Quand participation citoyenne et durabilité redessinent Dudelange

Quand participation citoyenne et durabilité redessinent Dudelange

Rencontre avec Cathy Mambourg, architecte de la Ville de Dudelange, et Audrey Vit, chef de projets NeiSchmelz au Fonds du Logement.

La Ville de Dudelange vise une certification de constructions durables pour tous ses projets de construction futurs et est en train d’établir une charte afin de rester en ligne avec les principes directeurs qu’elle s’est fixés : participation citoyenne, durabilité, conservation du patrimoine, bien-être des habitants, entre autres. Des principes qui sont déjà mis en œuvre dans le plus grand projet en cours de développement avec le Fonds du Logement : la réhabilitation des friches industrielles NeiSchmelz.

Le processus de participation citoyenne accompagne les différents projets d’urbanisme et de construction de la Ville de Dudelange. Les habitants des quartiers concernés et avoisinants sont consultés à différentes étapes de la planification, lorsque les sujets sont suffisamment mûrs. Par exemple, pour le quartier NeiSchmelz, « au moment de l’élaboration des PAP, les choses étaient encore très peu concrètes pour les participants qui ne voyaient rien d’autre que la friche, mais ils ont été impliqués dans des actions transitoires qui, finalement, par ricochet, sont devenues des marqueurs forts dans le développement progressif du site. Les citoyens font également mûrir le projet du côté de l’aménageur », sourit Audrey Vit, chef de projets NeiSchmelz au Fonds du Logement. « Les réunions d’information publiques mobilisent une centaine d’habitants qui émettent souvent des questions très pertinentes, et dans les workshops, c’est une belle dynamique qui s’installe avec des participants très positifs et impliqués. Ces échanges avec les riverains sont réellement constructifs pour nous car nous avons besoin d’être sensibilisés à leur façon d’appréhender ou de vivre les choses, qui peut différer de notre vision professionnelle ».


« Il y a aussi les habitués du lieu, ceux qui l’ont déjà investi et l’occupent au quotidien, comme le collectif d’artistes Vewa, qui portent un tout autre regard sur le projet. Pour définir un programme pour le hub social, situé dans un bâtiment historique au cœur du quartier et qui sera un des pivots du site, nous avons sollicité toute une panoplie d’acteurs comme des responsables d’associations et ceux de la brasserie Kantin située dans l’ancien hall des locomotives. Nous voulons appliquer cette même approche à chaque bâtiment qui sera construit par la Ville de Dudelange sur le site NeiSchmelz et la décliner à tous les nouveaux quartiers et bâtiments de la ville. »

Cathy Mambourg, architecte de la Ville de Dudelange

La prochaine étape de cette consultation citoyenne aura lieu dans quelques mois, quand le sol commencera à être remanié pour préparer l’accueil des futurs bâtiments et laissera apparaître les nouvelles routes et espaces publics. Les bâtiments historiques conservés servent aussi de points d’ancrage pour projeter le public dans le futur quartier.

La qualité de vie est au cœur même du projet NeiSchmelz. Elle est suscitée par la grande place accordée aux axes de mobilité douce, aux parcs et aux jardins publics, aux aires de jeu et espaces récréatifs, ainsi qu’au maintien des bassins historiques qui, en plus d’avoir vocation à retenir les eaux pluviales et à créer des îlots de fraîcheur, apporteront une certaine harmonie au site. Sur les 33 hectares qu’occupe le quartier, le taux d’occupation des bâtiments à construire n’est que de 50 %.

Le bien-être des habitants se définit aussi par la facilité d’accès aux transport publics. La ligne de chemin de fer qui longe le site est accessible via la gare existante du quartier Italie et la voiture sera invitée à rester en périphérie du quartier. « Nous avons fait en sorte de privilégier les moyens de déplacement alternatifs et de capitaliser les transports en commun disponibles, de manière à inciter les usagers à les utiliser. Nous avons également prévu que la voiture ne s’introduise que marginalement à travers le quartier, pour faciliter et sécuriser la mobilité active et les déplacements pédestres », explique Audrey Vit.

Enfin, la qualité de vie résultera aussi de l’omniprésence de la nature. La végétation sera réintroduite sur le site, avec une sélection d’espèces endémiques en adéquation avec la flore préexistante. Des connexions vers la réserve naturelle, via des passerelles, seront créées sur toute la longueur du quartier.

Les bilans biologiques réalisés en amont des travaux ont révélé que la nature a repris ses droits et que la biodiversité s’est développée depuis que l’industrie a quitté les lieux il y a plus de 15 ans. « En amont des travaux, il nous a fallu organiser le déplacement des lézards à tel endroit, le maintien de grenouilles spécifiques à tel autre, ainsi que la création en périphérie du site d’habitats pour la faune, et notamment les oiseaux », indique-t-elle.

L’eau traverse tout le site. Le ruisseau présent avant que l’industrie ne prenne possession des lieux, actuellement sous terre et visible uniquement à hauteur du CNA, du château d’eau et du Pomhouse, retrouvera sa place. L’espace public sera aménagé de sorte que l’eau puisse circuler à l’air libre, du sud au nord, tout le long des 1,5 km sur lesquels s’étend le quartier, agrémentant les promenades publiques. En deux endroits, le ruisseau se présentera dans un lit proche du naturel. Dans les espaces publics en revanche, dans le laminoir notamment, ses abords seront aménagés, intégrés dans les rues. Cela permettra de recréer un couloir vraiment écologique, adapté à la faune qui occupe ce ruisseau.

L’économie circulaire est également une ligne rouge dans les programmes de construction de la Ville de Dudelange, a l’instar du hall polyvalent récemment aménagé en face du cimetière. Modulaire, il pourra un jour être démonté pour être reconstruit dans le quartier NeiSchmelz.

L’approche cradle to cradle se traduit, sur le site NeiSchmelz, par la réutilisation d’un maximum de matériaux issus de la déconstruction des bâtiments présents sur le site. « Dans le cadre de la préservation du patrimoine historique, certains bâtiments seront remaniés, notamment le laminoir dont on ne conservera que le squelette métallique visible et qui sera complètement ouvert sur ses 600 mètres de long. Nous allons faire en sorte que l’énorme quantité de matériaux à retirer ne quitte pas le site, que les briques deviennent des pavés pour l’espace public ou des matériaux utilisés sous les voiries, par exemple. Dans la même optique, nous avons veillé à retravailler les volumes de terre sur site de manière à limiter l’envoi en décharge. Nous capitalisons sur la matière initiale en la réintégrant dans le projet de demain », explique Audrey Vit. « Dans les projets ultérieurs, nous réfléchirons à la flexibilité d’usage des bâtiments. Par exemple, nous développerons les parkings en prévoyant la possibilité, si les usages vont dans le sens d’une réduction de l’usage de la voiture dans notre quotidien, de les convertir en habitations ou autres. Par ailleurs, compte tenu de l’élasticité des cellules familiales d’aujourd’hui, nous imaginons concevoir des logements qui puissent être mutualisés ou divisés ».

Quant au concept énergétique du projet, il consiste en un mix énergétique visant la neutralité carbone et basé sur la production d’électricité solaire avec des panneaux photovoltaïques posés sur le laminoir, combinés dans un premier temps avec des pompes à chaleur et complétés potentiellement par de la géothermie de moyenne profondeur dans les prochaines années.

Mélanie Trélat
Extrait de Neomag#65

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Publié le jeudi 7 novembre 2024
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