Mode : « réagir localement à une problématique mondiale »
La phase de candidature pour l’Upcycling Challenge s’est clôturée début avril. Plus de 30 couturiers en herbe ou confirmés se sont engagés à fournir un blouson réalisé de leurs mains à partir de tissu de réemploi. Ana Luisa Teixeira de Caritas et Johanna Body du Service National de la Jeunesse partagent leurs premières impressions.
Dans le cadre de leur mandat avec la direction de la Coopération luxembourgeoise, Caritas Luxembourg et Fairtrade Lëtzebuerg organisent toute une série d’événements de sensibilisation à une mode plus durable, à l’encontre de la fast fashion. C’est dans ce contexte que Lët’z Refashion by Caritas a lancé en mars un concours d’upcycling ouvert à tous. Chaque participant devait s’engager à créer un blouson de type « box jacket » à partir de matériaux déjà existants.
Le jury remettra prochainement son verdict et l’heureux gagnant sera annoncé à l’occasion d’un défilé de mode organisé le 15 juin 2024 au centre commercial Cloche d’Or. Johanna Body fait partie de ce jury. Elle répond à nos questions aux côtés d’Ana Luisa Teixeira, coordinatrice de programmes pour Caritas.
Pouvez-vous rappeler les raisons d’être de ce concours original ?
Ana Luisa Teixeira : Chez Caritas, nous avons remarqué qu’il y a un réel besoin de mettre en avant l’upcycling, de revaloriser la matière première, de ne pas la jeter mais de la réutiliser pour créer des choses qui peuvent encore être utiles. Et plus encore, il est important de faire cette valorisation au niveau local, en donnant l’opportunité aux habitants du Luxembourg de montrer leurs compétences. C’est aussi une démarche qui s’inscrit dans la logique d’économie circulaire.
De manière plus générale, il faut sensibiliser aux enjeux liés à la mode. Des champs de coton aux réseaux de distribution, tout le secteur du textile est problématique, sur les plans sociaux et environnementaux. C’est un secteur qui nous touche tous, d’une manière ou d’une autre puisque nous devons soit acheter, soit confectionner nos vêtements. Il est important de faire passer ces messages aux générations futures et de montrer qu’il est possible de réagir localement à une problématique mondiale.
Johanna Body : Il est essentiel de penser au recyclage et à l’upcycling car nos ressources ne sont pas sans limite. Un simple changement ou une petite réparation peut prolonger la durée de vie d’un vêtement, mais beaucoup de personnes ne savent pas encore cela.
Johanna Body, comment avez-vous rejoint le jury du Luxembourg Upcycling Challenge ?
JB : Le Service National de la Jeunesse (SNJ) propose différents ateliers d’upcycling au Luxembourg, dont un atelier de couture au centre-ville. En tant que fashion designer, je suis experte en couture au sein de cet atelier. Depuis plus d’un an, nous collaborons avec le Lët’z Refashion Store de Caritas qui met en vente les vêtements que nous produisons.
Créer des vêtements en upcycling avec des jeunes, ça se passe comment ?
JB : Dans notre démarche, nous n’achetons rien, nous travaillons à partir de dons ou de vêtements que les jeunes apportent pour les « upcycler » ou les réparer. Venir ici leur permet d’être actifs, d’essayer de nouvelles choses et d’apprendre les bases de la couture. Ils peuvent venir avec leurs propres idées ou compter sur notre aide pour en trouver. Nous sommes dans un cadre d’éducation non formelle ouvert aux personnes de 16 à 30 ans qui ne sont plus à l’école et n’ont pas de travail.
Mon travail au sein du SNJ consiste à montrer aux jeunes ce qu’ils sont capables de faire, même si ce sont de petites choses comme réparer une paire de jeans ou une blouse.
J’ai vraiment hâte de découvrir ce que les participants ont proposé et quelles solutions vont émerger de ce projet. Je suis très heureuse de faire partie de cette aventure !
Les participants au Challenge sont-ils tous de jeunes résidents luxembourgeois ?
ALT : Non, on y trouve toutes les générations et c’est une très bonne chose. Il y a des candidats retraités et des adolescents, et tous sont très intéressés par le sujet. Après tout, c’est une problématique intergénérationnelle.
Qui sont les autres membres du jury ?
ALT : Dans le jury, on retrouve Elisabeth Adams, responsable Lët’z Refashion, Anatoli Papadopoulou des Théâtres de la Ville, l’influenceuse Natascha Bintz, Kévin Grisez de The Vintage Store Luxembourg et Johanna.
Au Luxembourg, où peut-on trouver des vêtements réalisés en upcycling ?
ALT : En ville au Lët’z Refashion Store by Caritas et chez Devï Clothing. À Dudelange chez Hermana Clothes.
L’upcycling au sein du Service National de la Jeunesse (SNJ)
Géré par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse, le SNJ s’adresse aux jeunes âgés de 16 à 30 ans qui ne vont plus à l’école et n’ont pas encore de travail. Les ateliers d’upcycling sont répartis sur trois sites :
- à Colmar-Berg : atelier de cuisine, impression textile et atelier de couture
- à Luxembourg-ville : atelier de couture et de menuiserie
- à Esch-sur-Alzette : arts plastiques
Marie-Astrid Heyde
Photo principale : ©SNJ