
Omnibus : La carte blanche de la Chambre des Métiers
La Commission européenne a récemment annoncé le paquet Omnibus qui vise à réduire les formalités administratives et simplifier les règles européennes concernant le devoir de vigilance et le reporting en matière de durabilité, entre autres. Nous avons demandé à la Chambre des Métiers de donner son point de vue sur cette annonce.
Le paquet Omnibus est vital pour les PME artisanales
L’Artisanat luxembourgeois affiche avec fierté sa longue tradition durable. Pour les entreprises artisanales, l’action durable n’est pas une tendance, mais un élément déterminant de leur identité et de leurs valeurs qui s’est développé au fil des siècles. Les artisans pratiquent la durabilité au quotidien - par conviction profonde et sous de multiples facettes.
Les artisans réparent une multitude de produits et jouent ainsi un rôle clé dans la préservation des ressources et dans l’économie circulaire. Même dans des conditions alternantes, la réalité sur le terrain est une production artisanale préservant les ressources et répondant exactement aux exigences des clients, ce qui permet par exemple d’éviter presque entièrement les déchets lors de la fabrication artisanale de produits alimentaires.
L’Artisanat fait également preuve d’un grand engagement social. Ainsi les entreprises mettent à disposition un grand nombre de places de formation, même en période de difficultés économiques, aident les jeunes à s’orienter professionnellement, investissent dans la formation continue et le perfectionnement de leurs collaborateurs et offrent aux migrants les meilleures perspectives d’intégration durable grâce à la formation et à l’emploi. Elles renforcent la cohésion sociale, créent des perspectives d’emploi et d’avenir et garantissent l’approvisionnement de proximité - en outre, elles façonnent également des quartiers urbains attrayants et constituent le pilier principal du pays pour mener à bien la transition énergétique. Les récentes crises ont par ailleurs montré l’importance d’un approvisionnement de proximité fonctionnel et accessible et ont mis en évidence l’importance de la création de valeur et de la fabrication régionales.
La législation européenne en matière de développement durable (CSRD-CSDDD-Taxonomie) en vigueur, même si le nombre d’entreprises artisanales directement impactées et soumises à une obligation de reporting est peu élevé, a toutefois un effet de ruissellement (« trickle-down effect ») sur les petites entreprises le long des chaînes d’approvisionnement qui sont soumises dans la pratique à des demandes de rapports jugées excessives. Ceci a suscité de fortes inquiétudes auprès des PME et TPE sur la manière de garantir la conformité aux nouvelles lois, surtout en tenant compte des ressources limitées - financières et humaines. Alors qu’elles consacrent des efforts considérables à la création de produits et de services durables, les exigences disproportionnées ont suscité un sentiment de méfiance et de frustration auprès des PME artisanales.
Maintenant, le paquet Omnibus présenté par la Commission européenne en février, entend soulager les entreprises tout en réduisant la complexité des exigences communautaires. La Chambre des Métiers approuve ces démarches qui visent à trouver le juste équilibre entre les objectifs de durabilité et les charges administratives et financières requises pour les atteindre.
Concrètement, la Chambre des Métiers considère que le paquet Omnibus doit apporter une simplification tangible et réduire la charge réglementaire pour permettre aux entrepreneurs de développer leurs activités de manière durable, tout en tenant compte des spécificités de chaque secteur. En l’occurrence, l’Artisanat étant en soi synonyme de durabilité, la Chambre des Métiers pourrait s’imaginer une exemption pour toute obligation de reporting directe et indirecte en la matière tout en favorisant une mise en évidence volontaire des démarches durables par les PME.
La proposition Omnibus ne doit pas se contenter de changements cosmétiques. Elle doit éliminer les doublons, les chevauchements et les incohérences, étant donné que de nombreuses initiatives ESG sont liées entre elles. La législation Omnibus doit agir comme une mesure de clarification et de simplification pour recréer la confiance et la logique. En outre, les PME ont besoin d’une sécurité de planification et d’une certitude juridique sur la manière d’agir dans l’immédiat. Par conséquent, l’Omnibus doit clairement indiquer quel est le cadre juridique applicable jusqu’à l’adoption de la législation.
Afin de limiter la charge administrative pour les entreprises qui ne sont pas soumises à l’obligation de déclaration, mais qui sont indirectement contraintes de publier des indicateurs ou des activités de durabilité dans la chaîne d’approvisionnement ou en tant qu’emprunteurs, la Commission européenne propose d’encadrer les informations dues par la norme de déclaration volontaire, dite norme « VSME ».
L’objectif de la VSME est de permettre aux entreprises non soumises à l’obligation de déclaration de fournir à leurs clients et à leurs bailleurs de fonds les informations dont ils ont besoin dans le cadre de leur propre obligation de déclaration en matière de RSE et de limiter ainsi la charge de déclaration (temps, frais de conseil) pour les entreprises artisanales non soumises à l’obligation de déclaration et de garantir durablement l’accès au financement.
Pour atteindre cet objectif, il faut toutefois s’assurer que les entreprises artisanales comprennent cette norme de reporting volontaire - VSME - et qu’elles puissent s’y conformer sur la base des données disponibles. Car ce qui sonne bien en théorie n’est pas forcément praticable. C’est pourquoi la Chambre des Métiers demande à ce que cette norme soit testée en amont auprès des PME artisanales luxembourgeoises et façonnée de manière à garder une proportionnalité adéquate des efforts à mettre en œuvre par chaque PME individuellement, sans nécessairement devoir prendre recours à des consultants excessivement coûteux.
Texte de la Chambre des Métiers