Transports nucléaires : Convois exceptionnel… lement dangereux
Habiter au Luxembourg veut aussi dire être encerclé par des centrales nucléaires périmées comme Cattenom, Chooz, Fessenheim (F) ou encore Tihange, Doel (B). Une grande série d’autres ouvrages moins connus comme par exemple des installations nucléaires dites du « cycle combustible » (transformation de l’uranium, enrichissement, fabrication, retraitement du combustible, laboratoires) posent d’autres risques. Défendu au Luxembourg, mais légal à l’étranger, nos pays voisins sont quadrillés par une multitude de transports de matières radioactives : plutonium, combustible nucléaire neuf, combustible usé…Chaque année, plus de 770.000 convois de matières radioactives sillonnent l’Europe par trains et camions.
La plupart de ces convois nucléaires empruntent la route, mais certains d’entre eux se font aussi par voie maritime, aérienne, ou ferroviaire.
En France, ces convois exceptionnels transportent des combustibles irradiés des centrales nucléaires françaises, du plutonium, de l’uranium, du combustible neuf à base d’uranium et du combustible MOX (mélange d’uranium et de plutonium). En France, le pays le plus nucléarisé du monde, ils traversent des zones très densément peuplées (la région parisienne, Lyon, Bordeaux, Nantes, Rennes, Tours, Dijon, etc).
Si la plupart de ces transports se font par la route, d’autres se font également par mer, par air et par voie ferrée. Ainsi, chaque jour en France, deux à trois trains chargés de déchets radioactifs ou de combustibles nucléaires circulent.
Au pays de l’atome, les industriels du nucléaire se veulent rassurants. Ils insistent sur l’impossibilité de fabriquer une bombe avec un combustible comme le MOX (thèse totalement contredite par l’Agence internationale de l’énergie atomique) et ne cessent de vanter la grande robustesse des emballages, alors que ces convois transitent régulièrement sur des parcours qui soumettent ces emballages à des épreuves supérieures à leur résistance (par exemple des ponts de plus de 30 mètres de hauteur pour des emballages résistants à une chute de neuf mètres).
Les convois de matière hautement radioactive posent un sérieux risque pour les populations et les écosystèmes environnants. Ils sont autant de bombes roulantes, présentes sur pratiquement toutes les grandes routes de France. En particulier, toutes les semaines, deux semi-remorques banalisés contenant chacun 150 kilogrammes de plutonium (pour information la bombe de Nagasaki en contenait huit) traversent la France sur plus de mille kilomètres de La Hague à Marcoule.
Si un accident arrive, plusieurs kilomètres carrés se retrouveraient contaminés. Sans parler des risques d’attaques extérieures qui pèsent sur ces convois. En effet, la présence d’une escorte n’empêche pas que d’éventuels actes malveillants soient commis.
À l’occasion d’un transport de combustible nucléaire MOX vers le Japon, des militants de Greenpeace projettent une cible sur un camion contenant du plutonium. Cette action montre la fragilité extrême de ces transports.
Pour ces raisons, et parce qu’aucune vraie solution satisfaisante n’existe en matière de gestion des déchets nucléaires, les transports de combustible usé ou de déchets nucléaires sont parfois accueillis par d’importantes manifestations. C’est le cas des transports qui ont lieu pour acheminer les déchets nucléaires de France en Allemagne, à Gorleben.
En Allemagne, des militants de Greenpeace manifestent avec une réplique de conteneur de matières fissiles. Ces quarante dernières années, les habitants de la région ont lutté contre le transport de déchets nucléaires vers un site d’entreposage très controversé.
La folie nucléaire française concerne également ses voisins européens, comme la Belgique ou la Suisse. Un exemple parmi tant d’autres : en août 2017, un transport ferroviaire de 16 conteneurs de déchets nucléaires issus du traitement de combustibles de l’usine Areva de La Hague partait pour la Belgique, afin que ces déchets soient stockés à Dessel, dans le nord du pays, à moins de 60 kilomètres d’Anvers.
Des tonnes et des tonnes de plutonium résultant du retraitement du combustible nucléaire utilisé par la France et le Royaume-Uni sont aussi régulièrement acheminées au Japon. En juillet 2017, un énième chargement de MOX contenant du plutonium quittait Cherbourg par la mer pour le Japon. Ces chargements traversent au passage les eaux territoriales de nombreux pays… ainsi que de précieux écosystèmes marins.
Des déchets nucléaires de retour en Australie et en route pour un stockage sur le site de Lucas Heights après avoir été envoyés en France et retraité par l’entreprise Areva. Ce transport contient de grandes quantités de plutonium.
En matière de déchets nucléaires, on peut également parler de l’uranium appauvri d’Europe qui a été transporté régulièrement en Russie. Dans les montagnes russes de l’Oural, des milliers de tonneaux radioactifs sont entreposés dans de grandes décharges à ciel ouvert. Grâce à une intense campagne fin 2009 et début 2010, Greenpeace a fait cesser ce trafic et les contrats d’EDF et d’AREVA ont été rompus avec la Russie.
Certains de ces convois transportent une quantité de matière fissile très importante. De quoi nous rappeler que les beaux discours des industriels du nucléaire font malheureusement l’impasse sur le risque de prolifération. Oui, le plutonium issu de réacteurs dits civils peut être détourné et utilisé à des fins militaires. D’où, sans doute, le déploiement de dispositifs policiers mobilisant des dizaines de personnes pour escorter ces convois.
L’industrie nucléaire ne nous a jamais habitués à la transparence. En France, même les pompiers et les élus locaux ne sont pas informés des transports de combustible nucléaire, presque comme si ces derniers n’étaient pas jugés suffisamment responsables. D’autres pays comme l’Allemagne informent la Protection civile ainsi que les sapeurs-pompiers techniques, ces transports sont fréquemment cible de démonstrations et protestations de différentes associations anti-nucléaires.
Tous ces transports extrêmement dangereux constituent bien entendu une raison supplémentaire de sortir au plus vite possible du nucléaire. En attendant, ils doivent être limités au maximum et sécurisés. Comme solution du moindre mal, Greenpeace estime qu’il faut mieux entreposer les combustibles usés sur les sites de production d’électricité, et qu’il faut mettre un terme à la filière du plutonium/MOX car elle augmente considérablement le nombre de combustibles usés, en particulier celui des plus dangereux. Par ailleurs, ce trafic doit être pratiqué dans la transparence la plus absolue, et citoyens et élus doivent en être informés.
Les transports de combustible nucléaire sont un autre symbole de l’arrogance des industriels de l’atome : peu importe les lois, les risques, les réalités économiques, l’avis de la population.
Crédit photos : Greenpeace
Communiqué par Greenpeace Luxembourg