One Planet Luxembourg Les partis face aux questions de la société civile
Klima, Biodiversitéit, Transitioun – wat soen d’Parteien ? Forte mobilisation aux Rotondes et en ligne pour exiger de la politique des réponses aux défis que représentent le changement climatique, la crise de la biodiversité et l’urgence d’une transition juste au Luxembourg.
Si les tables rondes politiques autour des élections se sont multipliées ces derniers mois, l’événement du 26 septembre aux Rotondes était d’une tout autre nature et envergure. Organisé par un collectif d’une centaine d’organisations, institutions et entreprises et de plus de sept cents citoyen.nes rassemblés autour du Nohaltegkeetsrot, son objectif était d’obtenir des réponses concrètes pour affronter dès la prochaine législature les immenses défis posés au Luxembourg par l’urgence climatique, la perte de biodiversité et la transition vers une société zéro carbone. La grande salle des Rotondes était pleine à craquer mais une centaine de personnes ont pu suivre l’événement en live sur la plateforme www.oneplanetluxembourg.lu sur laquelle on peut désormais revisionner la vidéo d’une durée de 2 h 20 mn.
C’est donc sous la bannière commune One Planet Luxembourg que les animateurs de la soirée, Norry Schneider, vice-président du Nohaltegkeetsrot, et Laly Chivard, vice-présidente de la CNEL, ont soumis les représentants des partis invités Sam Tanson (déi gréng), Franz Fayot (LSAP), Max Hahn (DP), Christophe Hansen (CSV), Sven Clement (Piraten) et Gary Diderich (déi Lénk) à une série de questions en trois grands blocs thématiques selon un tempo minutieusement réglé et ne laissant pas de place à des discours évasifs.
Quelle position le Luxembourg a-t-il dans les questions de climat, de biodiversité, de consommation de ressources ?
Après un ardent plaidoyer de la directrice de natur&ëmwelt Claudine Felten à l’adresse des candidats pour que la prochaine législature soit enfin celle de l’action, les représentants de tous les partis ont admis l’urgence.
« Mir kenne Virreider sinn am Ressourcë spueren an notzen ». Pour Sven Clement (Piraten), le Luxembourg devrait adopter un rôle précurseur au niveau de la consommation et de l’utilisation des ressources.
Franz Fayot (LSAP) estime nécessaire que le pays se montre exemplaire comme laboratoire de la durabilité en changeant d’un modèle d’économie linéaire vers un modèle circulaire. Dans un monde où les ressources sont limitées, il appelle aussi à plus de sobriété. « De System packt et net » -
Selon Gary Diderich (déi lenk), le système à lui seul n’arrivera pas à résoudre la crise de la biodiversité et le Luxembourg porte une grande responsabilité en raison de sa richesse et du rôle de la finance.
« Naturschutz ass Menschenschutz » - l’analyse de Sam Tanson (déi gréng) résume dans des mots simples toute la panoplie de la problématique - elle remarque que la cohésion sociale est d’une importance primordiale dans ce contexte.
« D’Situatioun ass seriö »- pour Max Hahn (DP) les mesures sociales sont très importantes, il met le focus sur l’acceptation des citoyens pour la protection du climat et de l’environnement.
« Mir mussen eisen Afloss an der Welt spille loossen » - dernier intervenant pour ce premier tour, Christophe Hansen (CSV) estime que la situation est dramatique et que le Luxembourg devrait davantage faire valoir son influence au niveau mondiale pour des partenariats.
Une discussion sur le positionnement des différents partis sur ces questions a suivi où les candidats ont essayé d’expliquer leurs stratégies respectives.
Pourquoi les choses n’avancent-elles pas assez vite au Luxembourg et quels sont les blocages institutionnels ?
Dans le deuxième bloc, Pierre Lorang, coéditeur de la revue forum partenaire de l’événement, a dressé un véritable réquisitoire contre les blocages spécifiques de la société et des institutions luxembourgeoises, qui empêchent encore une action politique à la hauteur des défis. Constitution, juridictions, Conseil d’Etat, autonomie des communes, jalousies entre ministères et un jeu politique concurrentiel empêchent une politique climatique cohérente.
On sentait une certaine impuissance de tous les partis face à un cadre institutionnel qui ne laisse pas assez de place pour le bien commun et qui est toujours fixé sur une idée de la propriété privée héritée du XIXe siècle.
Sven Clement (Piraten) relève que la pandémie de Covid 19 a montré que la politique sait être réactive quand il y a urgence. La politique peut prendre des décisions importantes, même si parfois une majorité de la population n’est pas à bord (il pointe l’exemple de la peine de mort en France).
