Bien-être au Luxembourg : une décennie de contrastes

Bien-être au Luxembourg : une décennie de contrastes

De 2010 à 2023, le Luxembourg a vu des fluctuations marquées de son bien-être, influencées par des crises et des reprises. En 2021, les indicateurs économiques et sociaux rebondissent après une chute en 2020, mais des défis subsistent en 2023, avec des inégalités et un bien-être subjectif en déclin pour certaines populations.

Analyse des études du STATEC Luxembourg.

Une évolution contrastée du bien-être entre 2010 et 2023

Le bien-être au Luxembourg a suivi une trajectoire en dents de scie. En 2010, les défis incluaient une hausse des infractions, du chômage, et du risque de pauvreté, aggravés par une baisse de la confiance institutionnelle et de la santé perçue. Entre 2014 et 2016, une amélioration notable s’est manifestée grâce à une économie solide et un sentiment accru de sécurité, mais les inégalités de revenus ont continué de peser.

En 2020, la pandémie de COVID-19 a provoqué un effondrement. Le confinement a détérioré le bien-être pour un quart des résidents, affecté les revenus d’un sur six et intensifié la solitude pour un sur cinq. La santé mentale a souffert, avec une augmentation de l’anxiété et de la dépression, notamment chez les jeunes et les femmes.

2021 : l’année du rebond

Les indicateurs du Luxembourg Index of Well-being (LIW) ont fortement progressé en 2021. Le PIB par habitant a bondi à 137 points (indice 2010), et l’emploi a connu une reprise marquée, bien que le taux de chômage (87 points) et le temps partiel involontaire (85 points) restent inférieurs aux niveaux de 2010. Les inégalités de revenus persistent, mais des avancées sont observées en matière d’éducation, avec un indice de formation continue des adultes à 133 points.

Sur le plan subjectif, l’insatisfaction au travail a diminué, touchant 14% des résidents contre 19% en 2018. Cependant, les travailleurs non luxembourgeois et les jeunes restent les plus insatisfaits.

2023 : une année de stabilisation relative et de défis persistants

Le bien-être général est resté stable entre 2021 et 2023. Malgré une amélioration des aspects environnementaux, les indicateurs de sécurité se sont détériorés en raison d’une hausse des délits signalés. L’inflation et la hausse des taux d’intérêt, en grande partie dues à la guerre en Ukraine, ont accentué le sentiment d’anxiété, particulièrement chez les jeunes générations.

L’analyse subjective en 2023 révèle des notes moyennes de satisfaction de 6,7/10 pour la vie actuelle et de 6,4/10 pour le bonheur. Les écarts générationnels sont frappants : les jeunes ressentent plus d’anxiété que leurs aînés, tandis que le niveau de revenu influence également ces perceptions.

En matière de travail, la satisfaction atteint 86%, mais les salariés juste au-dessus du salaire social minimum (SSM) se sentent moins équitablement rémunérés, impactant leur satisfaction globale.

Et l’environnement dans tout ça ?

Francesco Saraccino, chercheur au STATEC Luxembourg et collaborateur au rapport PIBien-être, nous apporte son éclairage sur le bien-être au Luxembourg et l’importance de la protection de la planète.

Francesco Sarracino
Francesco Sarracino - © Fanny Krackenberger

« Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la qualité de vie dans le pays. Si l’on considère l’Indice Happy Planet (IHP), une mesure de la qualité de vie qui équilibre le bien-être subjectif, l’espérance de vie et l’empreinte carbone, il est clair que la durabilité environnementale est un enjeu majeur pour le Luxembourg.

Par rapport à 2019, l’IHP du Luxembourg a perdu 2 points dans le classement international de la qualité de vie, principalement en raison de ses mauvaises performances environnementales. Prenons l’empreinte carbone, qui mesure les tonnes d’équivalent CO₂ dues à la consommation : en 2021, elle était de 34,91 tCO₂e, soit plus de 10 fois supérieure au seuil de consommation équitable de 3,17 tCO₂e et bien supérieure à la moyenne du reste des pays d’Europe occidentale.

Pour mettre les choses en perspective, notons que depuis 2020, l’empreinte carbone a augmenté de 0,83 tCO₂e, et qu’avant la pandémie, elle a diminué de 0,33 tCO₂e en moyenne par an. En d’autres termes, l’empreinte carbone du Luxembourg a augmenté 3 fois plus vite que pendant la période pré-pandémique. Comme si cela ne suffisait pas, il faut savoir qu’au cours de la seule année de la pandémie, en 2020, l’empreinte carbone a diminué de 4,42 tCO₂e.

En résumé, les chiffres disponibles apportent trois mauvaises nouvelles :

1. Nous émettons toujours plus d’équivalent CO₂ que ce que nous devrions ;
2. Les chiffres les plus récents indiquent une augmentation annuelle trois fois supérieure à celle de la période pré-pandémique ;
3. En 2020, en raison du confinement et des politiques adoptées pour réduire la transmission du COVID-19, l’empreinte carbone a diminué de 4,42 tCO₂e, soit 13 fois plus que la baisse moyenne pré-pandémique.

Devons-nous espérer vivre dans un état de crise permanente pour que notre économie soit durable ?

On l’a bien compris : malgré tous nos efforts, il reste du pain sur la planche pour améliorer notre quotidien.

Sébastien Yernaux
Graphiques : STATEC
Article tiré du dossier du mois « Mieux vivre »

Article
Publié le mercredi 15 janvier 2025
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