Innover, c’est avant tout créer de la valeur
Pour Jean-Paul Schuler, le CEO de Luxinnovation, la construction est un secteur innovant certes, mais des progrès sont encore à faire dans le domaine de l’organisation des chantiers et de la valorisation des déchets. Pour y parvenir, le BIM et l’économie circulaire pourraient être des pistes à suivre.
Comment l’agence Luxinnovation accompagne-t-elle les entreprises dans leurs projets d’innovation ?
Nous avons quatre missions. La première consiste à aider les entreprises à constituer leurs dossiers de financement national et européen pour leurs projets de recherche et de développement. La deuxième est le soutien aux PME à travers les projets Fit for, dont le plus connu est Fit for innovation. Lancé début 2014, il a pour but d’améliorer la compétitivité des PME. En révisant leur mode de fonctionnement, celles-ci peuvent dégager des ressources humaines et financières pour les allouer à des activités d’innovation. Le bénéfice qu’elles peuvent en tirer après une année représente trois fois l’investissement qu’elles ont consenti. Dans le secteur de la construction, 7 entreprises suivent ce programme. Tous domaines confondus, 41 entreprises sont en phase de diagnostic et 21 en phase de développement. Notre troisième mission est le support aux start-up. Nous sommes les seuls à accompagner les porteurs de la naissance à la maturité de leur projet. Nous sommes le premier point de contact de quelque 300 personnes chaque année, puis nous les guidons vers des incubateurs dès que leur idée a atteint un certain niveau de maturité. La dernière de nos missions est la Cluster Initiative. Les clusters sont au nombre de 6 (Automobile, ICT, Biohealth, Materials, Space et Ecoinnovation) et nous assurons pour eux le networking, le branding et l’internationalisation, ainsi que la prospection et la promotion, qui vont bientôt devenir un département à part entière de Luxinnovation, à la suite de l’absorption de Luxembourg for Business.
Quelle est votre définition de l’innovation ?
Innover, c’est avant tout créer de la valeur. Cela peut passer par la recherche ou par le développement de nouveaux produits et services, mais aussi par un changement de processus, d’habitudes pour améliorer son retour sur investissement.
Comment percevez-vous la situation en matière d’innovation dans le secteur de la construction au Luxembourg ?
Le secteur est innovant dans tout ce qui touche à la performance énergétique. Mais il y a encore beaucoup à faire, et même beaucoup d’argent à gagner. Je pense notamment à l’organisation des chantiers des points de vue matériel et humain ou à la valorisation des déchets. Nous pourrions considérer les déchets de construction comme des produits à valeur ajoutée, comme ce fut le cas des scories issues des activités sidérurgiques qui ont été transformées en briques de laitier.
L’impulsion doit-elle venir du législateur ou des entreprises ?
Une chose est sûre : la situation ne peut pas perdurer. D’un côté, nous n’avons pas assez de place pour construire et, de l’autre, nous utilisons les terrains disponibles pour y stocker des déchets. Un changement de mentalité est nécessaire et je suppose que, sans pression législative ou sans incitation financière, la facilité sera de continuer à mettre les déchets en décharge.
Redonner vie aux déchets est un des principes de l’économie circulaire. Quel rôle la construction atelle à jouer dans la mise en place de ce concept ?
Le ministère de l’Économie veut faire du Luxembourg un des hotspots de l’économie circulaire en Europe. Or, sans réalisation concrète, il est difficile de promouvoir ce concept. C’est pourquoi nous avons pris l’initiative, dans le cadre du cluster Ecoinnovation, de réunir le ministère du Développement durable et des Infrastructures avec des investisseurs privés pour étudier la possibilité de construire un bâtiment en se basant sur les principes de l’économie circulaire. Ainsi, nous aurons une base concrète pour communiquer sur les avantages et les inconvénients de ce type de projet et pour montrer ce qu’il est réellement possible de faire. Un exemple aussi tangible qu’un bâtiment peut avoir un impact bien plus grand que des discours théoriques sur l’économie circulaire.
En ce qui concerne l’organisation des chantiers que vous voyez comme un point à améliorer, le BIM (Building Information Modeling) pourrait-il être une piste à suivre ?
Le BIM est effectivement une tendance qui prend de l’ampleur. C’est un outil qui doit être pris au sérieux par les entreprises de construction en ce sens qu’il permet de fluidifier les échanges dans toute la chaîne de valeur, d’accélérer les processus de décision et d’éviter les erreurs, donc d’améliorer la compétitivité. Les programmes que nous proposons, notamment Fit for innovation, peuvent contribuer à son déploiement massif.
Quelles sont les synergies entre Luxinnovation et Neobuild ?
Nous sommes liés par une convention bilatérale dont l’objectif est de promouvoir le secteur de la construction. Celle-ci se traduit par l’organisation commune d’événements, par une information réciproque sur ceux que nous organisons de part et d’autre à destination du secteur et par des échanges sur des technologies innovantes principalement via le cluster Ecoinnovation.
De façon plus individuelle, nous soutenons Neobuild en lui apportant notre expertise en matière de gestion de projet en complémentarité de son expertise métier. Par exemple, nous avons accompagné Cocert dans le déploiement du cadastre solaire, nous avons travaillé étroitement avec Neobuild lors de la construction de son bâtiment sur l’identification des technologies innovantes à tester dans la zone de liaison expérimentale qui le relie au bâtiment de l’IFSB et nous sommes partenaires de différents projets qui concernent les Smart Cities, l’Internet of Things ou encore l’Urban Farming.
Source : NEOMAG
Consultez en ligne NEOMAG #01 octobre 2016
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