La confiance renouvelée dans le tissu local
La Chambre des Métiers accompagne artisans et PME, et soutient des programmes et des initiatives de promotion. Pour Gilles Reding, Directeur des Affaires environnementales, technologies et innovation, les acteurs locaux ont souvent su se réinventer pendant la crise. Mais tout le tissu a souffert et souffre encore. D’où le besoin de soutien officiel et d’aides à la relance, alors que le grand public et le consommateur ont démontré leur regain de confiance envers des savoir-faire de proximité.
La résilience est un objectif affiché par toutes les entreprises et tous les acteurs économiques. C’est aussi un des leitmotive des plans de relance. Quelle est la position de la Chambre des Métiers ?
Le NeiStart Lëtzebuerg, le Made in Luxembourg, le regain des circuits courts, le savoir-faire régional, tout ça, ce sont des pistes à promouvoir. La crise du Covid a clairement mis en évidence les talents et la flexibilité des entreprises luxembourgeoises et le consommateur a tout aussi clairement montré que l’économie locale était importante et qu’elle méritait d’être soutenue. Beaucoup de petits entrepreneurs se sont montrés solidaires et inventifs, ont fait preuve de souplesse, de flexibilité et de disponibilité. L’approvisionnement a été assuré et le consommateur a parfois découvert ou redécouvert le savoir-faire régional, dans l’alimentaire bien sûr mais pas seulement ; je pense à une entreprise qui coule la dalle d’un « Field-Hospital » au CHL, à des ateliers de retouche qui ont utilisé leurs compétences pour des tenues médicales spéciales, fabriquer des masques ou produire du gel hydroalcoolique, à des dons venant de PME solidaires... Nous pensons vraiment, à la Chambre des Métiers, que cette confiance renouvelée dans l’économie luxembourgeoise mérite largement le soutien de tous.
L’accompagnement, les programmes d’appui, la promotion, la sensibilisation, c’est donc primordial. Quelques exemples ?
Nous cherchons toujours à être au plus près de nos membres. Nous avons relancé ou encouragé des initiatives de promotion et des slogans comme « Don’t do it yourself » ou « Handwierk makes it happen » dans la foulée du Let’s make Handwierk happen ! Le soutien permanent et des campagnes ciblées sont des outils renouvelables. Le label Made in Luxembourg existe depuis presque 30 ans et il est toujours important pour souligner le savoir-faire et son origine. Il faut sans cesse coller aux besoins, comme ceux de la construction passive avec la certification « Energie fir d’Zukunft + ». Et poursuivre la conscientisation et l’encouragement, comme on le fait avec le Prix de l’Innovation dans l’artisanat par exemple.
Comment voyez-vous un programme comme Fit 4 Resilience, qui s’inscrit dans la politique de relance de l’économie nationale Neistart Lëtzebuerg et qui souhaite notamment « identifier les opportunités pour se réinventer et relancer les activités économiques de manière plus résiliente, en intégrant par exemple une approche plus digitale, circulaire et régionale » ?
C’est intéressant parce que ce programme invite à une analyse 360° de l’organisation, de la sécurité, de l’approvisionnement, de l’interaction avec le client, de la digitalisation ou de la durabilité. C’est un bon outil qui peut appuyer une remise en question de l’entrepreneur ou de sa façon de travailler, de manager. En période de crise, c’est utile, mais ce sera encore plus utile pour la relance. Pour l’heure, beaucoup d’entreprises ne vont pas investir dans ce type de démarche, simplement parce qu’elles sont en mode survie ! Il serait intéressant qu’une 2e phase aille au-delà de l’audit pour accompagner l’implémentation. Une vision sectorielle serait utile aussi, pour adapter les mesures aux besoins des métiers et donc rendre le tissu résilient par secteurs, en commençant par les plus touchés.
Quelle est la place de l’artisanat et des PME locales dans cette recherche de durabilité, de résilience et de pérennité ? Et quels sont les écueils à éviter ?
Le consommateur est à la recherche de la qualité et du local. C’est une tendance marquée. Le Made in Luxembourg, ce n’est pas du protectionnisme, c’est de la confiance envers un savoir-faire qui affiche ses origines. C’est de la proximité, la conscience que chacun peut aider, à sa porte. C’est pour ça aussi qu’une approche sectorielle est indispensable, afin que l’on tire les bonnes conclusions de la crise, de ses conséquences et des moyens d’en sortir plus résilients. Il semble donc évident que les PME, les artisans, les créateurs de valeur locaux, doivent être soutenus. Il faut favoriser leur relance. On ne doit surtout pas revenir au point zéro d’avant la crise. L’État a un rôle, disons même un devoir : non seulement continuer à soulager les entreprises des charges financières qui pèsent sur l’avenir, mais aussi raccourcir les délais, simplifier encore les procédures, alléger la taxation et les accompagner étroitement au niveau de la transition énergétique, l’autre majeur défi qui est à la porte.
Pour nous, la relance que chacun espère passera par le tissu local des entreprises. C’est là qu’il y a des idées et des actes durables, c’est là qu’est l’épine dorsale économique du pays. C’est là qu’il faut mettre le focus.
Propos recueillis par Alain Ducat