Le dossier du mois

Une thématique dans chaque #DossierDuMois, avec la rédaction d’Infogreen et l’expertise de nos partenaires

Publié le 3 septembre 2018
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septembre 2018

Construire demain

« Les hommes se rassemblent dans les villes pour vivre. Ils y restent ensemble pour jouir de la vie », disait Aristote.

Construire demain
Dessine-moi la ville du futur
Dessine-moi la ville du futur

« Les hommes se rassemblent dans les villes pour vivre. Ils y restent ensemble pour jouir de la vie », disait Aristote. Certes, mais l’espace se resserre sur des citadins de plus en plus nombreux. Alors que la Banque mondiale prévoit que nous serons 6 milliards à habiter en zone urbaine en 2050 (soit 7 personnes sur 10), comment ne pas y étouffer et continuer à « jouir de la vie » ?

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C’est la question que nous avons posée à différentes personnalités actives dans une diversité de domaines, qui sont autant de composantes de l’organisation complexe qu’est une ville. Qu’ils soient éco-social designer, architecte, ingénieur, spécialiste de la mobilité ou sportif de haut niveau, ils ont en commun d’avoir livré une vision positive de la ville de demain. Tous l’imaginent comme un espace où il fera bon vivre.

De toute façon, on n’a pas le choix, s’accordent-ils tous à dire, la ville de demain devra être « soutenable » dans tous les sens du terme. Parmi les aspects qui ressortent : le lien social, à reconstruire, et l’environnement, à préserver, avec pour cible le bien-être des usagers.

Pour y parvenir, il n’y a pas une, mais une multitude de solutions, qui devront s’imbriquer. La plupart existent déjà, il ne reste plus qu’à les déployer : construire les bâtiments avec des matériaux biosourcés, recyclables et sains ; repenser intelligemment la répartition et l’utilisation des espaces, miser sur la flexibilité et la modularité ; s’appuyer sur la technique et les outils digitaux pour mieux gérer l’énergie ; exploiter les espaces perdus ; développer des méthodes d’agriculture qui rapprochent consommateur et producteur ; laisser sa place au végétal pour préserver le lien qui existe de manière intrinsèque entre l’Homme et la nature ; adopter des nouveaux modes de déplacement, plus actifs, plus doux, moins individualistes et plus efficaces ; concevoir les espaces publics de manière collaborative pour que les usagers se les réapproprient ; favoriser la mixité dans tous les domaines : sociale, générationnelle, fonctionnelle.

Mélanie Trélat

Deux éléments fondamentaux : le collectif et la nature
Deux éléments fondamentaux : le collectif et la nature

Johanna Jacob, fondatrice de Common Paradox, nous propose une vision de la ville comme microcosme appartenant à la nature où le retour à un esprit collaboratif est nécessaire.

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« En tant qu’éco-social designer dans les domaines de l’architecture et de l’urbanisme, mon rôle est d’œuvrer à ce que les villes soient des lieux de vie agréables. La ville de demain, je l’imagine donc de manière positive. Pour moi, cela repose sur deux éléments fondamentaux : le collectif et la nature.

La ville est notre habitat au même titre que l’est la maison. On devrait s’y sentir bien, comme chez soi. Dans un monde où l’on est particulièrement centré sur soi-même et où l’on perd le sens du collectif, la ville n’est plus perçue comme un lieu public, de rencontre, mais trop souvent comme un lieu que l’on ne fait que traverser et qu’on utilise « à sens unique » ou en « one shot ». Non seulement notre société actuelle consomme le territoire comme si ses ressources étaient illimitées, mais en plus nous avons tendance à ne lui attribuer qu’un rôle fonctionnel, en négligeant son rôle relationnel. Or, nous sommes bien des êtres sociaux.

Une ville idéale ne peut donc se concevoir sans réflexion profonde sur notre société, nos relations en tant qu’êtres humains et notre relation à notre environnement naturel. Pour illustrer mes propos, imaginez un arbre avec ses racines bien ancrées qui représentent notre relation à la nature ; son tronc solide et stable qui s’apparente au vivre ensemble et à l’organisation collective ; ses branches diverses et variées qui symbolisent les nouvelles technologies, les énergies renouvelables, les produits bio, le do it yourself, le fait de ralentir, de consommer moins, etc. ; et ses feuilles légères et lumineuses qui correspondent aux projets, initiatives innovantes et autres actions du quotidien qui voient le jour et émergent ici et là. Je remarque que ces nouvelles technologies et les alternatives (les branches de l’arbre) sont mises en avant de manière très volontariste. Or, ce ne sont que des outils, certes très intéressants, mais qui doivent rester au service de la société, et non l’inverse. Pour parvenir à mieux les utiliser, une réflexion sur le vivre ensemble est nécessaire (le tronc de l’arbre). Cela demande beaucoup d’efforts car notre société ne nous a pas éduqués à collaborer, mais plutôt à être les meilleurs, à être compétitifs, à ne pas faire d’erreur, ce qui nous a menés à l’individualisme et à une économie linéaire, avec toutes les conséquences que nous connaissons.

Un des meilleurs moyens pour revenir à la notion de bien commun et renforcer notre tronc est de nous resituer en tant qu’être appartenant à la nature (les racines de l’arbre). Nous séparons souvent nature et urbanisme, comme si la ville était contre la nature, alors qu’en fait l’Homme fait partie de la nature et la ville est son habitat, au même titre que le nid est celui de l’oiseau. Pour construire notre habitat, nous devons faire avec les paramètres de la nature, pas en luttant contre, mais en travaillant avec, et en les intégrant dans le projet. Nature et ville ne sont pas contradictoires ou exclusives. Pour moi, la ville idéale, la ville de demain, est en harmonie avec la nature.

À titre d’exemple, Common Paradox a réalisé le design d’un projet de renaturation de deux rivières situées derrière le Pall Center à Oberpallen. Ce terrain a été acquis dans le but d’y cultiver des fruits et des légumes pour le restaurant du centre commercial, mais il se trouve qu’il est régulièrement inondé. Nous aurions pu canaliser les rivières, mais nous avons plutôt choisi d’élargir leurs lits et de donner plus d’espace à l’eau pour permettre à son niveau de fluctuer dans des zones qui peuvent se remplir et se vider, et conserver ainsi des espaces cultivables. En plus de la production, une des intentions est de sensibiliser l’utilisateur à la nature en lui permettant de s’y reconnecter : lorsqu’il traverse le parc et parcourt les chemins sur pilotis, il vit une expérience physique qu’il va emporter avec lui. De plus, les avantages et les services écosystémiques que fourniront la faune et la flore aquatiques qui y prendront place sont nombreux : régulation thermique, « gestion » naturelle des parasites pour la culture maraîchère bio, diminution des coûts d’entretien, beauté du paysage, etc. Tous les acteurs du territoire sont sollicités et invités à participer à ce projet et leur excellente connaissance de leur environnement permet de le nourrir.

Nous avons également lancé, le 8 novembre dernier (date de la journée mondiale de l’urbanisme), un projet intitulé Arlon Identity. Il vise à co-créer une image positive de la ville d’Arlon avec la diversité des acteurs présents sur le territoire ciblé : citoyens, politiques, entreprises, associations, etc. Ce projet s’étale sur 3 phases de 6 mois durant lesquelles des espaces d’expression sont offerts à la population. Durant la phase de diagnostic qui s’est achevée en mai avec la publication d’un rapport illustré, nous avons occupé un rez-de-chaussée commercial proposant une exposition interactive qui présentait différentes facettes de la ville. Des citoyens se sont intéressés au projet et ont émis des propositions d’animation. C’est ainsi que des ateliers pour enfants, des concerts, des petits-déjeuners à base de produits locaux, des panels de discussion, des quiz, etc. ont été co-organisés avec les citoyens. Depuis novembre 2017, plus de 600 personnes ont participé au projet.

Pour la deuxième phase, la vision, nous organisons la tournée Arlon IdentiTOUR. Il s’agit d’un atelier de co-création qui se reproduira à 4 reprises à des dates et dans des lieux différents d’Arlon de juillet à septembre. Le thème : « Vos idées pour la ville et les villages de demain ». L’intention est de faire émerger des idées qui deviendront des projets concrets accessibles aux citoyens et à tous les acteurs du territoire. Définir quel « Arlon de demain » nous souhaitons voir et vivre, augmente les chances de s’en approcher. Parce que cette vision sera partagée et collective, chacun pourra agir dans son domaine tout en avançant ensemble dans la même direction. Cette vision devra évidemment rester flexible et résiliente afin d’intégrer des enjeux sociaux, économiques et environnementaux d’aujourd’hui et de demain. L’entraide et la collaboration sont au cœur de la réflexion.

