Michelle Friederici – Associée-gérante de FG architectes et présidente de l’OAI
En tant qu’architecte évoluant dans un domaine traditionnellement masculin, j’ai relevé de nombreux défis. Loin de me décourager, ils m’ont montré que le succès est accessible. La présence croissante des femmes dans l’architecture est un indicateur positif, bien qu’il reste encore beaucoup à faire pour équilibrer la représentation dans les postes de direction.
La question de la conciliation entre maternité et carrière, souvent posée aux femmes mais rarement aux hommes, révèle un double standard qu’il est urgent de dépasser. Je m’oppose à l’idée que les femmes doivent être des superwomen pour réussir, une pression qui peut intimider et dissuader. La réussite est à la portée de toutes. Il est crucial de croire en soi et de refuser d’être limitée par des stéréotypes obsolètes. Chaque femme qui parvient à s’imposer, quel que soit son domaine, contribue à créer un monde plus équilibré et juste. Des politiques comme le congé parental obligatoire pour les pères, appliquées dans certains pays, montrent qu’un meilleur équilibre familial est possible et bénéfique pour tous. Cela normalise l’implication des hommes dans la vie familiale et favorise une plus grande égalité des sexes au travail.
L’égalité des chances pour les femmes nécessite un changement de mentalité et de culture d’entreprise. En encourageant un partage plus juste des responsabilités tant professionnelles que familiales, nous ouvrons la voie à davantage de femmes dans des rôles de direction et de leadership. Ce changement culturel est essentiel pour que les futures générations de femmes puissent aspirer à des carrières ambitieuses sans être freinées par des attentes de genre désuètes.
Netty Thines - Administrateur-délégué Mediation
Depuis toute jeune, j’ai l’esprit rebelle et j’éprouve le besoin de me révolter contre toute forme d’injustice et de discrimination. Mon travail m’a fait rencontrer beaucoup de femmes qui ont un manque de confiance en elles, et qui préfèrent se taire au lieu de se battre pour leurs droits et prendre la parole. C’est une des raisons pour lesquelles je me suis engagée très tôt dans des réseaux comme la Fédération des Femmes Cheffes d’entreprise ou bien, plus tard, dans l’association des Femmes Pionnières du Luxembourg. Un des objectifs de cette association est de faire sortir les femmes de l’ombre, de leur donner de la visibilité.
Personnellement j’ai eu un autre vécu. Ainsi, ce sont des hommes qui m’ont invitée à prendre la direction de l’entreprise à la tête de laquelle je suis depuis toute jeune. Lors de réunions, j’étais souvent la seule femme. Je n’étais pas toujours entendue, alors que je voyais un homme reprendre mon idée et là, elle passait. Mais l’idée ne me venait pas du fait que j’étais une femme. J’ai simplement pensé que je devais améliorer mes compétences de prise de parole, de confiance en moi et mes talents de vente.
Plus tard, j’ai réalisé que c’était une expérience commune pour beaucoup de femmes. Éduquées différemment, on leur inculque de se taire. Même avec des compétences équivalentes, les femmes tendent souvent à douter d’elles-mêmes et à rester en retrait.
La prise de parole et la confiance en soi sont les clés du succès. Dans la société, ce sont celles et ceux qui ont un vrai talent d’orateur qui réussissent. Mon message est clair : il faut OSER. Répétons sans cesse aux femmes qu’elles sont capables, qu’elles peuvent porter haut leurs projets.
Caroline Lamboley - CEO Lamboley Executive Search
En tant qu’ancienne DRH et chasseur de têtes, j’ai collaboré avec de nombreux décideurs. L’accès aux hautes responsabilités pour les femmes reste complexe.
J’ai constaté des évolutions positives en matière de diversité et d’inclusion dans les postes de direction. Les entreprises sont de plus en plus conscientes de l’importance de la diversité, d’un point de vue éthique, mais aussi en tant que moteur de la performance et de l’innovation.
Cependant, des défis persistent et certaines femmes peuvent encore rencontrer des obstacles attribués à des stéréotypes persistants, des normes culturelles et des biais inconscients.
