La main gagnante
Vainqueurs du concours Jeunes Scientifiques 2013, Joe Hoffmann, Ben Weber et Patrick Lux sont allés présenter leur main robotisée gagnante à l’Intel International Science and Engineering Fair aux Etats Unis en mai dernier, ainsi qu’au concours européen EUCYS 2013 où ils ont décroché le Prix de l’Originalité de l’Office européen des Brevets. Retour sur cette folle épopée, qui, comme toutes les aventures, a bien connu son petit rebondissement.
Tout s’est joué à un fil. Ou plutôt, à une nuit de travail, et forcément, de stress aussi. De leur séjour à Prague où ils étaient venus présenter leur projet de main robotisée à l’occasion de la 25e édition du concours EUCYS , c’est d’ailleurs le souvenir que Patrick Lux, Joe Hoffmann et Ben Weber, 18 ans, racontent en premier.
Alors que grâce à cette invention, ils ont remporté le concours national Jeunes Scientifiques Luxembourg en avril dernier et se sont depuis envolés de conventions en concours pour représenter le Grand-Duché de Luxembourg, voilà qu’à Prague, un pays si proche de chez eux, cette main allait leur faire défaut. « A peine arrivés, en déballant la main, nous nous sommes aperçus que le voyage en avion abîmé les moteurs », raconte Patrick. Commence alors une nuit de réparation afin de afin rendre la main robotisée à nouveau présentable dès le lendemain. L’opération dure jusqu’à quatre heure du matin mais elle en vaudra la peine puisque, quelques jours et les passages des 19 membres du jury à leur stand plus tard, lors des remises de prix, les trois garçons entendent leur noms, leur projet et leur pays cités : ils viennent de remporter le Prix de l’Originalité de l’Office européen des Brevets. « Il y avait en tout trente prix à remettre. Sur 87 autres projets, oui, on espérait bien recevoir quelque chose sans pour autant prévoir quoi que ce soit », avoue Joe. Comme récompense, en plus de « voir son projet reconnu internationalement », un voyage de cinq jours à Munich, au siège de l’Office européen des Brevets. Un cadeau dont les garçons comptent bien profiter car le projet de la main robotisée est loin d’être terminé.
Alors que l’appel aux candidatures pour le concours Jeunes Scientifiques Luxembourg venait d’être lancé, Carlo Hansen [président de la Fondation jeunes scientifiques Luxembourg (FJSL), ndlr] propose à ces trois fondus de mécanique d’y participer, ce qu’ils acceptent sur le fond, sans avoir trop d’idées sur la forme. Le projet de la main artificielle viendra grâce à une vidéo Youtube dans laquelle est interviewé un homme confronté au prix exorbitant d’une prothèse qui lui permettrait de retrouver une vie presque normale suite à l’amputation de sa main. Révoltés par le coût d’une technologie qui devrait pourtant être à la portée de quiconque en a besoin, les lycéens en font leur cheval de bataille et se mettent donc en tête de prouver que l’on peut créer une main robotisée bien moins onéreuse.
200€ au lieu de 15.000€
Trois mois plus tard, en décembre, le premier prototype est prêt et est présenté pour le concours national qu’il remporte. Celui-ci comporte un gant qui reproduit le mouvement de la main le plus naturellement possible. Relié à la main articulée, celui-ci lui permet de réaliser des gestes précis. pourtant, trop sensible, le gant sera finalement abandonné pour cause de tremblements, ce qui donnera lieu à une seconde version, plus améliorée et créée à l’occasion du concours EUCYS. Dans cette dernière version en date, la main s’enrichit de deux doigts supplémentaires, d’un mécanisme de rotation du poignet plus réaliste et est plus fonctionnelle.
Une troisième version devrait bientôt voir le jour : à l’occasion du concours Jeunes Scientifiques Luxembourg 2014 auquel ils comptent bien se présenter car, « depuis Prague, de nombreuses nouvelles idées nous sont venues », assure Ben.
Au final, la main robotisée ne devrait pas coûter plus de 200€, contrairement aux 15.000€ de la main convoitée par le jeune homme de la vidéo Youtube. Une baisse de prix que les jeunes scientifiques doivent à Internet. « Nous avons trouvé quasiment tous nos matériaux, tels que les fils, les circuits intégrés ou le plastique sur le Web. Les petits moteurs, eux, proviennent par exemple d’avions ou voitures miniatures », nous dévoile simplement Patrick.
A terme, les garçons espèrent bien voir leur main servir leurs concitoyens qui en ont besoin. D’où leur hâte de visiter le siège munichois de l’Office des Brevets où ils prendront note sur la manière d’aboutir un projet pour en déposer le brevet et retiendront bien les conseils pour une future commercialisation. Car il est hors de question d’abandonner le projet. Ces futurs ingénieurs en mécanique et/ou robotique sont bien « trop passionnés par cette invention pour commencer un autre projet tant que celui-ci ne sera pas terminé », jurent-ils en chœur bien qu’ils redoutent que leur volonté de perfection ne fasse que ce projet ne soit « jamais terminé à 100% ».
Photo ©Florie Colarelli