
« Devenir une entreprise B Corp, c’est affirmer sa raison d’être »
B Corp est l’abréviation de benefit for all - bénéfice pour tous en français. Une philosophie que la communauté internationale a exporté au Luxembourg, où elle a clairement trouvé de l’écho.
De plus en plus d’entreprises adoptent son label du même nom, comme en témoigne Laura Mullenders, Senior Market Development Coordinator pour B Lab Benelux.
B Lab, l’organisation à but non lucratif à l’origine du mouvement B Corp, certifie les entreprises respectant des critères exigeants en matière de performance sociale et environnementale, de transparence et de responsabilité. Pour obtenir cette certification, une entreprise doit remplir une évaluation en ligne, le B Impact Assessment (BIA), et obtenir au moins 80 points sur un maximum de 200, avant de se soumettre à un audit d’évaluation plus approfondi. Cinq domaines d’impact sont évalués : Gouvernance, Employés, Communauté, Environnement et Clients. La certification est valable trois ans. Pour obtenir la certification, une entreprise doit inscrire légalement dans ses statuts son engagement à poursuivre un but dépassant le profit.
Comment la certification B Corp est-elle arrivée au Luxembourg ?
Laura Mullenders : Elle a été introduite au Luxembourg en 2015 avec la certification de la première B Corp luxembourgeoise, Innpact. Au fil des années, de plus en plus d’entreprises ont utilisé notre outil d’auto-évaluation en ligne, anonyme et gratuit, intitulé BIA et certaines ont été jusqu’à la certification. Avant le partenariat avec IMS en 2022, elles étaient cinq . Ce chiffre a doublé depuis, il y a maintenant treize B Corp au Luxembourg.
Au-delà de la certification, pourquoi les entreprises utilisent-elles le B Impact Assessment (BIA) ?
C’est un moyen de s’évaluer et de voir où il est possible de progresser. En analysant les réponses données, le BIA peut créer un rapport d’amélioration personnalisé et fournir des suggestions d’actions à mettre en œuvre pour améliorer l’impact social et environnemental d’une entreprise.
Il y a l’exemple de Ramborn qui perdait des points parce que son activité était uniquement, à l’époque, la production de boissons alcoolisées. L’idée n’était pas nouvelle, mais c’est en remplissant le BIA qu’ils ont décidé de se lancer dans les jus de fruits pour accroître leur impact positif.
Exemples de critères évalués dans le BIA :
- Gouvernance : L’entreprise publie-t-elle un rapport d’impact ? Son conseil d’administration est-il diversifié en termes de genre, d’âge ou d’origine ?
- Collaborateurs·trices : L’entreprise offre-t-elle des salaires équitables et des avantages sociaux ? Les membres du personnel bénéficient-ils de formations sur la durabilité ?
- Communauté : L’entreprise participe-t-elle à des programmes de bénévolat communautaire ? Les chaînes d’approvisionnement sont-elles évaluées sur la base de critères sociaux et environnementaux ?
- Environnement : Quelle est la consommation énergétique de l’entreprise ? Les produits sont-ils approvisionnés de manière durable ?
- Clients : Des efforts sont-ils faits pour réduire les impacts environnementaux négatifs grâce à la conception des produits ou à la prestation des services ?
Les critères de certification ont-ils évolué au fil du temps ?
Oui, ils sont continuellement mis à jour pour refléter les évolutions sociétales, technologiques et réglementaires. Depuis sa création en 2006, la certification a connu six révisions majeures et une septième version est actuellement en cours d’introduction. C’est un travail qui a commencé il y a quatre ans et qui représente la transformation la plus significative de l’histoire de B Corp !
Si elle obtient au moins 80 points sur 200 au BIA, l’entreprise doit se soumettre à une évaluation puis à une vérification par des analystes. Elle doit ensuite modifier ses statuts légaux pour obtenir la certification B Corp. Pourquoi ces étapes sont-elles nécessaires ?
Un premier analyste s’assure que le BIA est correctement complété, vérifie certaines réponses et clarifie des points d’éligibilité potentiels. Ensuite, une autre personne réalise une évaluation approfondie. Cette double vérification réduit la marge d’erreur, assure l’objectivité et renforce la crédibilité du processus.
Avec la modification des statuts, l’idée est de formellement s’engager, dans sa raison d’être, à prendre en compte les intérêts de l’ensemble des parties prenantes et pas uniquement de ceux des actionnaires. C’est une manière d’assurer que les pratiques responsables sont intégrées dans l’ADN de l’entreprise, que sa réussite soit bénéfique aux personnes et à la planète.
Quels sont les avantages que tirent les entreprises de la certification B Corp ?
La certification est valable trois ans, ensuite les entreprises doivent se réévaluer. Dans la plupart des cas après ce délai, elles augmentent leur score au BIA et plus de la moitié réussissent à développer un modèle d’affaires à impact. Une étude de B Lab a montré qu’entre 2019 et 2022, 76 % des B Corps ont enregistré une croissance de leur chiffre d’affaires, contre seulement 60 % des non-B Corps. Elles renforcent donc leur résilience et leur pérennité.
En plus d’être un appui marketing, la certification est un moyen de se différencier de ses compétiteurs. C’est un atout concurrentiel qui démontre un engagement fort en faveur de la durabilité et de l’impact social. Il a aussi un réel effet en termes d’attraction et de rétention des talents, notamment au sein de la nouvelle génération. C’est chez la Gen Z que le logo de la certification B Corp est le plus reconnu et, selon le Baromètre Talents 2024 d’EY, « le respect de l’éthique dans les activités économiques » d’une entreprise est l’engagement le plus important pour 69% des jeunes.
Propos recueillis par Léna Fernandes
Extrait du dossier du mois « Cocher les cases »