Omnibus : La carte blanche de Bruno Renders
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Omnibus : La carte blanche de Bruno Renders

La Commission européenne a annoncé le paquet Omnibus, relatif au devoir de vigilance et au reporting en matière de durabilité, entre autres. Nous avons demandé à Bruno Renders, président du Conseil national pour la construction durable, de donner son point de vue sur le sujet, notamment appliqué au secteur de la construction.

L’ADN du paquet Omnibus et du Green Deal est fondamental, il ne faut pas oublier le pourquoi du comment. L’intelligence de la Commission a été d’associer des secteurs différents dans les différentes phases du texte. D’abord la finance, avec les banquiers, les assureurs ou encore les fonds d’investissement ? La notion de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) les a amené à se remettre en question. Ils ont donc dû questionner une partie de leurs investissements, ce qui a par conséquent impacté le secteur de la construction. Voilà comment on peut réorienter l’économie vers quelque chose de plus résilient, de plus décarboné.

Malgré une mise en œuvre parfois trop technocratique, je suis un grand défenseur du Green Deal et de la taxonomie européenne. Avec cette dernière, c’est la première fois qu’un texte européen permet de valoriser les efforts d’une entreprise qui « verdit » ses activités, qui fait des investissements qui vont dans le sens de la lutte contre le changement climatique.

Six objectifs, six opportunités de mieux faire

La taxonomie verte européenne fixe six objectifs. D’abord, l’atténuation du changement climatique, qui doit aujourd’hui être une ligne directrice dans les décisions managériales. Toute entreprise cherche à augmenter son volume d’activité et son chiffre d’affaires, mais si elle n’y prend pas garde, cela va forcément augmenter ses émissions de CO₂. Il faut donc se demander ce qu’on peut mettre en œuvre pour contrer ce phénomène.

Deuxièmement, l’adaptation au changement climatique. Dans le secteur de la construction, cela veut dire concevoir des bâtiments capables de résister à des épisodes climatiques extrêmes. Il faudra concevoir différemment.

Le troisième pilier concerne l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et maritimes. Aujourd’hui notre usage de l’eau est complètement linéaire et il faut évoluer vers quelque chose de plus résilient : ne pas employer de l’eau potable lorsque cela n’est pas nécessaire et privilégier, par exemple, l’eau de pluie ou des eaux usées qui peuvent ainsi avoir une seconde vie.

La transition vers une économie circulaire est un objectif qui résonne fortement dans le domaine de la construction. Si on s’y prend bien, produire moins de déchets revient à dépenser moins d’argent. Consommer moins d’énergie fossile et privilégier l’énergie renouvelable permet aussi de faire des économies.

Ensuite, la prévention et le contrôle de la pollution. Quand on est dans un secteur avec de lourdes émissions carbone, il est logique de réduire cette pollution à sa portion congrue : c’est le principe de base d’une pollueur-payeur.

Le dernier objectif est la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes, qui sont essentiels et sur lesquelles la construction a un vrai rôle à jouer.

L’optimisme avant tout

Avec la CSRD, la CS3D, encore une fois, l’intention est bonne, mais la mise en œuvre est trop technocratique. Parce que toutes les entreprises ne sont pas égales devant ces exigences, surtout dans un secteur comme celui de la construction qui est majoritairement composé de PME.

En revanche, pousser une entreprise à faire son bilan carbone, même si elle n’y est pas contrainte en raison de sa taille, est une bonne chose. Je suis un grand défenseur du reporting car il permet d’organiser d’un point de vue qualitatif le feedback de l’entreprise qui a alors l’opportunité de se poser les bonnes questions et d’évoluer.

La Commission a eu raison de revoir à la baisse les critères d’application stricte d’Omnibus, bien qu’il ne faille pas perdre de vue l’ADN du texte, sinon nous le paierons dans le futur. Pour le secteur de la construction c’est une bonne chose car il connait actuellement des difficultés. Il faut laisser le temps aux entreprises de s’adapter. La simplification administrative apportée par Omnibus est une façon de faire, une autre pourrait être de simplifier les éléments à reporter, les indicateurs clés performance - ou KPI (Key Performance Indicators) en anglais.

En bref, beaucoup de solutions existent pour décarboner notre économie et il faut les valoriser. Il faut aussi donner le moyen aux entreprises de se doter d’un certain nombre de nouvelles technologies et d’en développer d’autres. L’Europe doit monter en puissance dans ce domaine, notamment pour garantir son indépendance énergétique. Si nous travaillons ensemble, nous y arriverons. Je suis optimiste et j’ai une règle d’or : savoir ce que l’on fait, pourquoi on le fait et le faire du mieux que l’on peut.


À lire aussi : Les cartes blanche sur le même sujet de la Chambre des Métiers, de l’INDR et de Jeannot Schroeder.

Carte blanche
Publié le mercredi 9 avril 2025
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