En tant que chasseur de têtes, mon rôle est d’identifier et de promouvoir les talents exceptionnels, quel que soit leur genre. Mon engagement est de promouvoir l’égalité des chances dans le cadre de mes recherches et de contribuer à un changement positif dans le monde professionnel luxembourgeois.
Il est par ailleurs crucial de reconnaître les risques potentiels de la discrimination positive. Le danger réside dans le fait de promouvoir une femme à un poste de direction uniquement en raison de son genre, sans évaluer rigoureusement ses compétences. Cela peut non seulement créer un sentiment d’injustice parmi les employés, mais aussi compromettre la performance globale de l’entreprise. Il faut reconnaître et promouvoir les talents exceptionnels, en fonction des compétences et non du genre.
Il est essentiel de trouver un équilibre délicat entre la promotion de la diversité et le maintien de normes élevées d’évaluation des compétences pour garantir une progression professionnelle équitable et durable.
Laure Elsen - Directrice générale d’Accentaigu et Administrateur délégué de Charles Kieffer Group
Malgré l’évolution des mentalités, je crois que c’est toujours davantage compliqué pour une femme d’accéder à des postes à responsabilités, même si, pour ma part, j’ai un parcours atypique étant donné que je gère deux sociétés : une que j’ai créée moi-même et l’autre, l’entreprise familiale, que j’ai eu en héritage.
La pression est forte surtout dans les sociétés historiques et dans les PME. Les préjugés résident comme le fait qu’une femme est moins compétente et moins disponible parce qu’elle doit s’occuper des enfants. Il faut prendre position et combattre ces idées préconçues. Il y a de plus en plus de femmes à la tête de grandes entreprises et de projets majeurs et qui œuvrent pour l’évolution des mœurs. Leurs parcours sont des exemples et je m’en réjouie.
Un autre constat est qu’entre hommes les rapports sont plus vite amicaux. Même si j’ai le même statut qu’eux, je ressens toujours cette différence. Je suppose que ça n’a rien de personnel mais qu’il est plutôt question d’éducation et de convenance. Sans oublier que cela reste un stéréotype générationnel, enfin j’ose espérer.
Être directrice est un double challenge, la main de fer dans un gant de velours : d’un côté, il faut être féminine, empathique et confiante et de l’autre, il faut exercer son autorité avec force et détermination.
Isabelle Lentz - CEO - Munhowen
Tout au long de mon parcours professionnel, j’ai consacré des efforts significatifs à mon développement personnel et professionnel en suivant des formations continues, telles qu’un MBA et diverses sessions à l’INSEAD ou encore à la Chambre de commerce. Année après année, je m’impose de participer à des formations dans divers domaines pour maintenir une ouverture d’esprit !
Je suis plongée dans l’univers de la brasserie et de la logistique, des secteurs largement dominés par la présence masculine. Malgré cela, je n’ai jamais ressenti de pression de la part de mes collègues ou de mes supérieurs. Au contraire, ma féminité s’est avérée être un véritable atout dans mon parcours professionnel.
Mon approche de la gestion repose sur la communication et l’écoute, mettant l’accent sur la collaboration et la prise en compte des opinions dans le processus décisionnel. Cette approche a ajouté une dimension féminine à un secteur traditionnellement masculin. La présence de femmes dans des environnements majoritairement masculins apporte une bouffée d’oxygène et crée un équilibre.
À mes yeux, cet équilibre entre hommes et femmes est essentiel pour faire progresser une entreprise. Ces sociétés deviennent plus performantes, bénéficiant de perspectives variées. Les femmes apportent des points de vue différents et jouent un rôle crucial dans la pérennité des entreprises.
En fin de compte, encourager l’égalité des chances et promouvoir la diversité de genre non seulement renforce l’image de l’entreprise en tant qu’employeur équitable, mais contribue également à son succès à long terme en favorisant une culture d’entreprise dynamique et innovante.
Propos recueillis par Sébastien Yernaux