Avec ce projet pilote, nous développons en fait un véritable outil d’aide à la décision pour les autorités publiques, un outil qui est accessible au plus grand nombre. Car il s’agit bien de créer des ponts entre les acteurs et de réinstaurer le dialogue sur des sujets d’intérêt général. Nous l’avons initié dans la commune où nous vivons pour montrer les bénéfices qui en ressortent, montrer que c’est possible, que travailler ensemble pour le bien commun, cela fonctionne ! Nous espérons en inspirer d’autres que nous pourrons accompagner étape après étape grâce à notre méthodologie et à notre philosophie ».

Mélanie Trélat
Photo : Fanny Krackenberger

A resilient society – how urban design can have an impact on mental health and wellbeing.
A resilient society – how urban design can have an impact on mental health and wellbeing.

One in four people experience mental health problems at least once in their life. Among these, people who live in cities have an almost 40 % higher risk of depression, over 20% more anxiety and double the risk of schizophrenia, in addition to more loneliness and stress. The city of tomorrow therefore needs to promote good mental health by sustainable city design.

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The Centre for Urban Design and Mental Health , a start-up think tank, has published a policy brief which should be taken into account by urban planners, managers, designers and developers. The Mind the GAPS Framework sets out the main elements to be considered when planning to put people’s mental health and wellbeing at the forefront :

Green Places │ Active Places │ Pro-Social Places │ Safe Places

Green Places Access to natural settings in neighbourhoods can reduce stress, improve social and cognitive functioning. This is in line with Edward Wilson’s Biophilia theory which recognizes that people have a biological need to be in contact with other species. Good urban design therefore needs to integrate green spaces and walkable spaces into all design so that people can integrate regular exposure to urban natures.

Active Places It is well known that exercise can be as effective as anti-depressants for treating mid-moderate depression. Therefore, active transport is on of the biggest opportunities by increasing safe walking and cycling routes, bike parking, reducing vehicle speeds and good public transport. It can range as far as simple measure such as making stairs more attractive that escalators.

Pro-Social Places Social interaction has a positive impact on our self-esteem, self-confidence and empathy. Belonging to a community can help intellectual performance as well as addressing feelings of loneliness.

In urban design terms, the possibilities to encourage social interaction are unlimited and range from small and cheap to important measures. Overall quality is more important than quantity – mixed uses, fine-grained streets, street benches, chess tables ….

Safe Places Everybody wants to feel safe and feelings of security in daily life is an important contribution to mental health and wellbeing. So in order to avoid chronic stress from feeling unsafe, urban design should include visibility of the location, clear public routes, no empty spaces that don’t clearly show whether they are public or private spaces. Including clear landmarks can have positive impacts for navigation of people with dementia.

With Luxembourg moving to a resilient way of planning, how can the impact of urban design on mental health be measured ? In light of the recently approved Loi du 15 mai 2018 relative à l’évaluation des incidences sur l’environnement et portant modification, the Environmental Impact Assessment has to consider the impact of a project of a certain size on human health. For practitioners and EIA specialists, it will be vital to consider that human health does not just refer to physical health but also mental health. This way, reasonable and meaningful measures can be integrated as mitigation measures into projects from the start.

Myriam Hengesch is an urban planner with 15 years of experience working in planning consultancy in Scotland and Luxembourg. Myriam Hengesch is heading up the planning and urban design team at Luxplan in Luxembourg since 2014.

Source : High Line, New York City, Image via nyclovesnyc.blogspot.com

Myriam Hengesch / L.S.C Engineering Group S.A

Un écoquartier, qu'est-ce que c'est ?
Un écoquartier, qu’est-ce que c’est ?

Un écoquartier ou quartier durable, c’est un quartier intégré dans le tissu urbain environnant et ouvert sur la ville. Pour être défini comme tel, il doit prendre en compte les principes du développement durable tels que la mixité des fonctions, la rationalisation de l’énergie, le respect de l’environnement (gestion de l’eau, paysage et biodiversité écologique), la mobilité douce, l’économie des sols, des matériaux et des processus, ainsi que la mixité intergénérationnelle et sociale des populations permettant une bonne qualité de vie des habitants pour un faible impact environnemental.

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Un projet d’habitat durable se construit progressivement et se développe intrinsèquement d’un processus participatif pour être viable à long terme (concertation, ateliers/groupes de travail, pédagogie auprès des futurs habitants sur l’écoresponsabilité, charte de bonne conduite au sein du quartier, ...). Un écoquartier ne saurait être répliqué à l’identique car chaque projet répond à des enjeux et des besoins spécifiques du territoire où il est créé. Il n’y a donc pas de modèle type, mais il y a des questions et des thématiques récurrentes qu’il convient de confronter aux sites à aménager. Au cours du processus de conception urbaine, il est essentiel de poser les bonnes questions aux différentes étapes et échelles du projet, ainsi qu’aux bons interlocuteurs.

Les écoquartiers en Europe

Une volonté forte du gouvernement consiste à faire connaître, aux acteurs locaux de l’aménagement, des initiatives réussies et économiquement viables de quartiers durable dans le but qu’elles puissent inspirer et inciter leur développement sur le territoire luxembourgeois. Dans le contexte actuel où les questions environnementales, la pollution et l’épuisement des ressources constituent des enjeux planétaires il devient essentiel pour nous, concepteurs urbains, de développer et promouvoir autant que possible de nouvelles façons d’habiter qui répondent à ces enjeux. Cela se traduit par la création de quartiers sur mesure adaptés aux contextes des territoires de projets, qui se rapprochent d’un idéal de cadre de vie, souhaités par les habitants, où le partage des ressources est valorisé et qui respecte l’environnement. À ce titre, il est possible de prendre comme exemple certains projets en Europe :

  • L’écoquartier Eikenøtt-Gland en Suisse
  • L’écoquartier Giesserei-Winterthur en Suisse
  • L’écoquartier MehralsWohnen à Zurich-Oerlikon

Le quartier durable - Où en est-on au Luxembourg ?

Ces dernières années, la politique d’aménagement du Grand-Duché s’est orientée de plus en plus vers l’innovation et le développement durable. Les ambitions nationales actuelles sont de développer, à l’image des écoquartiers d’Europe, des projets créatifs et référentiels en matière de durabilité, privilégiant la mixité sociale, les énergies renouvelables et permettant la réalisation d’habitats plus qualitatifs.

Chez L.S.C., nous suivons le mouvement…

« Plan directeur Kayl Nord »

Le plan directeur Kayl Nord est un projet d’envergure (création d’environ 800 logements sur 23 ha pour une commune de 8 121 habitants en 2015) qui réunit de nombreuses ambitions en matière de développement urbain durable et innovation.
Les grandes lignes de ce projet sont :

  • développer un urbanisme en phase avec les besoins de la population ;
  • créer de nouveaux logements, équipements publics et services de proximité ;
  • renaturer la Kälbaach et aménager un parc pour tous.

Mélodie Reis, Luxplan
Anita Baum, Zilmplan
L.S.C. Engineering Group S.A

Vers l'autonomie et au-delà !
Vers l’autonomie et au-delà !

Entre villes et bâtiments, il existe un lien naturel. C’est pourquoi Infogreen a demandé à Bruno Renders, administrateur directeur général du Conseil pour le Développement Économique de la Construction (CDEC), comment il imagine la ville de demain.

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« Pour moi, la ville de demain doit être envisagée avec un regard nouveau et différent de ce que nous avons connu historiquement : la maison telle que nous la connaissons aujourd’hui doit évoluer à l’heure où l’on doit héberger de plus en plus de monde. La ville de demain doit, avant tout aspect technologique, rester humaine dans sa conception et son utilisation. Être une living city et non pas seulement une smart city. Elle doit être connectée mais, en bout de course, rester à destination de l’usager. L’humain doit comprendre la ville pour pouvoir y participer de manière collaborative.

Le caractère humain peut paraître antagoniste quand on parle de densification. Des villes comme la ville-état de Singapour ont été confrontées aux mêmes problématiques que le Luxembourg, à savoir un foncier qui n’est ni infini, ni bon marché. Elle y a répondu en combinant densification verticale, architecture de qualité et multifonctionnalité des bâtiments. Les bâtiments n’y ont plus simplement la fonction d’abri mais ils revêtent d’autres fonctions nobles qui peuvent concerner la production, le stockage de l’énergie et sa distribution grâce à des systèmes intelligents. En ce sens, les bâtiments sont au cœur de la troisième révolution industrielle de Jeremy Rifkin où l’énergie associée à Internet doit permettre de décentraliser la production.

