Le BIM, un investissement aux retours garantis
Rencontre avec Gilles Pignon, chef de la division Building Information Modeling au sein du service projets infrastructure et responsable de la stratégie BIM des CFL.
L’implémentation du Building Information Modeling (BIM) présente des bénéfices à plusieurs niveaux, tant pour les entreprises du secteur de la construction que pour la société dans son ensemble, y compris la préservation de l’environnement. Pour les CFL qui le pratiquent depuis 2017, le BIM aboutit notamment à une montée en compétences des collaborateurs et à l’élévation de la qualité du bâti.
« Le BIM sert-il à quelque chose ? » « BIM ou pas BIM ? » Certains questionnements subsistent sur le Building Information Modeling (BIM) et son adoption en tant que méthode de travail par défaut lors de la conception et la réalisation de projets de construction. Le BIM trouve en effet son application dans tous les métiers du secteur de la construction au sein duquel sa pratique reste pourtant aléatoire et dépendante de la volonté des dirigeants d’entreprises de faire « le grand pas » vers le développement et l’alimentation de jumeaux numériques partagés.
« Le processus BIM ne représente pas un coût mais un investissement », déclare Gilles Pignon, chef de la Division Building Information Modeling au sein du service projets infrastructure, responsable de la stratégie BIM des CFL. « Ce processus pourrait devenir très coûteux voire difficile à mettre en place pour les acteurs qui n’anticipent pas, dès à présent, ce qui est amené à devenir obligatoire ».
Un gain d’efficience
Or, le retour garanti par le BIM se mesure à différents niveaux. Il permet tout d’abord aux parties prenantes, internes et externes, de gagner en efficience dans leur communication en s’accordant sur une méthode d’échange d’informations autour d’un projet. « Nous pratiquons le BIM depuis 2017 et nous comptons actuellement 21 projets BIM en cours », indique-t-il. « Notre attention reste portée sur l’information pour qu’elle soit transmise de la bonne manière, au bon moment et à la bonne personne. Ceci nous a conduit progressivement et logiquement vers la certification de référence pour le BIM – ISO 19650 - que nous avons obtenue en octobre dernier. Elle ne représente pas une fin en soi, mais elle illustre notre approche centrée sur l’échange d’informations entre les différents intervenants qui forment un écosystème autour d’un projet ».
De façon pragmatique, le BIM permet de maîtriser et d’optimiser les budgets, les ressources et le planning inhérents aux projets grâce à une base de données commune et unique, ainsi qu’en visualisant précisément la future construction au travers de son jumeau numérique. Ce dernier va l’accompagner tout au long de sa vie, y compris dans les volets de « facility management » et de maintenance. « En consacrant un peu plus de temps lors de la phase de conception, nous pouvons en gagner par la suite et, par ricochet, économiser des ressources en éliminant au préalable des facteurs de risque d’écarts en phase de construction », ajoute-t-il.
Circulaire par nature
Les retombées positives du BIM atteignent plus largement l’ensemble de la société, à commencer par l’optimisation de la performance énergétique des bâtiments qui est rendue possible en simulant leur comportement via le jumeau numérique. Ce processus devient également un rouage essentiel dans le contexte de l’économie circulaire qui vise, entre autres, à réduire l’impact de secteurs économiques générateurs de fortes émissions carbone.
« Le cadastre des matériaux pour les nouvelles constructions qui se profile comme une norme et la mutation vers une économie circulaire justifient amplement le recours au BIM qui permet, grâce à des données correctement exploitées, de connaître les quantités exactes de matériaux nécessaires et de pousser la réflexion jusqu’à la réutilisation de ceux-ci en fin de vie d’un bâtiment ou d’une infrastructure », ajoute Gilles Pignon.
De l’opérationnel aux bienfaits collectifs, le BIM marque un changement de paradigme, des petites aux grandes structures. « Le BIM est une formidable opportunité d’upskilling des collaborateurs qui ne doivent pas, loin de là, disposer d’un profil informatique pour l’apprivoiser, mais plutôt être au fait du secteur de la construction et suivre ensuite l’une des nombreuses formations d’ores et déjà disponibles sur le marché », souligne-t-il. « Le BIM doit se concevoir de manière transversale, en impliquant tous les départements mobilisés par un projet de construction. Nous faisons du BIM une opportunité de montée en compétences de collaborateurs des CFL, par exemple en mettant en place des référents BIM qui disposent de notions et de compétences de base et deviennent les interlocuteurs privilégiés des experts métier ».
Les autres pays n’attendent pas
Innovation, efficience et qualité, trois valeurs qui vont continuer à guider les CFL dans leur démarche BIM. Parmi les échéances à l’agenda, figure la réalisation d’un 1er projet « FullBIM » impliquant tous les métiers ferroviaires à l’horizon 2025. 17 projets BIM liés à certains métiers sont prévus dans les 5 prochaines années. « Nous gardons en ligne de mire la création d’un jumeau numérique de l’ensemble de notre patrimoine bâti et ferroviaire d’ici 2035 », pointe-t-il. « Pour atteindre cet objectif, nous investissons constamment dans la formation de nos collaborateurs ».
À l’échelle nationale, le BIM est un atout pour la compétitivité d’une économie toujours plus digitalisée. Car les exemples de pays étrangers en pointe sur le sujet ne manquent pas, comme l’Angleterre qui impose le BIM pour tout marché public. « Le BIM deviendra, à terme, une norme à l’échelle européenne », appuie Gilles Pignon.
L’ampleur du chantier en vaut la peine puisqu’il devrait aboutir à un saut quantique dans la digitalisation du secteur par la mise en place d’un nouveau standard de construction. « Nous ne pouvons qu’encourager les principaux maîtres d’ouvrage du pays à BIMiser ! », résume-t-il. Dans un pays qui veut rester innovant, investir dans le BIM apparaît de plus en plus comme une évidence.
Crédits photos : CFL, Images Bureau d’architecte BENG
Extrait du NEOMAG#52
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