Le bois, un matériau innovant dans les nouvelles constructions
Soucieuses de construire des bâtiments plus sains ou d’utiliser des technologies et des matériaux qui réduisent l’empreinte carbone, tout en garantissant des performances optimales, certaines sociétés développent des concepts innovants de construction en bois.
Interview de Mathieu Fenucci, Head of Department Fire Safety chez Seco Expert
Quels sont les avantages du bois comme matériau de construction ?
Le bois possède de nombreux avantages tels que sa faible empreinte carbone, son cycle de vie ou encore sa capacité technologique d’assemblage innovant. Il est également moins polluant, source de moins de nuisance sur chantier et ses déchets sont revalorisables.
Cependant, il suscite encore des craintes par rapport à certains de ses comportements. Comme tout matériau innovant dans un domaine, les prescriptions qui réglementent la construction des bâtiments en bois restent restrictives. En l’absence de retour d’expérience dans le temps, ces dernières restreignent le développement de ce nouveau mode de construction.
Quelles sont précisément les particularités à prendre en compte lorsqu’on utilise du bois ?
Dans toute construction, en amont du compartimentage ou de l’évacuation de personnes, le critère principal à considérer est la stabilité au feu. Il s’agit du critère « R » dans le jargon technique de la sécurité incendie. C’est ce qui va définir le temps pendant lequel le bâtiment va rester en place, alors même qu’une agression thermique se développe, tel qu’un incendie. Le bois possède une température limite, d’environ 300 °C, au-delà de laquelle il perd sa capacité de stabilité au feu. Cette température est inférieure à celles des autres matériaux usuellement utilisés dans la construction qui est de l’ordre de 500 °C.
Le bois est un matériau combustible, c’est-à-dire qu’il subit une dégradation thermique suite à une agression thermique et/ou oxydante (l’oxygène jouant un rôle de comburant). Sa structure et ses propriétés thermo-physiques et mécaniques peuvent être affectées par cette dégradation thermique.
De ce fait, il faut notamment veiller à deux aspects techniques autour de ce matériau :
- La résistance au feu correspond au temps durant lequel les éléments de construction peuvent jouer leurs rôles malgré une agression thermique. Il s’agit de sa capacité portante. Ce critère est cependant vérifié pour tout type de matériau.
- La réaction au feu est l’aliment qui peut être apporté au feu et au développement de l’incendie. Cet aspect est très important dans le cas d’un matériau combustible comme le bois. Tous ces éléments doivent être maîtrisés et évalués afin de garantir une construction en parfaite sécurité.
Mathieu, quelle plus-value SECO Expert peut apporter à ces types de conceptions innovantes ?
En phase d’étude, il convient de prendre en compte tous les paramètres existants afin d’optimiser le concept de construction et de sécurité incendie. Nos experts regardent les aspects de stabilité au feu (ou capacité portante) afin d’évaluer avec les architectes et maîtres d’ouvrage le dimensionnement nécessaire des éléments porteurs du bâtiment.
D’autres aspects entrent en ligne de compte dès la phase d’étude comme le type de structure réellement envisagée (bois, système mixte bois/béton, etc.). En vue d’optimiser le concept vis-à-vis de la sécurité incendie, nous étudions en détail les documents de classement et rapports d’essais des produits choisis afin de déterminer le comportement du système avec précision et les températures limites admissibles. Afin de justifier les mesures de sécurité optimisées choisies pour chaque projet, nous présentons, lors de réunions avec les autorités compétentes, les systèmes qui vont être mis en œuvre. L’objectif étant de leur exposer la réaction de ces systèmes vis-à-vis du feu en détaillant leurs comportements. Nous orientons donc nos études en fonction des spécificités de chaque système.
Selon l’expérience SECO, quelle serait la solution optimale ?
Par souci de sécurité, la solution d’ajouter systématiquement un système de sprinklage est aujourd’hui une possibilité qui reste onéreuse à mettre en œuvre. Elle permet effectivement de limiter la température inférieure à 300 °C. Cependant, le sprinklage génère d’autres problématiques comme l’humidité. En effet, les dégâts des eaux liés à un sprinklage dans le cas d’un incendie peuvent être plus pénalisants qu’un incendie. L’usage de solutions mixtes est une possibilité idéale qui permet de tirer les bénéfices du bois tout en limitant certaines contraintes. Nous avons étudié un de ces systèmes spécifiques, le CREE, pour lequel la société de construction CDCL s.a. dispose de l’exclusivité pour le territoire luxembourgeois. Il s’agit d’un système hybride bois-béton qui a été testé en tant que mur ou plancher. Cette technique permet de créer des modules porteurs qui, une fois assemblés, permettent la mise en œuvre d’un bâtiment. Dans le cadre de ce projet, nous avons étudié avec précision les rapports d’essais et le comportement des matériaux lorsqu’ils sont soumis à un feu conventionnel : déformations, transfert thermique, dégagement de fumée, vitesse de carbonisation du bois, inflammation en face non exposée. Tous ces éléments ont permis de démontrer que le système permettait d’atteindre des durées de capacité portante sans protection complémentaire, qu’elle soit passive (plaques, flocage, etc.) ou active (ex : sprinklage), ce qui peut représenter pour le maître d’ouvrage une réelle économie financière.
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Article tiré du NEOMAG#36
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