La ville du futur doit tendre vers l’autonomie, l’autonomie énergétique et en termes d’impacts environnementaux. On peut ainsi concevoir que les bâtiments, dotés de fonctions nobles, de fonctionnalités nouvelles et améliorées, épurent l’eau plutôt que de le faire avec une vision centralisée dans des stations d’épuration. Cette eau usée peut trouver plusieurs fonctions. On peut récupérer la chaleur qui y est présente pour produire de l’énergie, utiliser certains effluents en tant que fertilisant naturel par exemple. Les bâtiments peuvent aussi épurer l’air ambiant par le biais de serres urbaines. L’urban farming couvre à elle seule plusieurs fonctions nobles. Elle permet d’épurer l’air en transformant le CO² en O², de produire des légumes en circuit court, d’apporter plus de fraîcheur en ville lors des périodes de canicule. La végétalisation de la ville est en effet un enjeu climatique autant qu’un enjeu de confort et de vie telle qu’a pu le démontrer notre récente canicule estivale.

On peut également imaginer une connexion entre les bâtiments qui ne serait pas uniquement énergétique, informatique ou technique, mais qui pourrait aussi être physique. Par exemple, on pourrait construire des routes en hauteur pour relier les bâtiments les uns aux autres, ce qui se fait dans certains pays, comme Singapour que j’ai déjà cité. Une mobilité inédite pour rapprocher les Hommes, mais aussi pour voir la ville d’une autre façon.

Des fonctions nouvelles donc qui sont autant d’opportunités pour les citoyens, mais qui ne sauront devenir concrètes qu’en adoptant une vision différente ».

Mélanie Trélat

La rue comme espace de rencontre et de partage
La rue comme espace de rencontre et de partage

David Koch, architecte urbaniste à Wiltz, nous explique comment sa commune se prépare à devenir une ville de demain.

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« Pour moi, la ville de demain est une ville où, lorsque l’on se lève le matin, on sait qu’on peut prendre son temps. Boire un café. Regarder les enfants partir tranquillement à l’école avec leurs amis et prendre de l’autonomie, sachant qu’ils ne courent aucun risque car les rues sont Auto-arm, voire Auto-frei. Principalement piétonnes, elles ne génèrent quasiment pas de particules nocives, ni de pollution sonore d’ailleurs, mais elles (re)deviennent, un espace de rencontre et de partage.

Marcher dix minutes pour rejoindre la gare où le train nous attend pour nous amener au travail. Avoir des contacts, ou ne fût-ce qu’un sourire, avec ses voisins dans la rue, avec ses collègues ou d’autres personnes qui partagent le trajet du matin. Savoir que notre journée de travail en sera d’autant plus productive et valorisante.

Et vivre sereinement, à l’opposé de la vie de beaucoup d’entre nous pour qui commence, dès tôt le matin, la course contre la montre : « dépêche-toi, on-dépose-le-petit-à-la-crèche, la-grande-à-la-primaireschoul, oh ! encore-un-bouchon/un-accident/un-chantier, pardon-je-suis-en-retard (et je n’ai pas pris de café) ». Et il n’est que 8 h 30…

Le soir, profiter d’un repas cuisiné avec les légumes que l’on cultive dans la serre installée sur le toit de notre immeuble. Discuter avec le voisin qui, lui aussi, aime y passer du temps. Être conscient que les plantations sur la toiture filtrent l’air que l’on respire qui, de toute façon, est pur parce qu’aucun matériau utilisé pour la construction du bâtiment ne contient de matière polluante. Toute une série de détails qui contribuent à la sérénité.

À Wiltz, les projets qui vont dans ce sens sont multiples. Le plus important en termes d’envergure est le grand projet de développement urbain « Wunne Mat der Wooltz », développé avec le Fonds du Logement et avec le soutien du ministère de l’Intérieur. La plus grande satisfaction que nous en tirons est celle de donner une 2e vie à un espace de la ville qui a déjà été urbanisé par le passé. Non seulement nous construisons 750 logements sans consommer d’espace supplémentaire, mais en plus nous donnons à cet ancien site industriel un nouveau visage, bien plus avenant.

Cela passe surtout par la renaturation, sur toute sa longueur, de la rivière Wooltz, qui était auparavant réduite à s’écouler entre deux murs de béton entre les bâtiments industriels. Cette renaturation s’accompagne de la création d’un parc avec une coulée verte d’une largeur imposante, véritable poumon du nouveau quartier.

Un atout de ce projet d’urbanisation d’envergure est la présence de la gare ferroviaire, dont nous allons décupler le potentiel en en faisant une plateforme intermodale qui combinera trains, bus, vélos et voitures électriques partagés. Sans compter que les nouveaux logements et espaces de travail seront accessibles à pied, dans des conditions très agréables.

Car cette nouvelle partie de la ville sera bien Auto-arm. Les automobilistes seront dirigés dans des Parkhaus se situant, pour la plupart, sous les bâtiments. Elles sont conçues comme des zones de mutualisation des véhicules, mais elles intégreront également bien d’autres services : tri des déchets, mise à disposition d’outils partagés (pourquoi acheter chacun sa foreuse quand on peut la partager ?), locaux pour organiser des Repair Café, etc.

La mutualisation et le partage sont partout facilités, jusque sur les toitures ou l’on permet aux habitants de cultiver leurs légumes dans des potagers et des serres, en fonction de la demande. L’adaptation est aussi un maître mot.

Certaines surfaces ont été pensées pour remplir d’autres fonctions que leur fonction première. C’est notamment le cas d’une partie des places de stationnement dont la hauteur de plafond a d’ores et déjà été prévue pour qu’ils puissent trouver une affectation différente si, à l’avenir, moins de parkings étaient nécessaires. Les surcoûts liés à la flexibilité sont minimes, par rapport aux économies qu’ils permettront de réaliser en cas de besoin. De plus, une liberté de mouvement est recherchée. Personne ne peut prédire avec exactitude comment un espace urbain ou une ville va se développer, mais le fait de s’être posé une série de questions en amont (et encore sans doute pas toutes !) et d’y apporter des pistes de réponses lui donne une adaptabilité qui fera sa force.

Un autre aspect très important du processus de développement est de permettre la plus grande appropriation possible des lieux par les futurs habitants comme par les riverains. Pour ce faire, une communication optimale et une approche participative sont requises. Un point d’information et de rencontre visant à la fois à informer les riverains sur les avancées des projets et à promouvoir la philosophie du nouveau quartier auprès des personnes intéressées sera mis en place dans les locaux de l’ancienne gare.

La localisation du projet est en soi un indicateur de la volonté de faciliter la communication entre les habitants de Wiltz, actuels et à venir. En effet, les anciennes friches formaient une césure suivant l’axe est-ouest de la vallée à travers le tissu urbain, empêchant les relations entre les quartiers implantés sur les versants nord et sud de la vallée. À l’avenir, les habitants de ces deux versants opposés auront une vue sur un nouveau quartier très arboré et végétalisé (y compris en toitures et façades) et ils bénéficieront d’un accès direct aux nombreux espaces publics qu’il contiendra. Étant donné la topographie de Wiltz, l’implantation d’ascenseurs publics de part et d’autre permettra de compléter un réseau de chemins piétons déjà bien présent, tant au nord qu’au sud de la vallée. Au cœur de ce nouvel espace urbain, une école fondamentale et une structure intégrée, construite sur les principes de l’économie circulaire (Wiltz a été désignée comme hotspot de l’économie circulaire), offriront le confort d’un équipement de pointe et la garantie des techniques constructives, donc des lieux de vie, les plus sains.

Cette aventure ne s’arrête évidemment pas aux limites des anciennes friches. D’autres projets, à la fois basés sur la même philosophie durable et flexible et complémentaires par les typologies différentes qu’ils proposent, viennent compléter les interventions et les nouvelles facettes du développement de Wiltz. Enfin, un souci du détail tout particulier est appliqué sur le traitement des plus petites interventions, constructions d’appartements ou de maisons, mais aussi extensions, afin de préserver les spécificités paysagères, socioculturelles et patrimoniales de la ville.

Sans parler du développement harmonieux de potentialités de développement des activités et des équipements, afin que les emplois créés, mais aussi les infrastructures, suivent la courbe de croissance de la population ».

Légende photos : projet Wunne Mat der Wooltz simulation 3D Vues de IVC -Wooltz renaturée- vers l’Est / Source : HSA, Heibourg Strotz Architectes

Une réflexion à mener sur les matériaux et la conception
Une réflexion à mener sur les matériaux et la conception

Éric Van Boven, fondateur d’Écologe, a développé un procédé unique de construction en dur écologique à base de pierre volcanique. Il nous donne son point de vue sur l’évolution des villes et des bâtiments.

