Quand la science est mise au service de l’aménagement paysager
Rencontre avec Malika Pailhès, biologiste et cofondatrice de Sound Ecology, et Aurélie Mertens, cofondatrice de Cita Verdi.
D’un côté Cita Verdi, entrepreneur architecte paysagiste dont la philosophie est de « faire des choses qui ont du sens » et convaincu qu’« on peut mener très loin l’idée des murs végétaux en termes de biodiversité quand on s’y connaît en botanique et en biologie, mais surtout en systèmes d’arrosage ». De l’autre Sound Ecology, une équipe de biologistes, consultants en environnement, spécialistes des plantes, insectes, oiseaux, chauve-souris qui mettent leurs compétences au service de projets de végétalisation « peu intensifs à tous points de vue : biodiversité, réduction de la consommation en eau, lowtech, réduction des îlots de chaleur, amélioration de la qualité de l’air ». Leur collaboration est animée par la même volonté de proposer des aménagements paysagers, dont des toitures et murs verts, ayant une réelle incidence positive sur la biodiversité ou la qualité de l’air.
« Apporter du vert est, de toute façon, positif, que ce soit du vrai ou de l’artificiel et quel que soit le type de plante. La seule couleur verte suffit à améliorer l’humeur », introduit Aurélie Mertens, cofondatrice de Cita Verdi, « mais le fait d’apporter de la biodiversité et d’attirer des insectes en extérieur est primordial, tout comme le fait de dépolluer l’air et de renforcer le bien-être en intérieur ».
Avec Sound Ecology, et en particulier sa cofondatrice, Malika Pailhès, botaniste de formation, elles partagent la même philosophie et collaborent sur différents projets, dont un projet pilote de toiture verte axée sur la biodiversité à Mondorf-les-Bains. Dans ce cadre, Sound Ecology est en train de développer, avec l’entreprise Cloos, un substrat local à base de matière organique et de roche calcaire issue de la carrière de la ville frontalière française de Volmerange-lès-Mines. Substrat qui a été mis en œuvre par Cita Verdi à Mondorf et qui va maintenant être optimisé. Des semences indigènes ont été utilisées pour recréer une prairie fleurie locale et des micro-habitats procurant abri et nourriture aux insectes ont été aménagés à base de bois procuré par le service du parc de Mondorf et de pierres fournies par Cloos, avec les conseils d’une entomologiste collaboratrice de Sound Ecology.
Autre projet, un mur végétal à Sanem qui intègre jusqu’à 35 plantes par m2, avec de nombreuses plantes à fleurs, ce qui permet d’offrir refuges et nourriture (nectar) à divers insectes, pollinisateurs et autres. Une partie de ces plantes (une dizaine d’espèces) sont issues de la pépinière belge Apiflora, qui a pour particularité d’aller chercher des semences sauvages en forêt, « donc des plantes plus résilientes car parfaitement adaptées à leur environnement naturel », précise Aurélie Mertens. « Cette démarche est courageuse de la part de ces producteurs car le pouvoir de germination des plantes sauvages est néanmoins beaucoup plus aléatoire, d’une plante à l’autre, que celui des plantes horticoles sélectionnées pour pouvoir être produites à grande échelle, de manière standardisée et sans surprise. Les variétés horticoles ont subi des modifications génétiques via la sélection par l’homme au cours du temps. La rose que nous connaissons, par exemple, est une fleur créée par l’Homme ; elle a été stimulée pour avoir un maximum de pétales pour le plaisir des yeux, mais cela rend l’accès au nectar beaucoup plus difficile pour les insectes que sur une rose sauvage qui n’a que cinq pétales », dit Malika Pailhès. « Mais nous ne travaillons pas à 100 % avec des variétés indigènes car elles sont moins attractives visuellement », ajoute Aurélie Mertens.
Dans un futur projet de mur végétal à Wiltz, plantes indigènes et plantes horticoles ne seront pas mixées comme c’est le cas à Sanem, mais les plantes indigènes seront plantées dans une petite zone dédiée aux pollinisateurs, de manière à ce que ces derniers la voient de loin, selon l’hypothèse d’une étudiante de l’université de Liège.
Valeur ajoutée du travail de collaboration entre Sound Ecology et Cita Verdi, Sound Ecology propose, à la fin de chaque intervention, un relevé botanique et zoologique régulier qui consiste à évaluer le bon fonctionnement de l’écosystème qui a été créé (installation réussie de la végétation, suivi de la diversité des insectes qui visitent l’aménagement). Cela permet aussi aux clients de valoriser leur investissement longtemps après l’installation en tant qu’organisme vivant.
Mélanie Trélat
Extrait du NEOMAG#53
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