
Comment choisir ses cosmétiques ?
Même s’ils peuvent indiquer une attention particulière pour des ingrédients d’origine biologique ou naturelle, les labels collés sur de nombreux produits cosmétiques (savon, shampoing, maquillage, etc.) sont rarement garants d’une vraie qualité. Anne-Gaëlle Halter, fondatrice de Halternatives, démêle le vrai du faux
Dans l’univers cosmétique, quels rôles jouent les labels, certifications et normes ?
Anne-Gaëlle Halter : Ils sont utiles pour les clients, car cela leur donne des repères. Mais malheureusement ils ont tous leurs limites ; aucun d’entre eux n’est parfait et ne prend tout en compte.
Les consommateurs non avertis sont amenés à faire des amalgames, et les marques en profitent pour jouer là-dessus, c’est alors clairement du greenwashing. Elles utilisent des arguments écologiques trompeurs, et elles viennent teinter de vert ce qui ne l’est pas du tout. Cela va loin, dans le sens où elles vont indiquer sur les emballages des éléments faux ou qui ne reposent sur aucune base solide.
Tout cela remonte jusqu’aux normes. Celles-ci sont décidées à un haut niveau, comme la norme ISO16128 par exemple, qui est née de la volonté d’harmoniser la définition des cosmétiques bio et naturels au niveau international, avec l’objectif de proposer une réglementation commune. Elle décrit notamment les méthodes de calcul des indices, précise les définitions pour les termes comme « naturel », « d’origine naturelle », « biologique » et « d’origine biologique » des ingrédients. En revanche, la norme ne se préoccupe pas de la communication sur les produits, donc de l’étiquetage, ni de la sécurité pour l’homme ou pour l’environnement, ou encore des aspects socio-économiques comme le commerce équitable. C’est plutôt là que vont intervenir les labels et les certifications.
De plus, pour rédiger cette norme, 28 pays se sont mis autour d’une table, au sein d’un groupe où ne se trouvaient quasiment que des gros groupes cosmétiques conventionnels. Deux labels tout à fait pertinents – Cosmébio et Ecocert - ont d’ailleurs souhaité participer, mais sont rapidement partis en voyant que les critères retenus étaient en contradiction avec leurs valeurs.
Donc, sur le papier, la norme est une bonne idée, mais en réalité les parties prenantes y ont mis ce qui les arrange. Selon moi, quatre points posent problème :
- La norme ne liste pas les ingrédients dangereux interdits ni la présence de composants toxiques comme les parabènes, le phénoxyéthanol et le méthylisothiazolinone. Ce dernier est le remplaçant du parabène, mais il est en fait pire. Les ingrédients pétrochimiques et les dérivés d’animaux morts n’y figurent pas non plus.
- La définition de « naturel » y est approximative. Un ingrédient peut être considéré comme dérivé naturel dès qu’il contient au moins 50% de matière naturelle. Ainsi, sur une étiquette où on lit « 100% d’origine naturelle », il ne faut finalement que 50% d’ingrédients naturels.
- Troisième point qui pose problème : il n’y a aucun pourcentage minimum d’ingrédients issus de l’agriculture biologique qui est imposé.
- L’application de la norme se fait sur une base volontaire, il n’y a aucune obligation à l’adopter, et il n’y a pas de contrôle indépendant ; tout repose sur la bonne foi des producteurs…

Du point de vue du consommateur, comment repérer les vrais bons produits ?
Les consommateurs doivent redoubler de vigilance. Ils peuvent se référer à certains labels sérieux (voir encadré). Surtout, ils doivent analyser la liste INCI - International Nomenclature of Cosmetic Ingredients. Elle est obligatoirement affichée sur toutes les étiquettes des cosmétiques. De nombreuses applications, comme INCI Beauty ou Yuka, permettent de décrypter ces ingrédients par simple scan du code-barres. Chacune a ses spécificités, ses algorithmes, si bien que la note peut varier d’une app à l’autre pour un même produit. On évitera en tout cas tout ce qui est silicone, PEG, sulfates agressifs (SLS) et parfums synthétiques, qui sont soit des allergènes, soit des perturbateurs endocriniens.
Et bien sûr, le plus simple et aussi le plus éthique, c’est d’acheter auprès d’enseignes de confiance, spécialisées dans le bio, et qui ne référencent que des produits finement sélectionnés pour leur qualité et leur efficacité. Je ne pense pas ici aux pharmacies et parapharmacies, qui, contrairement à ce que les consommateurs pensent, ont peu de vrais bons produits dans leurs rayons. De plus, comme je le disais au début, les indications sur les emballages sont malheureusement souvent commerciales et trompeuses.
Les labels
Anne-Gaëlle Halter : « Les labels permettent de rassurer le consommateur et d’augmenter la crédibilité de la marque. Chaque label a son propre cahier des charges, et également son propre coût, si bien que certains petits producteurs et artisans renoncent à faire certifier leurs produits. D’autres les refusent car ils ont des exigences plus poussées pour leurs produits et trouvent les critères trop laxistes. Les labels les plus fiables sont les plus indépendants et qui assurent un contrôle par un organisme reconnu. On peut citer Ecocert, BDIH et Cosmos Organic. »
Ce tableau peut vous aider à repérer les labels qui répondent le plus précisément possible à vos attentes :

Propos recueillis par Marie-Astrid Heyde
Photos : © Picto / Fanny Krackenberger
Article tiré du dossier « Cocher les cases »