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« Nous sommes de plus en plus nombreux sur la planète, ce qui induit une évolution des espaces que nous occupons. Je pense que la priorité devra être donnée à des logements plus petits avec des zones partagées où se retrouver pour des activités communes : aires de jeux intérieures ou extérieures, jardins, terrasses, salles de réunion, etc. En ville, de nombreux bâtiments anciens ont une structure viable. Les démolir serait un gâchis du point de vue écologique. Mieux vaut les désosser et en repenser les espaces intérieurs en y intégrant des systèmes modulables capables d’évoluer en fonction des besoins pour les adapter aux nouveaux modes de vie urbains.

D’autre part, de nombreuses études scientifiques démontrent que nous allons vers un réchauffement climatique de l’ordre de 5 à 6 degrés d’ici 2100. Or, les villes ne sont actuellement pas adaptées à ces températures. Il faut veiller à y créer davantage de zones d’ombre, plus de galeries par exemple qui permettent de se promener en étant protégés du soleil en été et de la pluie en mauvaise saison. Les études prouvent également que climatiser à outrance pour récupérer un peu de fraîcheur est une hérésie car le fonctionnement des installations d’air conditionné génère de la chaleur. Une enquête réalisée pour la ville de Paris révèle qu’en doublant le nombre d’installations de climatisation d’une métropole, on y augmente la température globale de 3 degrés. La réflexion doit donc plutôt porter sur les matériaux et sur la conception. Les matériaux lourds offrent une meilleure inertie thermique. La pierre volcanique, notamment, est une alternative naturelle aux matériaux de construction traditionnels et elle a un effet de déphasage très intéressant par rapport à une structure bois. Au niveau de la conception, on peut imaginer tout un tas de solutions qui permettent d’apporter du positif dans l’utilisation quotidienne des nouveaux bâtiments : des casquettes solaires sur une baie vitrée plein sud servant à la fois à limiter le réchauffement et à produire de l’eau chaude sanitaire grâce à des capteurs, par exemple.

Demain, les bâtiments devront aussi être plus sains grâce à des matériaux naturels et perspirants. Les maisons actuelles sont des thermos. Les isolants chimiques polluent 2 fois : lors de leur production et lors de leur traitement en fin de vie. De plus, ils bloquent la vapeur d’eau que nous générons dans les murs. Un corps adulte en dégage 3 litres chaque jour, ce à quoi il faut ajouter celle qui est produite par la cuisine, les bains et douches, les machines à laver le linge et la vaisselle, etc. Cette humidité génère des germes et des moisissures qui sont à l’origine de problèmes d’allergies. La pierre volcanique permet de retrouver un habitat qui a les caractéristiques de ceux de nos grands-parents où les murs respiraient. Elle est durable pour la planète et dans le temps.

Enfin, le végétal est vital au niveau de l’absorption des pluies. Plus on bétonne, plus les courants d’eau s’accélèrent quand la pluie tombe en masse. Les systèmes d’absorption ne peuvent pas suivre et il en résulte des inondations ».

Mélanie Trélat

Des bâtiments intelligemment pensés et conçus
Des bâtiments intelligemment pensés et conçus

Comment imaginez-vous les bâtiments du futur ? Réponse de Georges Thill, directeur général chez CDCL.

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« Depuis dix ans, le Luxembourg voit sa population grandir d’environ 10 000 personnes par an. Selon Eurostat, notre pays comptabilisera 1 million de résidents en 2080. Une croissance qui entraîne avec elle une remise en questions, notamment pour le logement et le secteur du bâtiment dans son ensemble. Et ce, sans compter les besoins en infrastructures commerciales ou administratives. La ville de demain doit prendre en compte un certain nombre d’enjeux tels que la sensibilisation à la durabilité, l’utilisation efficace et intelligence des ressources énergétiques ou encore l’adaptation d’un bâtiment à son environnement.

CDCL – Compagnie de Construction Luxembourgeoise- désire être un acteur du changement effectif. Notre entreprise de construction générale étend ses activités et propose des produits innovants en réponse aux problématiques environnementales. Les modes de construction conventionnels impliquent un processus complexe qui se traduit par des coûts élevés, des chantiers longs et des risques considérables en matière de construction. Le secteur du bâtiment représente environ 40 % de la consommation totale d’énergie et de ressources, 40 % de la production totale de déchets et de CO2 tandis qu’il est responsable de 60 % du volume de transport mondial.

Nous travaillons actuellement sur l’optimisation de nos processus au travers de différents axes. La création d’une cellule Lean permettra le suivi efficient de notre planning général, une anticipation des prérequis de nos sous-traitants et, in fine, une diminution des délais. Il en est de même pour des axes comme le pilier Design & Build offrant une prise en charge totale des projets ou le développement de la construction hybride.

Ce dernier point consiste à construire mieux, en utilisant des matières renouvelables. Nous avons récemment annoncé un partenariat avec CREE GmbH, spécialiste de la construction hybride. Cela s’inscrit dans une vision durable de la construction et cela notamment grâce à l’utilisation de matériaux traditionnels sous un système modulaire bois-béton préfabriqué. Résultats : réduction des délais, diminution de l’empreinte carbone et écobilan positif.

Nous veillons également à la sensibilisation et à l’encouragement des constructions écologiques dans un concept plus traditionnel. Un bâtiment comme celui du Lycée Technique pour professions de santé à Ettelbruck (administration des Bâtiments publics) en est un bon exemple. C’est un projet pilote à énergie positive dans lequel le choix des matériaux s’est notamment porté sur des colonnes ballastées au lieu de pieux en béton, sur une construction en bois ou encore sur des panneaux en argile pour les cloisons intérieures. À terme, le bâtiment produira plus d’énergie qu’il n’en consommera.

Voilà comment doivent être les bâtiments de demain : intelligemment pensés et conçus ».

Légendes photos :
Le système modulaire bois-béton préfabriqué réduit l’empreinte CO2

Georges Thill

Densifier durablement et diversifier l'énergie
Densifier durablement et diversifier l’énergie

Paul Wurth Geprolux est actif dans la construction de bâtiments d’excellence intégrant les principes de développement durable. Infogreen a invité la société à partager sa vision de la ville de demain.

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Elisa Ragazzoni, Head of Project Development, nous confie son approche organisationnelle des futures villes :

« Selon le rapport de l’ONU, en 2050, 66 % de la population vivra dans les villes. Le défi auquel elles devront faire face est celui d’une densification importante. Cette dernière devra se faire de manière rationnelle et en créant des espaces de vie agréables tout en utilisant le moins de surface possible et en générant des espaces publics de qualité pour que les habitants disposent d’air, de lumière et d’espaces verts.

Les espaces publics devront être intégrés dans une approche globale, et non être simplement des espaces résiduels pour faire renaître en ville une ambiance de voisinage et amener les gens dans les rues. Cela passe par le développement des interconnexions, en favorisant la mobilité douce (vélos, piétons), les transports en commun et en limitant les transports privés. Les espaces verts et les aires de récréation devront être pensés en tant que parts d’un réseau traversant la ville permettant d’amplifier aussi la valeur écologique, qui est fondamentale.

Revenir à une certaine mixité et utiliser plus efficacement les surfaces est un des objectifs. Aux États-Unis, la sectorisation des fonctions a vu naître des quartiers où l’on vit, d’autres pour le travail, d’autres encore destinés aux achats et aux loisirs, ce qui a mené à une importante congestion du trafic et à un appauvrissement des contacts sociaux.

En Europe, en termes de mixité, les centres fonctionnent encore bien et il faudra veiller à ce que le saut d’échelle des interventions de densification soit approprié. Dans les années 70, la crise du logement a provoqué la construction de cités périphériques dans lesquelles les composantes sociales et qualitatives n’ont pas été bien pensées. En Angleterre, et ailleurs en Europe, on assiste à la démolition et à la reconstruction de certaines de ces cités pour revoir leur organisation.

À Luxembourg, certaines friches sont déjà réutilisées pour optimiser la densification de la ville et éviter d’aller construire à l’extérieur, loin du centre. À cet effet, Belval, Differdange, mais aussi le nouveau quartier Paul Wurth-Landewyck à Hollerich-Gare peuvent être cités comme exemples. »

Samuel Majerus, Project Manager, détaille le volet énergétique des smart cities et aborde le recours à l’économie circulaire :

« À l’avenir, les sources d’énergie seront diversifiées. Actuellement, on parle beaucoup de l’électrification absolue, mais celle-ci entraînera de nombreux problèmes : congestion, stockage, réseau électrique sous-dimensionné, prix croissant, etc. Une solution est d’investir dans le gaz ‘vert’. Par exemple, le recyclage des déchets organiques (résidentiels, agricoles, eaux d’épuration) permettra la production de biométhane qui sera ensuite injecté dans le réseau de gaz actuel (ici on peut citer Morges en Suisse, ville de référence championne du triage). La technologie de ‘Power to Gas’, c’est-à-dire d’utiliser l’électricité renouvelable pour créer du gaz naturel vert à travers divers procédés chimiques, permettrait de résoudre de nombreux problèmes, surtout au niveau du stockage.

