Trackers photovoltaïques du LNS à Dudelange

Changement climatique et érosion de la biodiversité : une réponse globale ?

30 millions d’euros par an, c’est la valeur estimée des services écosystémiques fournis par les forêts au Luxembourg, c’est-à-dire tout ce qu’elles nous offrent, en plus du bois : oxygène, épuration de l’air, filtration de l’eau, lutte contre l’érosion, loisirs…

Carte blanche de Sophie Leguil, consultante indépendante en écologie
Carte blanche de Sophie Leguil, consultante indépendante en écologie

Ces services, à la base de notre vie sur Terre, sont menacés par l’érosion de la biodiversité. Dans un récent rapport, on apprend ainsi que l’état de santé des forêts luxembourgeoises ne cesse de se dégrader, avec moins de 15 % des arbres encore intacts. En cause ? Les longues périodes de sécheresse, les températures élevées et la prolifération d’insectes ravageurs, trois effets intimement liés aux modifications du climat. Selon le dernier rapport de l’IPBES (l’équivalent du GIEC pour les questions de biodiversité), le changement climatique est même la 3e cause d’érosion de la biodiversité dans le monde, après la perte d’habitats et la surexploitation des ressources.

Les impacts du changement climatique sur la faune et la flore sont multiples. En premier lieu, on observe une évolution dans la composition des espèces : en 17 ans, 10 % des espèces de plantes indigènes du Luxembourg ont par exemple été remplacées par des espèces non indigènes. Si cette évolution peut sembler naturelle, c’est sa vitesse qui inquiète, avec le risque de perte d’espèces associées, mais aussi celui de l’arrivée d’espèces exotiques invasives. Berce du Caucase, moustique-tigre ou tique géante : en tout, une centaine d’espèces installées dans le pays, avec de nombreuses conséquences sur la santé, les activités économiques ou l’agriculture. Pour les espèces indigènes, en revanche, le risque de maladaptation est bien réel : le hêtre, arbre robuste et emblématique des forêts luxembourgeoises, souffre ainsi des sécheresses à répétition, tandis que la baisse des niveaux des cours d’eau a des conséquences sur les populations de poissons.

Car si ces phénomènes météorologiques inhabituels ont toujours existé, c’est leur multiplication sur le long terme qui inquiète les scientifiques. Parmi les conséquences de ce changement, on constate une perte de la synchronisation entre différents événements périodiques tels que la floraison des plantes, l’éclosion des insectes et la migration des oiseaux. Cela impacte évidemment le fonctionnement des écosystèmes naturels, déjà soumis à d’autres pressions, mais aussi l’agriculture, avec des risques tels que la baisse de rendement liée à la sécheresse ou à une faible pollinisation, ou encore l’augmentation des ravageurs. Le changement climatique a également des conséquences non négligeables sur la qualité des produits, tels que le vin au Luxembourg : avec une floraison en moyenne deux semaines plus précoce que dans les années 1970 et une maturation des raisins plus rapide, des impacts sont à prévoir sur les arômes. Enfin, les impacts du changement climatique sur la biodiversité se manifestent aussi en matière de santé humaine, avec par exemple des allergies au pollen pendant des périodes prolongées.


On le voit, les crises du changement climatique et de la biodiversité sont indissociables. Pourtant, l’érosion de celle-ci, qui menace les services naturels dont nous bénéficions, notre alimentation, notre santé et nos activités économiques reçoit trois fois moins de couverture médiatique que le climat, et ce décalage s’observe aussi dans les décisions politiques.

Si de nombreuses actions pour le climat ont aussi des effets positifs pour la biodiversité, comme la décarbonation des transports ou de l’industrie, qui s’accompagnent d’une réduction des pollutions, d’autres solutions telles que certaines formes d’énergies renouvelables peuvent cependant avoir des impacts sur la faune et la flore, qu’il est donc important de bien évaluer.

Les crises du climat et de la biodiversité ont des causes communes, liées à nos modes de vie, de production et de consommation. Seule une réflexion globale permettra de répondre à ces deux menaces de manière optimale.

Carte blanche de Sophie Leguil, consultante indépendante en écologie
Photo principale : un projet intéressant, celui des trackers photovoltaïques du Laboratoire National de Santé (LNS) à Dudelange

Article tiré du dossier du mois « INCO₂MPATIBLES »

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Publié le lundi 23 octobre 2023
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