La sobriété énergétique, un concept à comprendre et à développer
Dans le cadre des Transition Days organisés par le CELL (Centre for Ecological Learning Luxembourg) et REconomy Luxembourg*, des conférences virtuelles sont organisées traitant chacune de thèmes spécifiques liés bien sûr à la transition écologique.
Le jeudi 12 novembre s’est tenue la conférence négaWatt « La sobriété énergétique, pilier de la transition énergétique ? », partant du principe que la meilleure énergie est celle qui n’est pas consommée.
« Les choses vont dans la bonne direction »
Le ministre de l’Énergie et ministre de l’Aménagement du territoire du Grand-Duché, Mr Claude Turmes, a introduit cette conférence. Réaliste, il indique : « Sur le changement climatique, tout est dit, maintenant il faut des actes ». La récente victoire américaine de Joe Biden le rassure, ce dernier ayant promis que les États-Unis rejoindraient immédiatement l’Accord de Paris. M. Turmes est également confiant face à l’engouement des citoyens luxembourgeois pour faire bouger les choses, engouement qui a permis au gouvernement de pousser le curseur plus loin au niveau des mesures mises ou à mettre en place.
Les domaines à améliorer sont évidemment nombreux – ils touchent finalement à tous les aspects de la société -, à commencer par la construction dont le taux y est le plus haut de toute l’Europe. Et de rappeler que le pays a déjà les normes les plus élevées en EU pour le résidentiel et prépare une loi pour appliquer ces mêmes normes au non résidentiel. Il reste néanmoins tout un arsenal de mesure à améliorer constamment, notamment pour la rénovation, et qui passe également par la formation continue des artisans.
C’est du côté du transport « qu’il y a le plus de pain sur la planche ». En plus de la taxe carbone et de l’augmentation des accises sur l’essence, le pays doit développer d’autres solutions pour diminuer le nombre de voitures sur ses routes : les transports publics sont gratuits mais doivent toujours être améliorés, il faut évoluer vers le modèle de voitures partagées et renforcer la mobilité douce en coopération avec les autorités locales. M. Turmes a également à cœur de développer les anciennes friches industrielles afin de ne pas toucher aux zones naturelles, et d’y créer des quartiers sans voiture ou presque.
Il est également possible et nécessaire d’agir sur le secteur alimentaire (les Luxembourgeois consomment beaucoup de viande), le tourisme (à l’image des Suisses, l’empreinte carbone des Luxembourgeois est certainement encore plus élevée en dehors du territoire que sur le territoire) et la place financière (en réalisant un travail de verdissement sur les milliards d’euros qui y transitent).
« Limiter impérativement le réchauffement en dessous de 2°C pour éviter toute dérive »
C’est ensuite Benoît Lebot qui a pris la parole. Membre de l’association négaWatt en France, il est par ailleurs spécialiste des politiques publiques de lutte contre le changement climatique et de transition énergétique.
Pour lui, au cœur du problème, un constat : « L’énergie, c’est le sang dans les veines de nos économies ». « Nous émettons jusqu’à 40 gigatonnes d’équivalence CO2. Pour les puits de carbone, il faudrait au moins stopper la déforestation mais on voit l’impératif devant nous de fermer le robinet (énergétique) si on veut atteindre une stabilité dans la concentration de gaz à effet de serre et limiter impérativement le réchauffement en dessous de 2°C pour éviter toute dérive », prévient l’expert.
Son association a émis toute une série d’hypothèses pour aller vers plus de sobriété dans les transports, la construction, l’électricité, vers une réduction par 7 des gaz à effet de serre d’ici à 2050.
Dans ses hypothèses, « changer les comportements » est une donne essentielle parmi les quatre facteurs à prendre en compte.
Son analyse complexe et détaillée peut être visionnée, avec l’ensemble de la conférence, ci-dessous :
« Pour atteindre -55% de GES d’ici à 2050, il manque 350 milliards d’euros par an »
C’est enfin Lucas Chabalier, responsable plaidoyer de l’association Agir pour le climat, qui a pris la parole pour présenter les grandes lignes de ce que pourrait être un Pacte Finance-Climat européen.
L’objection actuel de l’Union européenne est de réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, et d’atteindre la neutralité carbone en 2050. La Commission européenne a proposé de revoir cet objectif intermédiaire pour atteindre -55% de GES pour 2030.
Le principal problème – au-delà peut-être de l’obtention de l’accord de chacun des États-membres -, est financier. Rien que pour atteindre une réduction de 40%, il y a un déficit budgétaire de 260 milliards d’euros annuels. L’association Agir pour le climat a fait une proposition en deux points pour combler ce manque :
- Créer la Banque européenne du climat et de la biodiversité – qui est déjà en partie actée
- Créer un budget climat dédié à ces objectifs
Le fonds de relance Covid-19 comprend également une part non négligeable dédiée à la transition écologique.
Les intervenants ont ensuite débattu sur les questions proposées par le public et insisté sur certains aspects abordés.
Marie-Astrid Heyde
*En partenariat avec l’Université de Luxembourg (master en Architecture), Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST), Institute for Organic Agriculture (IBLA), Office for Landscape Morphology (OLM), les coopératives énergétiques TM EnerCoop et EnerCoop Uelzechtdall, ainsi que la plateforme Votum Klima.