En ce qui concerne la consommation, les bâtiments vont devenir hautement intelligents et seront capables de la contrôler et de l’optimiser à distance. Les producteurs et les utilisateurs seront connectés pour que la demande et la consommation soient en symbiose. C’est ce qu’on appelle le ‘smart grid‘. Paul Wurth Geprolux, en collaboration avec le SnT (Interdisciplinary Centre for Security, Reliability and Trust de l’Université de Luxembourg, NDLR), installe actuellement des capteurs dans des bâtiments existants permettant le monitoring et le management de leur consommation.

Un autre point est la tarification de l’énergie en mode bi-horaire qui est encore très primitive et qui va devenir bien plus flexible, avec des tarifs changeants par heure ou demi-heure. Les équipements seront programmés pour se mettre en route lorsque l’énergie est au meilleur prix. La puissance électrique disponible sera aussi limitée pour éviter les pics de consommation (copiant le modèle ‘flat-rate’ Internet). En optimisant sa consommation, l’utilisateur économisera sur sa facture finale et allégera le réseau.

Enfin, dans le futur, une approche beaucoup plus pragmatique est attendue dans la conception et la construction des bâtiments. La réflexion portera sur le cycle entier d’un élément dans une optique d’économie circulaire. Aujourd’hui, nous travaillons sur la conception de deux bâtiments selon ce principe. S’ils doivent être démontés dans 30 ou 50 ans, nous saurons exactement les matériaux qui s’y trouvent, combien coûterait le démontage, et chaque élément – brique, fenêtre, etc. – pourra être réutilisé, reconditionné ou recyclé. »

Marie-Astrid Heyde
Photo : Fanny Krackenberger

Des modules d'habitation emboîtables, démontables, réutilisables, et upcyclables
Des modules d’habitation emboîtables, démontables, réutilisables, et upcyclables

Spécialisé dans les bâtiments modulaires depuis 18 ans, Polygone a développé des solutions flexibles, financièrement abordables et néanmoins qualitatives qui répondent aux défis du logement dans la ville de demain. André Reuter, gérant technique, et Benedict Sargent, business & product developer, nous les présentent.

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André Reuter, gérant technique

« On n’habite plus un bâtiment aujourd’hui comme on l’habitait hier. Des causes d’ordre écologique, spatial, sanitaire et social ont induit une remise en question des modèles existants. Par exemple, on ne construira plus de maisons avec garage parce que la mobilité est en train de changer. Il faudra aussi construire de façon plus dense, car le prix des terrains est de plus en plus élevé. S’endetter sur plus d’une génération pour avoir une maison n’est plus vivable et les villas entourées de 10 ou 15 ares de terrain, c’est fini !

Le bâtiment modulaire permet de contrebalancer le coût énorme des terrains car il est environ 30 % moins cher qu’un bâtiment traditionnel pour des finitions similaires et offre un gain de temps de construction de près de 45 %. Il se prête à la réalisation de maisons, mais aussi de bâtiments publics ou administratifs.

Parmi les projets qui nous ont amenés à réfléchir à des solutions d’habitation modulaires, nous avons monté en 2011 le centre Abrigado qui accueille des toxicomanes et en 2015 une structure d’hébergement pour réfugiés pour l’OLAI à Mersch. Ce sont des constructions spécifiques pour lesquelles nous collaborons avec une PME alsacienne.

Nous travaillons actuellement avec l’AIS (Agence Immobilière Sociale) sur le projet BMHA (bâtiment modulaire d’habitation amovible), qui a pour objectif de répondre rapidement à la demande en logements sociaux tout en offrant aux personnes en difficulté des logements clé en main aussi solides et fiables que ceux qui sont issus de la construction traditionnelle.

L’habitat modulaire est une solution d’avenir car il a déjà adopté les façons de vivre de demain. Il répond à une vente emphytéotique résultant d’un basculement de mentalité quant à la notion de propriété. Il sait s’adapter aux besoins des usagers : il change de taille et de fonction sans travaux lourds, il peut être démonté et déplacé et il s’inscrit dans les principes d’écologie et d’économie circulaire. Éviter le gaspillage passe par des produits emboîtables, démontables, réutilisables et upcyclables. De plus, ces bâtiments s’appuient fortement sur le BIM (Building Information Modeling) pour la visualisation, l’évaluation de la performance énergétique et l’automatisation des processus de fabrication ».

Benedict Sargent, business & product developer

« Nous sommes aujourd’hui face à une pénurie de logements à laquelle il faut trouver une solution viable, rapide et économique. En analysant les avantages techniques, environnementaux et fonctionnels de l’habitat modulaire, tout en regardant l’activité à l’étranger où cette alternative est en pleine croissance, nous sommes convaincus de son potentiel.

Avec cette solution, nous avons la possibilité de satisfaire une clientèle qui a hérité d’un terrain mais dispose d’un budget limité, une jeune famille qui souhaite se positionner facilement et rapidement sur le marché de l’immobilier ou encore des futurs propriétaires à la recherche d’un espace de vie en matériaux recyclables capable d’évoluer au fil des différentes étapes de leur vie ce qui, dans la construction traditionnelle, serait lié à des coûts, des délais et des nuisances beaucoup plus importants.

Le principal avantage de l’habitat modulaire est sa rapidité de mise en place : le bâtiment est fabriqué en usine pendant l’exécution des travaux de génie civil. On réduit ainsi le risque d’accidents sur chantier puisque les éléments sont produits selon des procédés industriels, hors site, dans les meilleures conditions. Ceci permet également de diminuer les déchets, donc l’impact écologique de la construction. Tout cela avec une majorité de matériaux utilisés aussi dans les bâtiments traditionnels et avec des standards de qualité équivalents. Nous pouvons atteindre un excellent niveau d’isolation thermique et phonique et garantir une résistance au feu jusqu’à 90 minutes ».

Mélanie Trélat

Photo : Fanny Krackenberger

Louer des terrains pour logements amovibles
Louer des terrains pour logements amovibles

Gilles Hempel, directeur de l’Agence Immobilière Sociale, présente un projet d’habitat social modulaire, circulaire et totalement innovant qui sera déployé dans les années à venir au Luxembourg.

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« Comme vous le savez, l’AIS loue des logements inoccupés pour les mettre à disposition de personnes en détresse pendant une période de transition, le temps qu’elles remettent le pied à l’étrier. Ces logements constituent un potentiel énorme et notre système de location fonctionne très bien.

Nous constatons qu’au Luxembourg, il y a non seulement de nombreux logements vacants, mais aussi beaucoup de terrains non bâtis, les fameuses Baulücken. Ces dernières représentent environ 1 000 hectares, situés dans les villes et villages, entre deux maisons existantes. La problématique est la même que celle des logements inoccupés : les propriétaires n’ont actuellement pas de projet de construction, mais ils souhaitent garder ces terrains pour leurs enfants plus tard ou comme placement financier, et ils n’ont aucune raison de les vendre parce que le foncier, avec des plus-values entre 5 et 7 % par an, est le meilleur investissement en ce moment.

Nous nous sommes donc demandé : pourquoi ne pas appliquer aux terrains le système que l’AIS a imaginé pour les logements ? Il s’agirait de louer ces terrains à court terme, pour une durée de 5 à 10 ans, et d’y poser des logements provisoires. Nous avons donc cherché des solutions qui soient à la fois facilement déplaçables, ni trop onéreuses ni trop invasives de manière à pouvoir restituer le terrain tel que nous l’avons reçu. Il n’est donc pas question de creuser des fondations.

En discutant avec Pit Streicher de la société Polygone, l’idée est venue de créer des modules d’habitation amovibles à partir des containers qui sont utilisés pour former les bases de vie sur les chantiers de construction ou pour servir de bureaux provisoires lorsqu’une administration ou une banque est en travaux de rénovation.

Ces modules peuvent être placés à même le sol, sans intervention sur le terrain si celui-ci est plat. Ils sont équipés comme un logement, avec un niveau de confort et des valeurs énergétiques équivalant à ceux d’une maison « normale », et ils sont bien évidemment raccordés aux réseaux d’eau, d’électricité, d’Internet et de téléphonie. Leur grand avantage est d’être facilement déplaçables au moment où le propriétaire souhaite reprendre possession de son terrain.

