L’eau, une re-source essentielle dans la construction ?
La 2e conférence de la série Meet&Build, portée par l’IFSB et Picto Communication Partner, a eu lieu le 6 juin. De l’eau potable aux eaux usées en passant par les eaux pluviales, des spécialistes ont abordé les divers enjeux et solutions relatifs à cette problématique multifacette.
Brigitte Lambert, cheffe de la Division des eaux souterraines et des eaux potables de l’Administration de la gestion de l’eau, a ouvert les présentations en abordant la question de la gestion de l’eau potable.
L’objectif est de garantir l’approvisionnement à moyen et long terme dans un contexte de développement économique et de croissance démographique, a-t-elle rappelé. Pour y parvenir, une stratégie basée sur 3 piliers - protection des ressources existantes, économies et recherche de nouvelles sources - a été élaborée.
Sur les 120 000 m3 d’eau consommés chaque jour au Luxembourg, 60 % le sont par les ménages qui, de ce fait, représentent un levier d’action important. 36 % de leur consommation en cette eau de très haute qualité sont dédiés à l’hygiène corporelle, 25 % aux toilettes et seuls 5 % sont utilisés pour boire et préparer les repas.
La diminution de la consommation d’eau potable passe d’abord par des changements de comportement et par des équipements plus économes.
Quant à sa substitution, elle peut se faire par les eaux pluviales, les eaux ménagères légères et les eaux grises. Le champ d’application du règlement grand-ducal en vigueur qui prévoit l’octroi d’un subside pour la réutilisation des eaux de pluie devrait bientôt être élargi et le montant de la prime être revu à la hausse. Des études sont par ailleurs en cours sur les eaux issues de la salle de bains et des projets pilotes ont été lancés. Ils portent sur une station de traitement et sur un filtre biologique.
Brigitte Lambert a conclu sur l’importance de disconnecter les réseaux d’eau potable et d’eaux pluviales ou grises traitées lors de la conception des bâtiments, et d’effectuer des analyses et un entretien réguliers des infrastructures en phase d’exploitation.
Claude Meisch, chargé d’études à la Division des eaux souterraines et des eaux potables de l’Administration de la gestion de l’eau, a pris le relais concernant la gestion des eaux pluviales. « Avec le changement climatique, les risques d’inondation évoluent », a-t-il indiqué en préambule : nous passons de situations maîtrisées et réglementées – la pluie tombe pendant de longues périodes en hiver jusqu’à saturer le sol -, à des pluies estivales soudaines et intenses qui interviennent hors des schémas connus.
Au niveau de l’aménagement du territoire, l’idéal est de laisser suffisamment de place aux rivières pour qu’elles puissent sortir de leur lit sans dommages pour les biens et les personnes, et de veiller, lors de projets de construction, à se rapprocher du bilan hydrologique du terrain à l’état naturel, c’est-à-dire à conserver les niveaux d’évapotranspiration et d’infiltration initiaux. Il convient naturellement de ne pas construire en zone inondable mais, pour les bâtiments qui s’y trouvent déjà, les zones d’écoulement préférentielles sont identifiées sur une carte et les mesures de précaution à prendre au sein de ces zones sont reprises dans un guide.
C’est ensuite Thomas Biendel, directeur du département Hydrologie chez Luxplan, membre de LSC Engineering Group, qui a pris la parole sur le sujet « L’eau dans les projets de construction – enjeux, contraintes et opportunités ».
Il est d’abord revenu sur les inondations de juillet 2021 et la sécheresse qui a suivi, à l’été 2022, puis a mentionné quelques données établies par le LIST : + 20 % de précipitations si le réchauffement climatique s’établit à 4 degrés et, surtout, une succession de périodes sèches et de pluies très fortes. « C’est notre nouveau climat en Europe de l’ouest et centrale », a-t-il affirmé, « C’est pourquoi il est important de planifier les bâtiments pour qu’ils puissent réagir à ce genre de situation ».
Pour ce faire, les architectes et ingénieurs disposent de nombreuses données publiques, qui sont cruciales dans la planification des projets – sur le géoportail et l’atlas des pluies torrentielles notamment – qui leur permettent de se renseigner sur la nature et l’état des sols et des cours d’eau.
L’idée à ne pas perdre de vue est d’avoir une gestion eaux pertinente et intégrée qui se traduit, entre autres, par le fait d’essayer de ne pas dégrader la situation originelle, de compenser ce qui l’a été, de protéger les masses d’eau souterraines et les personnes, de penser en termes d’intégration paysagère.
De multiples opportunités se dégagent d’une telle gestion : amélioration du cadre de vie dans et autour des bâtiments, apport de biodiversité en ville, création de puits de carbone, recharge des nappes phréatiques et réduction de la diffusion des polluants vers ces nappes au moyen des bassins ouverts paysagers, lutte contre les îlots de chaleur urbains, etc. « Chacun de nous a une responsabilité. C’est un travail long et chronophage, mais nous devons tous le prendre à bras-le-corps pour répondre aux défis de demain », a-t-il conclu.
Enfin, Xavier Duboisdendien, fondateur de Duboisdendien Sarls, est intervenu pour présenter les solutions de végétalisation en milieu urbain que son entreprise propose.
En apportant, sur le toit d’un bâtiment, des végétaux et du substrat qui drainent les eaux pluviales, les toitures vertes sont, en effet, une excellente mesure pour compenser le scellement des sols et ce, qu’elles soient extensives ou intensives.
Les toitures extensives sont légères et nécessitent peu d’entretien, mais elles ont une valeur écologique moindre par rapport à une toiture intensive. En fonction de l’épaisseur du substrat, elles peuvent cependant retenir jusqu’à 50 à 70 % d’eau. Quant aux toitures intensives, qui intègrent des plantations plus hautes, voire des arbres, avec l’épaisseur de substrat correspondante, elles permettent, en plus de gérer l’eau (jusqu’à 164 l/m2 absorbés), de protéger l’étanchéité de la toiture, d’améliorer la régulation des températures dans le bâtiment, de fixer les poussières, d’augmenter de 5 % le rendement des panneaux photovoltaïques, de réduire la pollution électromagnétique et de favoriser la biodiversité, entre autres.
Le prochain événement est fixé au 4 juillet et il sera l’occasion de découvrir « 11 start-up qui vont révolutionner le secteur ».
Mélanie Trélat