’Europe recense, notamment :
- 80 % des habitats en mauvais état
- 10 % des espèces d’abeilles et de papillons en risque d’extinction
- 70 % des sols en mauvaise santé
Globalement, l’IPBES estime qu’un million d’espèces de plantes et d’animaux sont menacées d’extinction, sur un total de huit millions.
Même si vous n’êtes pas adeptes des balades en forêt, pensez que la nature constitue une source primordiale pour notre alimentation, nos soins de santé, notre habillement et pour rendre respirable l’air qui nous entoure.
Par exemple…
Alimentation
Selon IMS (Inspiring More Sustainability), « sur le plan alimentaire, 80% des types de cultures dans le monde dépendent de la pollinisation ».
Or, l’Europe estime à 50% environ les « zones dans lesquelles se trouvent des cultures dépendantes des pollinisateurs dans l’UE, comme les arbres fruitiers, qui n’offrent pas de conditions favorables aux pollinisateurs, telles que des sites de nidification ».
Santé
70% des médicaments utilisés pour soigner le cancer (IMS) sont composés de produits naturels.
Air
60% des émissions anthropiques mondiales sont séquestrées dans les écosystèmes marins et terrestres.
En d’autres mots, les milieux naturels, sur terre et dans les mers, agissent en puits de carbone, en retenant les émissions de CO2 provenant de l’activité humaine.
Sources : IMS, Conseil de l’UE
Ce que le texte sur la restauration de la nature prévoit
Si la loi finit par être validée, les pays de l’UE devront restaurer au moins 30% des habitats en mauvais état d’ici 2030, 60% d’ici 2040 et 90% d’ici 2050. Ces objectifs, contraignants pour les États, sont nécessaires pour faire face à la crise climatique que nous traversons.
Quelques détails
- Conformément à la position du Parlement, les pays de l’UE devraient donner la priorité aux zones Natura 2000 jusqu’en 2030.
- Les pays de l’UE devront progresser dans deux des trois indicateurs suivants :
- l’indice des papillons de prairies ;
- la part des terres agricoles présentant des particularités topographiques à haute diversité ;
- le stock de carbone organique dans le sol minéral des terres cultivées.
- Les pays devront également prendre des mesures visant à augmenter l’indice des oiseaux communs des milieux agricoles, car les oiseaux sont de bons indicateurs de l’état général de la biodiversité.
- Les États membres devront en outre restaurer au moins 25.000 km de cours d’eau à courant libre et veiller à éviter toute perte nette de la superficie nationale totale des espaces verts urbains et du couvert arboré urbain
Source : Parlement européen
Le Luxembourg a pour sa part établi son propre plan concernant la Protection de la nature, dont une 3e version a été validée début 2023. À découvrir ici
Marie-Astrid Heyde
Photo : Licence CC
Article tiré du dossier du mois « Nature humaine »