Ayant à cœur que ces logements soient beaux et s’intègrent harmonieusement dans leur environnement, nous avons travaillé avec le bureau Banice Architectes pour « déguiser » les containers de sorte à ce qu’ils ressemblent à une véritable maison, dessinée par un architecte. Ainsi, les voisins ne sont pas dérangés et le bénéficiaire du logement n’est pas stigmatisé. Tel que nous avons développé ces modules d’habitat, on ne remarque ni de l’intérieur, ni de l’extérieur qu’il s’agit de containers.

Ce système profitera à la fois aux bénéficiaires de l’AIS qui jouiront d’une maison tout confort et aux propriétaires de terrains qui, en plus de l’apport financier constitué par la location, éviteront de payer la taxe sur les terrains inoccupés qui devrait bientôt voir le jour.

Les modules ont une garantie de 25 ans, mais ils ont en réalité une durée de vie bien supérieure. De plus, ils s’inscrivent parfaitement dans une optique d’économie circulaire : ils sont conçus pour pouvoir resservir comme container de chantier et pour être démonté en fin de vie, chaque élément étant soit réutilisable, soit recyclable, selon les principes du cradle to cradle.

Le ministère du Logement nous a confirmé que ces containers tombent sous le régime des constructions d’ensembles dans le cadre de la loi de 1979 sur l’aide au logement et pourront donc être subventionnés à hauteur de 75 %.

En ce moment nous sommes à la recherche de propriétaires prêts à mettre leurs terrains à disposition. Parallèlement, nous éliminons les dernières contraintes juridiques avec l’étude de Me Albert Rodesch. Nous espérons pouvoir placer les premiers modules d’ici la fin de l’année ».

Mélanie Trélat

Traiter l'eau en douceur, dans une démarche durable
Traiter l’eau en douceur, dans une démarche durable

Cyrille Gerhardt, directeur général d’AQUABION® au Luxembourg, en France et en Belgique, imagine les bâtiments du futur équipés de systèmes permettant de les rendre plus autonomes pour faciliter la vie des usagers et des exploitants, notamment dans le domaine du traitement de l’eau.

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« Dans la ville de demain, les bâtiments seront autonomes et les automatismes amélioreront la qualité de vie des utilisateurs. Ils seront construits avec des matériaux biodégradables et seront alimentés avec des sources d’énergie renouvelables.

Il y aura une prise de conscience généralisée par rapport au gâchis d’eau. L’eau de pluie sera donc récupérée et utilisée pour la partie sanitaire. Des systèmes de filtration intégrés permettront de recycler les eaux usées. Les futurs bâtiments sauront aussi préserver l’eau potable à travers notamment l’installation d’économiseurs. Le traitement du calcaire et de la corrosion s’y fera de manière plus douce que ce qui se pratique le plus couramment aujourd’hui, c’est-à-dire qu’il s’opérera sans agents chimiques ni sels. Il se fera aussi de manière plus durable, c’est-à-dire sans rejet d’eau et sans consommation électrique.

AQUABION® s’inscrit dans cette vision et draine une clientèle qui est en recherche d’une alternative écologique aux solutions de traitement de l’eau conventionnelles, adaptée à ses besoins, tout en voulant également éviter les contraintes liées à la maintenance et aux entretiens en optant pour le système le plus autonome possible. Notre solution est basée sur des ions de zinc qui enserrent le calcaire et le transforment en poudre non incrustante et ce, sans incidence sur les propriétés physiques ou chimiques de l’eau.

L’avenir est clairement à la réduction de l’utilisation de produits chimique pour préserver l’or bleu qu’est l’eau. Cet or bleu ne doit pas être maltraité, donc il faut prendre soin de le traiter correctement, en fonction des besoins, dans une démarche durable ».

Pour en savoir plus sur Aquabion : https://aquabion-distribution.com/

Mélanie Trélat

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Des mini-centrales énergétiques connectées pour mieux consommer
Des mini-centrales énergétiques connectées pour mieux consommer

Benoît Lespagnol, directeur général de Ferroknepper Buderus, croit en un avenir connecté où l’intelligence artificielle permet d’optimiser la consommation d’énergie, mais aussi sa production et son échange.

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« La vision que j’ai sur la ville de demain, c’est celle d’une ville où les habitants vivent en harmonie entre eux, en préservant la qualité de leur environnement. Une ville où on n’essaye pas seulement d’éloigner la pollution, mais de la supprimer. Si je regarde les voitures électriques actuelles, elles ne font souvent que déplacer la pollution en dehors des centres-villes, mais elle existe toujours, car l’électricité nécessaire est encore en Europe en grande partie produite par des énergies fossiles. Le défi de la ville de demain, c’est donc en premier lieu de réduire énormément sa consommation d’énergie puisque la meilleure énergie, c’est celle qui n’est pas consommée !

Ensuite, un autre aspect important sera la connectivité. La ville de demain verra la mise en place de systèmes intelligents, d’une part pour améliorer encore le confort de ses habitants, d’autre part pour favoriser l’efficacité énergétique. L’intelligence artificielle aura un rôle important pour décharger ces aspects-là du quotidien des personnes. Pour le chauffage ou pour l’énergie en général, le bâtiment deviendra de plus en plus un producteur d’énergie et les systèmes seront capables de reconnaître et d’anticiper ses besoins. Ces systèmes existent déjà et se généraliseront, par exemple en utilisant, au sein de la maison, les possibilités de stockage de l’énergie produite, énergie qui sera nécessaire trois heures plus tard quand le soleil sera couché et que la maison va commencer à se refroidir. L’utilisateur aura bien sûr la possibilité d’intervenir s’il le souhaite.

Ainsi, le particulier ne sera plus qu’un simple consommateur d’énergie mais un prosumer, comme on dit en anglais : un producteur-consommateur. Les systèmes de chauffage vont évoluer en mini-centrales énergétiques. Ces petites centrales permettront au particulier de produire (essentiellement sur base d’énergies renouvelables), de consommer et d’échanger sa production thermique ou électrique. Je pense ici à un échange au niveau du voisinage, plutôt qu’à un réseau très large, pour lequel la mise en place d’une infrastructure de stockage est beaucoup plus complexe. Il y aura bien sûr une interaction avec la mobilité, avec la possibilité par exemple d’utiliser la batterie d’un véhicule électrique pour stocker de l’énergie de panneaux photovoltaïques. Ce sont des choses qui existent déjà mais sont amenées à se généraliser et à se développer. La maison sera capable de reconnaître que ses habitants sont sur le chemin du retour, et pourra automatiquement ajuster la température intérieure.

Buderus travaille beaucoup sur la cogénération à pile à combustible. Ce sont des centrales énergétiques qui fonctionnent à l’hydrogène, actuellement issu du gaz naturel. Le principe est d’avoir une pile à combustible chez soi, qui produit électricité et chaleur sans se découpler du réseau mais au contraire en gardant un échange avec le réseau. Cet outil donnera les moyens aux particuliers de produire, de consommer et de partager leur énergie, même s’il leur est difficile d’installer des systèmes à énergie renouvelable, comme une pompe à chaleur ou des panneaux solaires.

Pour que tout cela soit possible, nous sommes conscients en tant que fournisseur-acteur de notre rôle important d’accompagnement de la profession artisanale et des installateurs, principalement en ce qui concerne la transformation digitale. Du point de vue des énergies renouvelables, les la plupart des installateurs se sont déjà bien formés (photovoltaïque, solaire thermique, pompes à chaleur). Il faut maintenant développer des synergies. On a actuellement des électriciens d’un côté et des chauffagistes de l’autre, qui devront certainement fusionner pour donner lieu en quelque sorte à des ‘énergéticiens’, qui réfléchiront au transport de l’énergie à la fois par l’air, l’eau et l’électricité. »

Buderus Youtube Video Brennstoffzelle in der Praxis :

Marie-Astrid Heyde

Copyright photo : Marie-De-Decker

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Une ville créative et durable, qui limitera les impacts négatifs
Une ville créative et durable, qui limitera les impacts négatifs

Quelle est votre vision de la ville de demain ? Réponse de David Determe, administrateur-délégué chez Betic ingénieurs-conseils.

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« À mes yeux, la ville de demain sera créative et durable en ce sens qu’elle limitera les impacts négatifs dans les domaines de la consommation d’énergie mais aussi sur les ressources naturelles ou humaines. La durabilité reposant sur des objectifs énergétiques (réduction ou suppression des besoins en énergies fossiles, orientation sur des énergies renouvelables…), environnementaux (réduction de la consommation, gestion de la biodiversité...) et économiques (viabilité, développement de filières courtes…), la conception technique y aura une place prépondérante.

Très clairement, la question énergétique se place au cœur des questions posées par les villes de demain. Dans un contexte de réchauffement climatique de plus en plus pesant, nous devons les penser en y incluant des réflexions et des solutions fortes, notamment en matière de production d’énergie durable.

