Stratégie pour l’économie résiliente
Luxembourg Stratégie scénarise les futurs possibles pour l’économie luxembourgeoise à l’horizon 2050
Depuis sa création fin 2020, Luxembourg Stratégie n’a pas trop agité la sphère médiatique mais cet organe n’a pas chômé pour autant, depuis sa mise en orbite opérationnelle en mai 2021. Un moment où la sortie de crise sanitaire surlignait les notions et les besoins de résilience…
Luxembourg Stratégie est une task-force, une direction attachée au ministère de l’Économie, en charge de la prospective pour les stratégies économiques. À sa tête, on retrouve Pascale Junker, qui a une solide expérience en planification et aménagement du territoire ou dans la coopération - le tout baigné dans une implication pour les enjeux climatiques, énergétiques et planétaires : « La stratégie passe par le développement participatif de scénarios de transition de l’économie luxembourgeoise pour 2050. Il s’agit de contribuer à la transformation économique du pays vers plus de compétitivité et de résilience pour les prochaines décennies ».
Luxembourg Stratégie s’inscrit dans un fil logique, comme une extension de l’approche prospective et collaborative initiée en 2016 par l’étude sur la « Troisième Révolution Industrielle », dite « Rifkin ».
Franz Fayot, ministre de l’Économie, et Pascale Junker, chargée de direction, ont tout récemment présenté l’état d’avancement des travaux.
Et accessoirement de nouveaux outils de communication, une identité visuelle et une baseline à la symbolique assumée : la forme d’un arbre, racines ancrées dans le sol, tronc exposé au présent, branches ouvertes vers l’avenir… « Rétrospective. Perspective. Prospective » vient appuyer cette symbolique. Et le style graphique suggère la nécessité d’une triple transition digitale, sociale et environnementale.
Luxembourg Stratégie a aussi voulu illustrer graphiquement le concept de résilience : ses concepteurs y voient une frise chronologique (N-1, N, N+1, où N désigne un ’état Normal’), un choc, une crise provoquée par ce choc, puis le rebond suite à ce choc, la rémission et la transformation jusqu’à atteindre un modèle économique résilient qui prend la forme d’un beignet, celui de la Doughnut Economy, où la résilience de l’économie s’intègre dans les concepts combinés de limites planétaires et de frontières sociales.
Identifier les leviers, enrichir le débat
Au-delà des symboles, il y a de l’action et une volonté de faire bouger les lignes. Luxembourg Stratégie a notamment pour mission d’informer et d’éclairer l’action publique, d’être un outil d’aide à la décision politique, de concevoir des scénarios de développement économique, de matérialiser les flux physiques qui caractérisent la création de valeur économique par les entreprises.
« Il y a la situation de départ et la situation d’arrivée souhaitée, en 2050, en termes de consommation d’énergie, de matières, de sols ou d’eau, d’émissions polluantes ou d’emplois… On peut identifier les leviers efficients en ressources à activer pour vivifier une production qui soit à la fois bas-carbone, créatrice d’emploi de qualité, respectueuse des ressources et des budgets disponibles », le tout étant modélisé selon toutes les variables, macroéconomiques, physiques, énergétiques, écologiques ou spatiales...
Luxembourg Stratégie tient aussi à enrichir le débat public et à s’en inspirer dans une démarche participative et citoyenne. Elle mène ses travaux sous l’égide d’un comité interministériel, s’appuie sur l’expertise d’un groupe de travail technique, d’un groupe d’experts et d’un groupe de chef(fe)s d’entreprises. Et ces travaux feront l’objet d’un cycle de consultation publique de représentants des communes et de la société civile.
Scénarios en construction
Luxembourg Stratégie a par ailleurs intégré différents groupes de travail (Haut-Comité pour l’industrie, modélisation économétrique au Statec), collabore avec les experts de l’OCDE, de la Commission européenne ou, notamment, avec les implantations des 9 Luxembourg Trade and Investment Offices (LTIO) dans le monde, autant de « postes d’observation » des mégatendances globales.
Avant l’été, la task-force a lancé un cycle de travail collaboratif pour objectiver les futurs possibles de l’économie luxembourgeoise. Et, en août, elle a lancé deux études scientifiques. « SOC2050 », avec le LISER, porte sur la désirabilité et l’acceptation du changement sociétal ; « RISK2050 », avec l’Université du Luxembourg, sur la vulnérabilité de l’économie du Luxembourg face aux risques identifiés, comme le changement climatique, le déclin de la biodiversité ou la raréfaction des ressources. Des phénomènes géopolitiques comme la crise ukrainienne et ses répercussions sur les marchés globalisés, sont intégrés dans la réflexion, qui s’actualise à chaque étape.
« Les scénarios en construction tiennent compte de différentes bifurcations dont l’évolution est particulièrement incertaine à long terme, comme par exemple les nouvelles formes de gouvernance, les futurs modèles ‘écolonomiques’ ou la faisabilité de l’accélération technologique et digitale. Lors des prochains ateliers de travail qui se poursuivront jusqu’en mars 2023, ils seront complétés par des facteurs manquants et certaines sous-mégatendances, dont l’impact sur l’avenir du Luxembourg est relativement prévisible, comme le vieillissement de la population, la digitalisation et l’influence des réseaux sociaux, la sortie progressive des énergies fossiles dans un contexte de neutralité carbone, etc. »
Une conférence publique se tiendra à la Maison des arts et des étudiants de Esch-Belval les 17 et 18 octobre 2022. On y présentera les scénarios dans leur état d’avancement. Ils feront également l’objet d’une consultation publique fin 2022.
Alain Ducat
Photos et illustrations : MECO / Luxembourg Stratégie