Le ministre Franz Fayot (LSAP) se rallie aussi à l’exemple de la gestion de la pandémie et ajoute que la crise du climat, de la biodiversité, du logement nécessite une approche « whole of government » en mettant ces sujets à l’ordre du jour de chaque conseil de gouvernement.
Gary Diderich (déi Lénk) met en question le rôle et le bien-fondé du Conseil d’Etat – « de Staatsrot misst ofgeschaaft ginn » et remarque que face à l’urgence climatique, les citoyens sont plus avisés que certains politiques comme le montre les travaux du Klima Biergerrot (KBR).
Pour Sam Tanson (déi gréng), l’exemple de la pandémie de Covid 19 ne doit pas se répéter ! « Haut agéiere fir Aschränkunge vu muer ze évitéieren ». Il lui importe de sensibiliser et d’informer maintenant pour éviter des restrictions dans le futur.
Max Hahn (DP) constate qu’il y a urgence et que le KBR tout comme le PNEC présentent des bonnes pratiques pour collaborer de façon efficace avec les citoyens.
Christophe Hansen (CSV) nuance en remarquant qu’il ne faut certainement pas abolir le Conseil d’Etat mais plutôt redéfinir les procédures. La même question se pose au niveau des communes.
Quels sont les enjeux sociétaux de la transition ?
Le 3e orateur de la soirée, le directeur de l’Agence immobilière sociale Gilles Hempel, met en question le droit des personnes plus aisées à émettre davantage de CO₂. Pour lui, la protection du climat passe par une justice climatique. Le moyen serait l’instauration d’un budget CO₂ individuel pour chaque citoyen et pour chaque pays.
« Jiddweree muss Moyen’en kréie fir mat ze maachen » – pour Christophe Hansen (CSV) la différenciation d’un contexte de vie rurale vis-à-vis de la vie urbaine est primordiale dans le cadre de la création de moyens.
« Ureizer schafen » Max Hahn (DP) se propose de créer des incitations pour les différents publics.
« Mir hunn einfach keng Transitioun juste am Moment » – tel est le constat de Sam Tanson (déi gréng) qui plaide pour une réforme fiscale en mentionnant des idées bien concrètes comme des impôts sur le capital, un leasing social des voitures électriques, un préfinancement des aides, une continuation de la taxe CO₂ ».
« Iergendwann muss ee verschidde Praktike verbidden » – Gary Diederich (déi Lénk) se prononce clairement pour une interdiction des vols à courte distance.
« Faire cet effort ensemble » - Franz Fayot (LSAP) rappelle l’importance du principe pollueur-payeur pour prendre à bord tous les acteurs. Il défend également une imposition du capital à partir d’un seuil bien défini.
Sven Clement (Piraten) ferme cette dernière thématique de la soirée en pointant l’importance d’une taxation socialement juste.
Mesures concrètes : oui ou non ?
Les candidats devaient ensuite voter pour ou contre certaines mesures qui leur étaient proposées. Les deux seuls moments de consensus entre les partis : mettre en place des conseils citoyens institutionnalisés sur le modèle de la communauté germanophone en Belgique et investir massivement dans une agriculture écologique !
One Planet Luxembourg continue son action !
La soirée s’est clôturée par l’appel vibrant de la jeune Laly Chivard aux politiques de prendre en considération les intérêts des générations qui viennent dans leurs décisions pour les cinq prochaines années. Les 100 partenaires de One Planet Luxembourg, et à leur tête le Nohaltegkeetsrot, sont largement satisfaits de l’événement qui a mobilisé une large assistance aux Rotondes et en ligne. Ils espèrent qu’il aura un impact sur le contenu des négociations de coalition. Mais la dynamique enclenchée avec la construction de la communauté One Planet Luxembourg, toujours plus nombreuse, ne va cependant pas s’arrêter là et continuera à faire pression pour que la prochaine législature soit celle de l’action !
À propos de One Planet Luxembourg
One Planet Luxembourg symbolise à la fois le but (les ressources d’une seule planète) et la coalition (agissons ensemble) formée suite à l’appel du Nohaltegkeetsrot lancé le 26 janvier dernier à tous les acteurs de la société luxembourgeoise. En signant le Manifeste One Planet Luxembourg, il s’agit donc de faire pression sur la politique afin qu’elle prenne en compte les questions de climat, biodiversité, consommation de ressources et la nécessité d’une transition qui soit sociale et juste dans les futurs programmes de coalition, que ce soit au niveau communal, national ou européen. Son mot d’ordre est „Eng Äerd, eng Politik, eng Gesellschaft“, dans l’optique des générations futures et parce que cette législature sera décisive.
Photos : © Philippe Reuter, One Planet Luxembourg