Les grands développeurs publics et privés font de gros efforts en la matière et sont aujourd’hui engagés via des démarches fortes. Ils vont, j’en suis certain, poursuivre et amplifier ces actions en matière d’efficacité énergétique (développement de l’éclairage public à faible consommation, rénovation énergétique des infrastructures existantes, construction de nouveaux quartiers…) et mettre en place des systèmes de production locale d’énergie via par exemple la pose de panneaux photovoltaïques sur les toits ou encore la production d’électricité à partir des déchets. Concernant les déchets justement, ils auront pour mission de réduire leur production et de mettre en place des systèmes efficaces de récupération et de valorisation. Nous savons qu’intégrer tous ces éléments dans un environnement existant est complexe mais les dernières réalisations dans le pays nous prouvent que cela est bel et bien possible.

Il sera nécessaire que les habitants se positionnent différemment par rapport à leur consommation d’électricité. Il faudra qu’ils réfléchissent en tant que prosumer, personne qui produit et consomme en même temps. Cela passe par la décentralisation, qui s’accompagne inévitablement d’un renforcement des infrastructures et des smart grids, mais aussi par le fait de trouver des solutions en matière de stockage de l’électricité. Le stockage est un exemple concret des solutions qui doivent être développées pour pouvoir construire cette ville du futur.

Mais concevoir des infrastructures économes et productrices d’énergie ou encore réduire sa consommation n’est pas suffisant. La ville de demain fera la part belle à la solidarité énergétique entre les immeubles neufs et anciens. J’entends par là, mutualiser les dispositifs de production d’énergie et jouer le rôle de fournisseur pour les bâtiments situés à proximité. Il faudra donc déployer d’importants réseaux intelligents entre tous nos bâtiments mais aussi nos biens mobiliers comme les voitures, pour qu’ils puissent interagir sans devoir à nouveau centraliser la production d’électricité avant de la redistribuer.

D’une manière plus générale, il me semble évident que la ville de demain devra répondre aux besoins de tous les habitants, dont les plus vulnérables, les plus marginalisés... On lui demandera, en plus d’être sobre dans la gestion de ses ressources naturelles pour contribuer à l’atténuation des effets du changement climatique, d’être résiliente face aux événements naturels qu’ils soient ou non liés au changement climatique. Enfin, la ville doit faire preuve d’une certaine attractivité économique pour fournir à ses habitants les ressources qui leur sont nécessaires. Les composantes de la ville, les services urbains, le logement, les espaces publics, l’offre économique, la culture sont autant de composantes, d’outils, qui doivent contribuer à développer cette vision ».

Source photo : David Determe

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Réinventer la mobilité douce à Luxembourg-ville
Réinventer la mobilité douce à Luxembourg-ville

On entend beaucoup parler ces derniers mois d’un chantier imposant traversant les différents quartiers de la capitale luxembourgeoise. Le tram poursuit sa percée, comptant bien emmener à son bord résidents comme frontaliers vers leur lieu de travail ou de loisirs. Partie intégrante d’une vision de mobilité douce pour la Ville de Luxembourg, il n’est bien sûr pas la seule alternative mise en place pour alléger un tant soit peu le trafic routier. Infogreen est allé à la rencontre de Patrick Goldschmidt, échevin responsable en matière de mobilité, pour découvrir sa vision de la Ville de Luxembourg de demain.

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Tout d’abord, il y a le constat. En 20 ans, quelque 40 000 personnes se sont installées à Luxembourg-ville. Celle-ci comptait 116 328 habitants au 31 décembre 2017. Du côté des frontaliers et autres navetteurs, que l’on sait également nombreux, ce sont 100 000 personnes environ qui se rendent quotidiennement en ville. Et ces chiffres ne feront certainement que croître davantage dans les prochaines années. « Mais à part dans les nouveaux quartiers, les routes, elles, sont restées les mêmes », complète M. Goldschmidt. Si la Ville de Luxembourg n’est pas compétente en matière de mobilité transfrontalière, elle cherche constamment à adapter les moyens de transport au sein de sa commune.

Face à ces voies saturées et à ces chiffres en hausse constante, c’est à plus de douceur que la Ville de Luxembourg aspire pour la mobilité de demain. Plutôt que de créer ou d’élargir les routes pour y intégrer plus de voitures, elle souhaite faire grandir les espaces verts, développer un réseau de transports en commun peu polluant et promouvoir l’usage du vélo, qu’il soit classique ou électrique. « Parce qu’une voiture en moins sur les routes, c’est un conducteur de moins qui perd du temps dans les embouteillages ou à la recherche d’une place de parking, c’est un air moins pollué et des résidents qui vivent dans un environnement plus agréable et plus sain  », explique l’échevin. La Ville ne manque certainement pas de projets et intègre autant que possible les résidents dans cette réflexion d’avenir.

Le bus autonome à l’étude

Au niveau des bus, l’électrisation du réseau est en cours. « Pour l’instant, les lignes 9, 13 et 14 sont desservies par des bus hybrides ou entièrement électriques », rappelle l’échevin. « En 2019, les lignes 12, 17 et 24 seront électriques, et trois stations d’overnight charging seront construites sur le site Bouillon. On vise le 100 % électrique, mais cela prend du temps. Toutes les grandes villes européennes sont intéressées par ces batteries électriques, et les fournisseurs ne suivent pas la cadence. Par ailleurs, comme c’est une technologie récente, l’autonomie de ces batteries était pendant longtemps trop limitée. Elles peuvent à présent assumer des trajets de 150 à 200 km, et là ça devient intéressant.  » Quinze à vingt bus devraient être changés d’ici fin 2019. L’échevin espère que 50 % de la flotte roulera à l’électrique d’ici quatre à six ans, en veillant à mesurer leur performance au fur et à mesure.

La Ville de Luxembourg compte également prendre part à un projet européen de test de bus autonomes. « Le but n’est bien sûr pas de supprimer de l’emploi, mais de voir comment ces bus autonomes pourraient trouver une place en ville, sur de petits tronçons ». On devrait donc bientôt croiser des bus sans chauffeur dans le quartier du Pfaffenthal, mais les détails du test doivent encore être peaufinés et seront communiqués lors de la Semaine européenne de la mobilité qui se tiendra du 16 au 22 septembre.

Pédaler à l’électrique à petit prix

Les piétons ne sont bien sûr pas oubliés et leur situation est analysée dans chaque PAP (plan d’aménagement particulier, NDLR), avec des spécialistes en matière de mobilité. Et pour assurer un flux d’air frais pour tous, les espaces verts sont et continueront à être renforcés.

Côté « vel’OH ! », la flotte sera très prochainement 100 % à assistance électrique. « C’est une décision qui ne fait pas forcément l’unanimité, mais je pense qu’elle permettra de convaincre de nouveaux utilisateurs. Les travailleurs n’utilisent pas les vélos classiques pour aller jusqu’à leur bureau, pour d’évidentes raisons d’hygiène, mais avec l’électrique cela devient envisageable », précise M. Goldschmidt. Et ce pour un coût de location de 18 euros par an (contre 15 euros jusqu’à présent pour les vélos traditionnels).

En amont de toutes ces décisions, l’avis des résidents prend une place importante. « J’aimerais par exemple qu’on crée un tronçon cyclable au Limpertsberg et prévois une consultation citoyenne en septembre ou en octobre », explique-t-il. « Mais comme ces travaux auront pour conséquence la suppression d’un certain nombre de places de parking, je m’attends à quelques réticences. » Car la possibilité de se garer reste une priorité pour les habitants. La voiture individuelle est encore trop présente dans la capitale, et les demandes de vignettes résidentielles ne diminuent pas. « On constate toutefois que beaucoup de jeunes qui viennent à Luxembourg arrivent sans voiture. Changer les habitudes prend du temps, mais les plus jeunes générations sont plus à même d’apprécier les avantages de la mobilité douce. »

Marie-Astrid Heyde

Crédit photo Patrick Goldschmidt : Photothèque Ville de Luxembourg/Marc Wilwert
Crédit photos Bus1 et Bus2 : Ville de Luxembourg
Crédit photo Vélos : Ville de Luxembourg/David Laurent

Une mobilité zéro émission, automatisée et centrée sur l'usager
Une mobilité zéro émission, automatisée et centrée sur l’usager

Georges Hilbert, directeur général transport technique chez Sales-Lentz, nous donne sa vision de la mobilité urbaine de demain. Elle sera partagée, mais personnalisée. En trois mots : as a service.

