Construire un nouveau modèle
Parmi les innovations que Polygone teste actuellement : la mise en place d’un centre de consolidation de la construction sur deux projets d’envergure du constructeur CLE, en collaboration avec le LIST. Cette plateforme permet à l’entreprise de se diversifier et d’amortir les ressources dont elle dispose. Mais elle permet aussi, plus largement, de libérer les ouvriers du BTP des tâches logistiques.
Interview d’Olivier Mulot, directeur logistique chez Polygone
Quel est le point de départ de ce projet ?
Ce projet trouve son origine dans un constat : les entreprises qui mettent en œuvre les matériaux perdent beaucoup de temps avec des tâches annexes, il fallait leur permettre de faire intervenir leurs ouvriers quand les matériaux sont à pied d’œuvre. La solution pour optimiser ce processus est la création d’une plateforme logistique. C’est là que nous intervenons.
Pourquoi avoir choisi de vous y impliquer ?
L’idée est de développer et de diversifier nos activités tout en utilisant ce dont nous disposons déjà, c’est-à-dire sans devoir investir dans du matériel ce qui, d’une part, serait coûteux et, d’autre part, nécessiterait potentiellement un délai de livraison.
Ce dont nous disposons, ce sont des camions, des hommes et de la surface de stockage, ce qui répond parfaitement au besoin de CLE de trouver un partenaire prêt à démarrer un projet. Notre premier projet est Omnia, une tour de 15 étages à Belval, sur lequel nous travaillons depuis un an déjà et qui touche bientôt à sa fin. Nous travaillons également sur la tour Gravity à Differdange.
Quel bilan pouvez-vous tirer de cette première expérience ?
La principale contrainte d’approvisionnement était différente sur les deux chantiers.
Pour la tour Omnia, l’unique moyen de livrer était de le faire par le lift, donc les ascenseurs qui permettent de faire circuler les matériaux et les hommes, que nous appelons aussi le goulet d’étranglement.
Sur Gravity, nous avons dû mettre en œuvre d’autres moyens puisque tous les étages de la tour n’étaient pas desservis par un ascenseur, en tout cas au moment du démarrage du projet. Il a donc fallu faire intervenir des camions-grues pour pouvoir livrer la marchandise par les fenêtres avec une technique spécifique de réception.
Ce qui était intéressant pour nous est que cela nous a permis d’utiliser en 2e partie de journée (puisque les livraisons se font aux alentours de 15/16 heures), le matériel qui sert, en 1re partie de journée, à collecter les déchets, donc d’amortir ce matériel.
Cela nous a aussi permis de sortir de notre zone de confort : mettre en place une zone de stockage à Mersch, réceptionner des matériaux nouveaux pour Polygone, devoir les recharger pour les livrer à pied d’œuvre a nécessité la rédaction de procédures. Il a également fallu trouver les bonnes personnes, les chauffeurs et les ouvriers en mesure de s’adapter de manière autonome sur chantier parce que tout est à construire, à inventer. On ne s’inscrit pas dans un modèle rodé qui aurait déjà fait ses preuves.
Qu’est-ce qui fait qu’un projet est différent d’un autre ?
Ce sont les contraintes sur chantier : l’accès aux étages, les largeurs des portes et des couloirs, et toutes les surprises qu’on peut trouver sur le terrain, comme des dalles ouvertes pour faire passer les tuyaux, par exemple.
Quel est le défi aujourd’hui ?
Il est de construire un nouveau modèle. C’est le but de ce projet avec le LIST dont nous faisons partie. Un modèle, c’est un mode d’emploi : comment s’y prendre pour livrer la marchandise ? Pour la stocker ? Sur quel logiciel travailler ? Pour l’instant, nous utilisons Airtable qui permet de partager des informations de livraison, de stockage, de réception de marchandise mais si nous voulons un jour aller plus loin dans la gestion du stock à proprement parler, nous devrons trouver un autre outil.
Le CCC est-il pertinent pour tout type de chantier ?
C’est un outil intéressant pour toute sorte de construction, de la tour à la résidence. La construction d’une résidence requiert moins de matériaux qu’une tour, mais aussi moins de personnel, donc la charge individuelle reste la même. Les contraintes aussi sont les mêmes : déposer la marchandise juste à temps, c’est-à-dire un jour avant que les matériaux soient mis en œuvre.
Mélanie Trélat
Article paru dans le NEOMAG#46
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