Un challenge initié par le client final
Le monde du chauffage fait sa révolution. En cause, la digitalisation qui permet de connecter les appareils pour des services plus efficaces et l’innovation technique qui ouvre de nouvelles perspectives, plus durables, en matière de production de chaleur.
Interview de Günter Krings, directeur d’agence chez Viessmann Luxembourg
Il semblerait que la digitalisation soit en train de bouleverser le monde du chauffage. Comment percevez-vous cette tendance ?
C’est en effet un des grands thèmes du moment. Nous avons d’ailleurs invité nos clients installateurs à participer à un forum que nous avons organisé en juin dernier sur le sujet à la Chambre des Métiers. Ce forum était l’occasion pour nous de leur expliquer notre démarche en la matière au niveau de nos usines, de nos produits et de nos services.
En quoi les nouvelles technologies impactent-elles vos processus industriels ?
Dans nos usines, nous appliquons désormais ce que nous appelons l’industrie 4.0, qui consiste en la connexion entre tous les systèmes de production, de gestion et de planification. Par ailleurs, la production est de plus en plus automatisée : nous avons acquis les premiers robots qui se promènent de manière tout à fait libre dans l’usine et non sur des rails. Ils regardent autour d’eux, déplacent des palettes…
Quelle évolution la digitalisation entraîne-t-elle au niveau de vos produits et de vos services ?
En ce qui concerne nos produits, nous avons commencé à équiper tous nos générateurs de chaleur d’une connexion Internet WiFi ou LAN pour que les utilisateurs puissent gérer leur chauffage à distance via une application mobile, mais aussi pour que les installateurs puissent détecter et identifier les pannes sans se déplacer. Ils peuvent ainsi réagir beaucoup plus rapidement en réduisant les déplacements inutiles liés au diagnostic et en emportant directement les pièces de rechange nécessaires. La connexion des installations permet donc de gagner du temps, d’améliorer le service et, surtout, de fidéliser le client final.
La digitalisation nous permet également de proposer de nouveaux services à nos clients installateurs. Nous avons, par exemple, mis en place une interface Web qui leur donne accès aux documents comptables (offres, factures, bons de commande, etc.), ainsi qu’à des schémas électriques, des listes de pièces détachées, des notices de dépannage et autres fichiers qui peuvent aider le dépanneur lorsqu’il est sur le terrain. Cet outil intègre même un lecteur de codes-barres qui lui permet de commander très facilement la pièce dont il a besoin. Nous la mettons ensuite à sa disposition dans notre succursale à Steinsel de manière à ce que le dépannage soit plus rapide et plus facile aussi bien pour l’installateur que pour le client final.
Quelles sont les réactions face à cette complexité grandissante des systèmes de chauffage et de régulation ?
De notre point de vue, il s’agit d’un challenge initié par le client final : la jeune génération ne veut plus d’un thermostat placé sur le mur de son salon, mais souhaite une application mobile qui lui donne toutes les informations en temps réel. Nous proposons des formations dédiées aux installateurs, aux architectes, aux bureaux d’études et nous avons une équipe d’ingénieurs et de techniciens qui accompagnent l’étude et la mise en route de ces systèmes qui deviennent de plus en plus sophistiqués. Et je dois dire que la plupart de nos clients suivent les tendances et s’inscrivent à nos formations. La preuve en est le succès remporté par notre forum sur la digitalisation qui a réuni une soixantaine de personnes.
J’ai noté que vous ne parliez pas de chaudière, mais de générateur de chaleur. Pourquoi ?
Parce qu’aujourd’hui, nous nous chauffons de moins en moins avec de la chaleur issue de la combustion de sources d’énergies fossiles (donc par des chaudières), mais en utilisant davantage les sources d’énergie renouvelables. Les pompes à chaleur ont le vent en poupe. Elles utilisent l’énergie gratuitement disponible dans l’environnement et fonctionnent à partir d’électricité qui peut être produite via un système photovoltaïque éventuellement couplé à une batterie, tous deux disponibles dans notre gamme. Être totalement autarcique, produire et stocker soi-même l’énergie dont on a besoin pour se chauffer et s’éclairer à partir du vent ou du soleil est donc d’ores et déjà techniquement possible.
L’introduction du standard de construction passif induit-il des changements dans la manière de se chauffer ?
Évidemment. Les appareils que je viens d’évoquer sont également disponibles avec une puissance assez faible, ce qui va de pair avec les bâtiments basse énergie et passifs qui sont très peu gourmands en énergie thermique et le sont aussi de moins en moins en électricité.
En matière d’innovation technique, y a-t-il des produits dans votre gamme qui se démarquent ?
Nous sommes les premiers en Europe à commercialiser une pile à combustible (fabriquée en série par Panasonic et vendue à 60 000 unités au Japon). Associée à notre chaudière gaz à condensation, elle permet de disposer chez soi d’une installation de micro-cogénération.
Nous proposons également des pompes à chaleur utilisant de la zéolite, un cristal qui a la particularité de s’échauffer fortement en présence d’humidité, ainsi que des collecteurs solaires thermiques qui deviennent partiellement « aveugles » en cas de surchauffe, évitant ainsi au système de souffrir. Viessmann a d’ailleurs déposé un brevet sur ce produit.
Nos pompes à chaleur géothermiques associées à un réservoir qui stocke la chaleur captée en automne sous forme de glace pour la restituer en hiver sont, elles aussi, intéressantes car elles évitent des forages coûteux - et d’ailleurs interdits sur près de la moitié de la surface du pays pour préserver les nappes phréatiques. Nous en avons déjà installé une soixantaine au Luxembourg dont une dans le bâtiment Neobuild.
Est-ce que vous continuez à innover sur des produits plus traditionnels ?
Bien sûr. Nous avons développé des pompes à chaleur hybride, qui associent une pompe à chaleur, une chaudière gaz ou fioul et un système de régulation intelligent qui détermine la meilleure source d’énergie à utiliser.
Toutes nos nouvelles chaudières gaz à condensation s’adaptent automatiquement à différentes qualités de gaz, ce qui signifie qu’il n’y a aucun risque de panne ou de baisse de rendement si du biogaz est injecté dans le réseau de gaz naturel urbain.
Sur la photo : Günter Krings
Source : NEOMAG
Consultez en ligne NEOMAG #01 octobre 2016
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