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« Ce qui est demandé pour les années à venir, ce sont d’abord des transports zéro émission. Actuellement, quand on parle de zéro émission, on parle d’électromobilité. C’est déjà une réalité puisque, depuis mai 2017, nous exploitons 4 bus électriques à Differdange. Ces 14 mois d’expérience nous ont apporté un bilan très positif, aussi bien de la part des autorités publiques que des citoyens, et pas seulement des usagers des bus, mais aussi des résidents ou des personnes qui se promènent dans la ville ou boivent un verre en terrasse, par exemple. Ces véhicules, qui ne font pas de bruit et ne polluent pas, s’intègrent parfaitement dans une commune avec des rues étroites comme Differdange. Une alternative zéro émission sera la pile à combustible. D’ici 4 ou 5 ans, la technologie sera fiable, les véhicules commercialement exploitables et ils auront une autonomie qui répondra aux besoins des opérateurs.

On parle aussi beaucoup de véhicules automatisés, voire autonomes. Il y a 5 degrés d’automatisation. Cela va de la simple assistance pour une conduite plus confortable et sécurisée, avec des systèmes de régulation de vitesse ou d’assistance au freinage par exemple, jusqu’à un véhicule qui peut rouler seul techniquement, mais qui requiert encore la présence d’un conducteur pour des raisons légales. L’ultime degré est le véhicule autonome qui se définit par le fait que toutes les personnes à bord sont des passagers. Pour l’atteindre, il faudra d’abord clarifier certains aspects réglementaires qui touchent à la responsabilité. Nous travaillons en étroite collaboration avec le constructeur de véhicules autonomes lyonnais Navya depuis 2 ans et prévoyons de proposer des solutions de mobilité last mile, first mile et on demand. Des Navya shuttle circuleront au Grand-Duché à partir de la mi-septembre.

Ensuite, la mobilité de demain placera l’usager au centre de ses activités, ce qui veut dire que la priorité sera donnée à la sécurité et au confort. Le confort est lié à la connexion, connexion wifi dans le véhicule, mais surtout connexion avec le service de mobilité pour que le client soit informé de ce qui se passe quand il se trouve dans le bus : quand est-ce qu’il arrivera à destination ? Est-ce que l’horaire prévu est respecté ? Nous nous dirigeons vers une mobilité as a service, vers des solutions de mobilité disponibles 24 heures/24 et sur demande. La connectivité entre différents véhicules et la connectivité entre les véhicules et les infrastructures est primordiale pour atteindre une certaine efficacité. En ce qui concerne la connectivité entre véhicules, si vous vous trouvez dans un bus qui a du retard et que vous avez prévu d’emprunter ensuite une navette autonome pour parcourir les derniers kilomètres qui vous séparent de chez vous, la navette, si elle est connectée au bus peut attendre votre arrivée quelques minutes, en considération des autres passagers qui sont à bord, ce qui serait calculé par des algorithmes. Pour ce qui est de la connexion entre véhicules et infrastructures, un bus peut par exemple être connecté aux feux tricolores. Lorsqu’il s’approche d’un feu, il peut « demander » une phase verte et il adapte automatiquement sa vitesse sans pour autant devoir s’arrêter. Les 1ers essais avec la technologie C-ITS seront menés dans le cadre du projet de recherche européen eCoBus. Sales-Lentz est partenaire d’uni.lu, du LIST et de Volvo pour tester cette technologie.

Enfin, la mobilité de demain sera partagée, mais par définition, le transport public l’est déjà ».

Mélanie Trélat

Légende photo : Georges Hilbert devant la Navya shuttle

Des bornes de rechargement aux endroits stratégiques pour une mobilité full-électrique
Des bornes de rechargement aux endroits stratégiques pour une mobilité full-électrique

Silencieuse et non polluante, la mobilité sera 100 % électrique dans la ville de demain. C’est l’avis de Frédéric Pirmez, directeur de EV-Wallux.

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« Dans la ville de demain, la mobilité sera électrique car le problème, dans les zones urbaines aujourd’hui, ce n’est pas seulement le CO2 émis par les voitures, mais c’est aussi -et peut-être plus encore-, les particules fines et la pollution sonore qu’elles génèrent. Ce que l’on ressent beaucoup au niveau des villes, c’est le bruit : des moteurs qui ronronnent en permanence, c’est fatigant, en plus de produire beaucoup de fumées.

C’est la raison pour laquelle les villes qui ont décidé d’interdire la circulation des vieilles voitures sont de plus en plus nombreuses et je pense qu’à terme, la conduite n’y sera plus autorisée qu’avec des véhicules électriques.

Ces véhicules, il faudra bien entendu les charger. Et c’est là qu’intervient EV-Wallux. Nous proposons 4 solutions qui collent à cette vision de la ville. Les bornes de rechargement seront placées à différents endroits stratégiques. Ce pourra être à l’entrée des villes, au niveau des P+R, où l’on trouvera de nombreuses bornes qui permettront une charge légère, mais très lente, en 8 à 10 heures environ. Elles permettront aux usagers de laisser leur voiture dans un parking à l’extérieur de la ville tout en la mettant en charge pendant toute la durée de leur journée de travail. Pour ceux qui travaillent hors des centres-villes ou n’ont pas accès à des navettes pour s’y rendre, des bornes seront installées au pied des immeubles de bureaux, qui chargeront en 2 ou 3 heures en moyenne la voiture des commerciaux ou des autres collaborateurs. Il faut savoir que l’aménagement de parkings avec borne de rechargement est 100 % déductible pour les entreprises situées au Luxembourg, en France et en Belgique. On trouvera des bornes devant les magasins également. Elles seront capables de charger les voitures dans un temps très court, ½ heure à peine, pendant que leurs propriétaires feront leurs courses. Ces bornes constitueront un avantage concurrentiel pour les boutiques qui en seront dotées. Enfin, des bornes de rechargement de type parcmètre seront disponibles dans la rue, qui offriront un service en plus du parking. L’objectif est que le temps de chargement ne soit pas du temps perdu.

Certaines villes comme à Amsterdam, Rotterdam ou Monaco, ont déjà fait un premier pas vers la mobilité électrique en s’équipant totalement de bornes de rechargement. Nous allons également installer ce type de système à Namur d’ici la fin de l’année. Il est clair que les villes veulent aujourd’hui chasser les véhicules thermiques de leurs rues et qu’elles s’intègrent de plus en plus dans cette vision et ce projet de mobilité électrique.

Nous aurons certainement encore des véhicules thermiques, mais elles seront réservées d’autres types de voyage, plus longs, hors des centres urbains, pour lesquels l’électrique n’est pas encore prêt »

Mélanie Trélat

Le vélo à la place de la voiture
Le vélo à la place de la voiture

Pour Andy Schleck, coureur cycliste émérite, la ville de demain sera exempte de voitures et fera la part belle à la mobilité douce.

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« Luxembourg fait partie des villes européennes qui connaissent actuellement la plus forte croissance et elle doit donc faire face à un trafic de plus en plus important. La politique œuvre beaucoup en faveur de la mobilité douce et j’espère que, d’ici une dizaine d’années, Luxembourg sera une ville similaire à celle d’Amsterdam en termes de déplacements, que davantage de personnes, notamment les jeunes, utiliseront le vélo, la trottinette ou autre pour parcourir des petits trajets et que les voitures disparaîtront progressivement du centre-ville.

Lors de mes nombreux voyages, j’ai eu l’occasion de voir beaucoup d’autres villes et il est clair que Luxembourg est loin derrière les autres. On doit donc motiver les usagers à faire le premier pas, car c’est le 1er pas qui coûte. Il est difficile de prendre sa bicyclette pour la 1re fois pour se rendre sur son lieu de travail, mais on se rend très vite compte que c’est très pratique.

Le principal avantage de la mobilité douce en ville est qu’elle permet de se déplacer beaucoup plus rapidement qu’en voiture. Aller de la gare au Kirchberg, par exemple, ne prend que quelques minutes. De plus, cela rend la ville plus sympathique. On n’est pas stressé lorsqu’on roule à vélo comme on peut l’être quand on est coincé dans les embouteillages, on prend du plaisir et on est bien réveillé lorsqu’on arrive au travail.

La mobilité douce s’inscrit en complémentarité d’autres modes de transport comme le tram, qui est en train de se déployer, ou le bus. Le principe est celui de la mobilité à 6 roues : on prend la voiture ou les transports en commun pour les trajets en dehors des zones urbaines et on parcourt les derniers kilomètres à pied ou à bicyclette.

Si on regarde les pistes cyclables qui ont été construites ces 4 ou 5 dernières années et celles qui vont encore l’être, on peut dire qu’on est sur le bon chemin en termes d’infrastructures, mais il y a encore beaucoup de travail à réaliser, notamment au niveau de la sensibilisation à la mobilité douce et à la sécurité ».

Mélanie Trélat

Copyright photo : Serge Waldbillig

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