Migrations et Développement : pour une globalisation plus juste et équitable !
Les migrations mondiales montrent que la globalisation ne se fait pas de façon juste et équitable. Les pays industrialisés doivent mettre en œuvre des politiques économiques, financières et agricoles justes et équitables, qui sont cohérentes avec la lutte contre la pauvreté et qui respectent les limites de notre planète. Si nous voulons remédier aux causes de la migration, nous devons contribuer à des conditions de vie humaines partout au monde, conformes aux valeurs de solidarité inscrites dans le Traité de Lisbonne.
Le Cercle de Coopération des ONG de développement asbl (le Cercle) demande que l’UE ne se limite pas au traitement des symptômes du problème, bien qu’il soit essentiel d’y apporter des solutions urgentes, mais examine également les causes qui conduisent les migrants à partir pour l’Europe au risque de leur vie. Un certain nombre partent à cause de la guerre et de la violence qui sévit dans leur pays comme en Syrie ou en Erythrée. D’autres fuient la misère, la faim, la pauvreté et l’absence de perspectives dans leurs pays de l’Afrique subsaharienne.
Or, c’est l’Europe - et les Etats-Unis – qui ne cesse d’imposer depuis des décennies, notamment aux pays africains, une politique qui privilégie catégoriquement l’économie du Nord et les multinationales au détriment du bien-être des populations.
Cette politique a eu et continue à avoir un impact désastreux sur le niveau de vie des populations dans les pays dits en développement, sur les économies de ces pays, sur leur environnement et sur les ressources de leurs gouvernements. Elle fut introduite, dès les années 80 et 90, par les programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale et du FMI. Elle est poursuivie aujourd’hui également par l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) et l’UE.
Ainsi, l’UE continue d’exporter des produits alimentaires à des prix dumping qui détruisent sans cesse de nouveaux secteurs agricoles, des emplois et des sources de revenus. Une des conséquences de cette politique est un exode rural toujours plus massif.
Pire, loin de reconnaître le caractère contraire à tout développement de telles pratiques et de telles politiques, l’UE s’applique maintenant à les aggraver par le biais de nouveaux accords de libre-échange et notamment les accords de partenariat économique (APE).
Ces mouvements migratoires sont, par ailleurs, renforcés par d’autres facteurs mettant également en jeu la responsabilité des pays développés comme les changements climatiques, l’action souvent néfaste des multinationales et des marchés financiers, l’exploitation massive des terres et ressources premières ou l’absence de justice fiscale. A cela s’ajoute la gouvernance défaillante de nombre d’Etats du Sud.
Il est urgent que l’Union européenne et ses Etats membres agissent, dans la dignité et la solidarité, et en lien avec les valeurs européennes :
- Les Etats membres de l’UE devront ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (Convention 45/158) ainsi que la Convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les migrations dans des conditions abusives et la promotion de l’égalité des chances et de traitement des travailleurs migrants (Convention C 143).
- En application de l’article 208 du Traité de Lisbonne sur la cohérence des politiques, la Commission européenne et le Luxembourg devront s’engager en faveur d’une autre politique commerciale, agricole et de développement de l’UE qui devra
- redéfinir d’urgence la politique de coopération, de commerce et d’agriculture de l’UE en tenant compte des écarts de développement et de productivité et baser les relations commerciales de l’UE avec ces pays sur le principe de non réciprocité et sur une régulation adéquate des marchés ;
- suspendre la ratification des APE et procéder à une étude d’impact d’un tel accord sur le développement et les droits humains, conçue et réalisée avec tous les acteurs concernés ;
Les politiques de dissuasion vendues au public comme étant des solutions humanitaires
L’accord de l’UE avec la Turquie soulève de graves questions quant au respect du droit international. Par ailleurs les fonds mis à disposition de la Turquie et ceux proposés aux pays africains lors du sommet de la Valette en automne dernier doivent être scrupuleusement monitorés quant à leur utilisation sur place.
Dans la perspective du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement les 28 et 29 juin à Bruxelles, le Cercle exprime ses plus grandes réserves par rapport au Cadre pour un partenariat sur les migrations que la Commission européenne a proposé et qui tend à conditionner les accords de coopération à des politiques d’externalisation des contrôles des migrations à mettre en place par les pays africains.
Dans ce contexte, le Cercle exprime son respect vis-à-vis de Médecins sans Frontières qui ont annoncé ce vendredi 17 juin 2016 qu’ils n’accepteront plus les fonds issus de l’Union européenne et des membres européens, en opposition à leurs politiques de dissuasion dommageables et à l’intensification des tentatives de repousser les personnes et leurs souffrances loin des côtes européennes.
Communiqué par le Cercle de Coopération des ONG de développement du Luxembourg – www.cercle.lu/